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Déguerpissement : le Conseil d’Etat souhaite aussi protéger les propriétaires


Les députés ont voté à une quasi unanimité, sans les voix de l’ADR, le texte protégeant les locataires des expulsions pendant l’hiver. Mais sous condition. (Photo archives Editpress / Didier Sylvestre)

Le Conseil d’État a traîné à livrer son avis sur l’article unique du projet de loi protégeant les locataires contre un déguerpissement pendant l’hiver. Il a suggéré de protéger, aussi, les propriétaires

Deux intervenants, seulement, pour ce projet de loi à article unique qui devait suspendre de façon automatique et jusqu’au 31 mars 2023 inclus, l’exécution des déguerpissements de locataires ordonnés en matière de bail à usage d’habitation. D’abord, Roy Reding (ADR) a pris la parole pour dire que ce n’était pas normal de pénaliser les propriétaires sous prétexte que le gouvernement est incapable de proposer des logements alternatifs aux locataires condamnés à quitter leur logement faute de paiement.

Ensuite, Nathalie Oberweis (déi Lénk), pour rappeler que ce sont les locataires qu’il faut protéger et dire aussi son mécontentement vis-à-vis du Conseil d’État qui a traîné avant de rendre son avis, en imposant un changement radical au texte initial.

«Ce sont les locataires qu’il faut protéger»

Dans le projet déposé le 3 octobre dernier, le gouvernement entendait simplement suspendre les déguerpissements, mais le Conseil d’État s’y oppose formellement, condamnant l’automatisme de la suspension du déguerpissement et donc le manque d’appréciation de la cause de résiliation du bail. «Le locataire de bonne foi, mais victime des vicissitudes de l’économie, sera traité à même enseigne que le locataire qui aura vu son bail dénoncé en raison de dégradations à l’immeuble loué ou pour d’autres manquements au contrat. De même, il n’est aucunement tenu compte de l’éventuel besoin personnel du bailleur», critique le Conseil d’État.

La députée de gauche fait des bonds quand elle lit que le Conseil d’État estime que le projet de loi vise à instaurer un traitement spécifique d’une catégorie de personnes, en l’espèce les locataires, en les favorisant par rapport aux propriétaires. «Ce sont les locataires qu’il faut protéger et non les propriétaires», lance la députée à la tribune de la Chambre, mercredi dernier.

Passage devant le juge de paix

La suggestion de modification du Conseil d’État doit être prise telle quelle, vu l’urgence de voter la loi avant les vacances, autre motif de mécontentement pour Nathalie Oberweis, partagé par la ministre de la Justice, Sam Tanson. Car il ne s’agit plus de suspendre automatiquement les déguerpissements.

Pour satisfaire la Haute Corporation, les députés en commission ont accepté que les locataires condamnés à quitter leur logement introduisent une requête devant le juge de paix pour se voir accorder une telle suspension. «Cette demande devra être accompagnée des pièces nécessaires justifiant que le locataire se trouve dans l’impossibilité de trouver à se reloger pour des raisons tenant à sa situation économique difficile, mais indépendantes de sa volonté, afin d’exclure tout abus», écrit le Conseil d’État.

Vers une indemnisation de l’Etat ?

En raison des pressions inflationnistes, l’objectif du projet de loi était, selon l’exposé des motifs, «d’éviter que des familles et personnes se retrouvent du jour au lendemain à la rue durant la période hivernale avec une quasi-impossibilité de retrouver rapidement un nouveau logement au vu de leur situation économique indubitablement difficile, et constatant le manque de logements d’appui à disposition des services sociaux étatiques et communaux».

Le Conseil d’État estime que «le manque de ce type de logements sera en fin de compte à supporter par les propriétaires» et s’interroge sur une éventuelle obligation de l’État de les indemniser, si les locataires concernés ne respectent pas les obligations découlant du bail résilié pendant cette période additionnelle. Une position partagée par la Chambre de commerce qui écrit que «les propriétaires risquent finalement, par l’effet de cette loi, de voir s’accroître les arriérés, sans réelles perspectives de pouvoir récupérer ces sommes un jour».

Filet de sécurité

Depuis le 3 octobre, date du dépôt du projet de loi, des expulsions ont eu lieu, comme en témoigne Nathalie Oberweis, contactée par une famille forcée de quitter son logement et se retrouvant démunie. Elle votera quand même en faveur de la loi, «le couteau sous la gorge», car il n’y a plus de temps pour la discussion.

C’est aussi ce que regrette la ministre de la Justice, Sam Tanson, qui déclare aux députés qu’elle aurait souhaité que le Conseil d’État s’exprime plus tôt, afin de discuter des dispositions du projet de loi. En attendant, le locataire condamné à déguerpir, peut introduire une demande auprès d’un juge de paix pour obtenir sa clémence.

«C’est un filet de sécurité supplémentaire en cette période de forte inflation», observe la ministre de la Justice.

Un commentaire

  1. A la base il y a un contrat de location, que chacun respecte ses obligations et tout ira bien! Pourquoi vouloir protéger les locataires mauvais payeurs et souvent de mauvaise foie, au détriment des propriétaires qui eux doivent assumer les frais leur incombant. Pour finir, opposer locataires contre propriétaires détériore la relation, et est discriminatoire pour la partie lésée. Chacun doit respecter les termes du contrat qu’il a signé et par lequel chacun doit tenir ses engagements envers l’autre. Sinon à quoi sert-il de signer un contrat de location. Toutes ces polémiques de gauche et de droite finissent par bloquer le système en réduisant la confiance à néant.

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