Accueil | A la Une | Claude Wiseler : «L’État ne peut pas être responsable de tout»

Claude Wiseler : «L’État ne peut pas être responsable de tout»


«Quand on traverse une période difficile, cela permet de se remettre en question. En ce qui concerne le recentrage de nos valeurs, c’était nécessaire.» (Photos : julien garroy)

Le président du CSV, Claude Wiseler, révèle le nouveau visage de son parti, après un recentrage des valeurs qui l’animent. Cet exercice s’accompagne d’un sérieux lifting de son identité visuelle.

Le Parti chrétien-social a tenu son congrès samedi matin, qu’il considère comme le point de départ d’une nouvelle ère. Le président Claude Wiseler nous livre les détails de cet exercice qui a mené au résultat dévoilé au public ce week-end.

C’est le renouveau à tous les étages au CSV. Nouvelle identité visuelle, nouveau style : vous n’avez pas chômé…

Claude Wiseler : Nous avons, effectivement, beaucoup travaillé ces huit derniers mois à réorganiser le parti. Nous avons surtout une nouvelle façon de travailler, de nous présenter, d’aller devant le public et le tout avec une agence professionnelle pour nous accompagner. Nous avons également travaillé sur notre contenu, sur la définition de notre parti. Il fallait sortir de l’immédiateté de la politique quotidienne et réfléchir à ce que nous sommes. Quelles sont nos valeurs, comment les définit-on et que signifient-elles. Un travail de longue haleine auquel ont participé toutes nos sous-sections à travers une dizaine d’ateliers et via un site qui était entièrement dédié à l’identité du CSV.

Les vieilles querelles sont aujourd’hui oubliées?

On a connu des temps difficiles, mais je crois que cela présente également un avantage. Quand on traverse une période difficile, cela permet de se remettre en question. En tout cas, en ce qui concerne le recentrage de nos valeurs, c’était nécessaire.

Vous avez opté pour un changement radical dans la tenue du congrès également. Finis les longs discours, place au zapping. Tout doit aller plus vite?

Nous avons changé la façon de nous présenter au congrès et effectivement nous avons du monde sur scène avec des petites interviews pour s’adapter à ce que sont les nouveaux besoins en communication. Le message est modernisé, et pour moi, c’est aussi nouveau, car j’avais l’habitude de faire de longs discours, alors que je me suis recentré sur des thèmes précis avec des interventions courtes. Il ne s’agit pas d’aller plus vite, mais d’être plus clair et plus direct.

Quand vous dites que vous avez réfléchi à l’identité du CSV, les électeurs doivent-ils s’attendre à des surprises?

Non, il n’y a pas de grandes surprises, mais on s’interroge sur ce que signifient nos valeurs dans le monde d’aujourd’hui. C’était très intéressant, car l’ensemble des ateliers qui ont travaillé sur la définition de notre identité en est arrivé aux mêmes résultats. Ce qui me fait dire que les gens savent très bien pourquoi ils sont dans ce parti. Il y a d’abord cette volonté de rester un parti populaire.

Un parti populaire, est-ce un parti qui rassemble le plus grand nombre de voix?

Non, pour nous, ce n’est pas une question de résultats électoraux. Ce n’est pas parce qu’un parti fait 20 ou 30 % des voix qu’il est dénommé populaire. Aujourd’hui, dans le monde où l’on vit, on voit des partis qui essaient de fragmenter, de diversifier, de se concentrer sur un sujet, de polariser et de se spécialiser, c’est là leur fonds de commerce. Nous, nous souhaitons rester un parti populaire, ce qui signifie aussi que nous ne sommes pas à la solde d’un lobby. Nous ne sommes pas représentatifs que d’une partie de la population et donc nous essayons de faire des propositions politiques qui correspondent à la plus grande majorité des citoyens.

C’est une vision plutôt laborieuse…

Oui, cela comporte deux désavantages. D’abord, on ne peut pas toujours avoir des propositions simples qui se résument en une phrase. Nous sommes parfois dans la complexité et la nuance pour trouver une solution qui tienne compte des besoins et aspirations du plus grand nombre et qui soit dans le respect de tous. Ensuite, cela prend du temps au niveau du parti pour parler à beaucoup de gens. Mais nous avons entendu de la part de nos membres que c’était pourtant la voie à suivre, car cela fait partie de notre identité. Alors cela aboutit à des solutions peut-être plus complexes, plus difficiles à expliquer. Elles correspondent cependant plus à notre société et à la politique que nous souhaitons appliquer.

Comment gouverner et plaire à tout le monde, vu que le CSV veut brasser large?

La question n’est pas de plaire à tout le monde, mais d’être capable de proposer des solutions qui correspondent aux réalités de notre société et qui sont équilibrées par rapport aux besoins des uns et des autres. Il y aura toujours des insatisfaits. Il faut apporter plus de nuances que lorsqu’on tranche en faveur d’un seul groupe. Puisque nous sommes un parti populaire, il faut donner la voix aux différents groupes qui composent notre société et notre parti, et nous sommes fiers de cette méthode.

À quoi ressemble cette politique?

D’abord, chaque individu compte. Nous considérons que les grands sujets comme la justice sociale ou l’égalité des chances sont au centre de notre pensée. L’égalité des chances ne signifie cependant pas l’égalité de tous face à tout. Cela veut dire d’abord que chacun a une responsabilité et chacun doit l’assumer, envers soi-même et envers les autres. C’est ce que nous appelons le principe de subsidiarité. L’État ne peut pas être responsable de tout et les responsabilités se situent au niveau individuel, donc la famille, les voisins, les associations, la commune jouent un rôle important. Notre politique souhaite faire en sorte que les gens puissent assumer des responsabilités les uns envers les autres. Saint-Exupéry a dit que ce qui séparait l’homme de l’animal, c’est cette capacité de prendre cette responsabilité pour quelqu’un d’autre. J’ai une responsabilité envers mes enfants, envers ma partenaire et vice versa. Ce principe influence notre politique familiale, fiscale, notre politique du logement, etc., avec des conséquences tout à fait claires.

Ce parti populaire que vous présidez et qui vous tient tant à cœur se place de quel côté de l’échiquier, plutôt à droite ou à gauche?

C’est une question qui ne nous intéresse pas. Nous nous définissons comme un parti de centre, parce qu’on ne sait plus très bien aujourd’hui ce qu’est la droite ou la gauche. Notre parti est dirigé vers le pragmatisme politique, comme beaucoup d’autres, mais nous sommes guidés par nos valeurs et non pas par une idéologie. Ces ateliers que nous avons menés ont surtout révélé que la construction européenne est une des idées majeures qui définissent notre parti. C’est aussi tout un pan de notre histoire. Le CSV a toujours profondément cru en l’Europe et nos Premiers ministres successifs ont participé à l’écriture de belles pages de l’histoire européenne. Même dans des temps difficiles, je pense à la campagne du référendum de 2005 : Jean-Claude Juncker a su convaincre que la perspective européenne était fortement ancrée dans nos esprits et dans l’histoire du Luxembourg.

Quels enseignements personnels tirez-vous de cette vaste consultation?

Nous arrivons à mieux mettre des mots pour expliquer la politique que nous voulons et qui nous définit. C’était plus intuitif, avant. Ce qui m’a paru important aussi, c’est l’intérêt des participants à cet exercice.

Le « C » du Parti populaire chrétien-social a-t-il fait l’objet d’une discussion?

Oui, puisque la question de conserver le nom du parti s’est posée. Personne n’a émis le souhait de changer de nom et je pense que si j’avais proposé de changer de nom, d’abandonner le « C », je me serais fait lyncher (il rit). Nous avons voulu conserver notre histoire et le « C » y joue un grand rôle. Il n’implique pas l’appartenance à une religion, mais exprime notre adhésion à des valeurs. Comme, par exemple, le respect de la personne individuelle et le fait que chacun, même en étant différent, a droit au même respect. Toute notre politique est imprégnée de cette valeur fondamentale. Notre conservatisme, encore que je n’aime pas trop ce mot, vient de là : conserver ce qui est important dans la vie. Protéger ce qui nous permet de vivre.

Vous avez une nouvelle équipe pour conduire le parti. N’est-ce pas un pari risqué à un an des élections?

On forme un groupe relativement nouveau et déjà cohérent, très jeune, à part moi. Le dédoublement des postes de première ligne a finalement bien pris. Alors, bien sûr, certains observateurs ont cru bon de relever le déséquilibre de notoriété entre les deux présidents du CSV. On s’en moque. Et cela va changer. Élisabeth Margue fait du bon boulot et sa popularité va croître avec la visibilité que lui apporte le poste de présidente.

Expliquez-nous votre nouvelle identité visuelle, avec ce logo jaune et bleu sur fond noir…

C’est surtout le noir que je vois, qui a toujours été la couleur du CSV. On ne renie rien du passé, au contraire, mais il était nécessaire aussi de montrer le changement en y ajoutant différentes couleurs. Ce qui montre la diversité de notre parti. Changement également par de nouveaux visages – beaucoup se sont exprimés lors de ce congrès – et par un nouveau rythme. Nous avons besoin d’un nouveau dynamisme et j’ai été très surpris par l’enthousiasme que cela a suscité auprès de nos membres. Ils étaient demandeurs, après tout ce qu’on a vécu.

Nous écrivons une nouvelle page, avec de nouvelles couleurs et un autre style

Avez-vous d’ores et déjà le sentiment d’avoir accompli une partie de votre mission?

J’avais un programme en deux étapes. La première consistait à apaiser notre grande maison. Ce fut violent, mais nous avons réussi. Je crois que nos problèmes sont derrière nous. Nous écrivons une nouvelle page, avec de nouvelles couleurs et un autre style. J’espère que cela va se ressentir, la nouvelle équipe y travaille. Maintenant, elle va développer le programme électoral autour des groupes de réflexion.

L’agence allemande de communication et de marketing qui vous accompagne s’appelle Guru (NDLR : prononcez gourou), vous y croyez?

Le nom est évocateur (il rit). C’est une firme qui a mené de nombreuses campagnes avec la CDU et elles ont eu du succès. Le style est très vivant. Et c’est ce que nous voulons. Notre budget ordinaire nous permet d’avoir recours à ses services pour les mois à venir. Le budget de notre campagne sera bien sûr transparent. Mais cela coûte de l’argent, je ne vous apprends rien.

«Nous avons besoin d’un nouveau dynamisme et j’ai été très surpris par l’enthousiasme que cela a suscité auprès de nos membres.»

2 plusieurs commentaires

  1. Si seulement l’état se contentait du régalien, c ‘est à dire de la sécurité des citoyens (police, justice, armée et diplomatie) et pour le reste d’une simple mision de régulation, le pays ne s’en porterait que mieux.
    Et surtout qu’on arrête cette pitrerie qu’on appelle « crise climatique ». le climat évolue naturellement et l’homme n’y peut rien.
    Les élucubrations des écolos-fascistes ne sont que… des élucubrations.

  2. M. Wiseler a un certain talent pour dire rien du tout avec beaucoup de mots bien choisis. C’est comme son parti qui n’a rien à communiquer à part quelques slogans choisis par son agence de pub – moderne, dynamique, créatif, nouveau et j’en passe. Mais je m’en fiche de leur dynamique, de leur créativité et de leur modernité. Où sont les réponses aux questions pertinentes: logement, immigration, défense, futur de l’UE, crise climatique? Le CSV n’a pas su donner des réponses convainquantes dans le passé et les réponses se font toujours attendre. Mais qu’il se fasse élire ailleurs! Peut-être même en Ukraine, puisqu’il arbore déjà ses couleurs. Leur vieil ami Poutine s’en amusera certainement.

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.