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Fairtrade Lëtzebuerg décrypte les effets de la crise sur les pays du Sud


Silvia Monteiro et Jean-Louis Zeien ont présenté le bilan 2020 de Fairtrade Lëtzebuerg. (photo Alain Rischard)

L’année 2020 a été particulièrement difficile pour les travailleurs et producteurs du Sud, qui ont vu leurs exportations diminuer drastiquement.

Deux milliards de dollars en moins pour les usines de confection au Bangladesh, 50 millions de kilos de stock de thé restés sur les bras, plus de deux milliards d’euros de pertes pour les plantations de roses au Kenya et en Éthiopie… La baisse brutale de la demande ou l’annulation pure et simple des commandes, l’obligation de respecter la distanciation physique, voire l’impossibilité de travailler tout court en 2020, ont eu des conséquences dramatiques pour les pays du Sud.

La crise sanitaire et la crise économique qui en a découlé (et qui n’est vraisemblablement pas près de se terminer) ont en effet eu des répercussions multiples sur les travailleurs et producteurs d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes, a rappelé l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg au cours d’une conférence de presse donnée mardi en vue de présenter son bilan pour l’année 2020, année évidemment marquée par la pandémie et les confinements successifs.

La crise a ainsi eu des conséquences pour ces travailleurs – déjà particulièrement vulnérables – tant sur le plan de la santé (du fait de l’épidémie et de l’engorgement des structures de santé, «peu robustes» avant la crise pour la plupart) que sur le plan économique et au niveau de la sécurité alimentaire. «Le ralentissement de l’activité, les manques logistiques des chaînes d’approvisionnement, la hausse des coûts de production, entre autres du fait des mesures anti-Covid, ont engendré des pertes d’emploi et des défauts de remboursement de prêts bancaires», a expliqué Jean-Louis Zeien, le président de Fairtrade Lëtzebuerg.

Par exemple, en raison des annulations de commandes, les sucreries indiennes n’ont pu régler que 20 à 25% des paiements aux producteurs en avril 2020, tandis qu’au Pérou, les travailleurs des mines d’or artisanales, lesquelles ont dû fermer entre mars et août 2020, n’ont purement et simplement pas reçu de salaire. La filière des fleurs et celle du thé ont été également durement touchées. Faute de ressources financières dans ces plantations, les employés qui ont perdu leur emploi n’ont pu bénéficier d’aucun revenu compensatoire ou de protection sociale.

Des conditions de travail indécentes

Autre constat relevé par Fairtrade : la pandémie a accru les risques de violation des droits humains. «La baisse des exportations s’accompagne de licenciements, et si les offres d’emploi se font rares, les travailleurs peuvent être enclins à accepter des rémunérations et des conditions de travail indécentes», a rappelé Jean-Louis Zeien, soulignant par ailleurs que d’après un rapport établi par l’Organisation internationale du travail et l’Unicef, «le nombre d’enfants victimes du travail des enfants s’élève à 160 millions dans le monde. Neuf millions supplémentaires sont en danger à cause de la pandémie de Covid-19.»

Face à ces menaces, en plus de deux fonds de soutien pour faire face aux besoins élémentaires des membres du mouvement Fairtrade, l’ONG (au niveau international) a donc décrété dès mars 2020 la possibilité pour les organisations de producteurs et de travailleurs d’utiliser la prime de développement Fairtrade (qui s’est élevée à un peu plus de 190 millions d’euros et sert habituellement à financer des projets collectifs, comme la construction d’écoles ou de cliniques par exemple) pour des mesures immédiates destinées à protéger la santé et la sécurité des travailleurs : achats de masques, de gants, de semences, de produits de première nécessité, etc. Elle a également permis de payer une partie des salaires aux travailleurs ne disposant de plus aucun revenu.

En parallèle de ces actions auxquelles elle a participé, Fairtrade Lëtzebuerg, qui joue aussi un rôle éducatif au Luxembourg et se rend dans les écoles pour expliquer et promouvoir le commerce équitable, a développé toute une série de webinaires ainsi que le programme «Fairtrade Doheem», afin de pouvoir continuer à sensibiliser le consommateur, maillon indispensable au développement du commerce équitable. «Des activités en ligne ont été développées, telles que des jeux et même un escape game à faire chez soi», explique Silvia Monteiro, responsable Éducation à la citoyenneté mondialiste. Deux campagnes de financement participatif en ligne menées l’an dernier ont en outre permis de venir en aide à 235 familles au Nicaragua et à 300 familles en Côte d’Ivoire, en leur fournissant nourriture et kits de santé.

Tatiana Salvan

La Coopération contre la faim

Le récent rapport de l’ONU intitulé «L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde» indique qu’environ une personne sur dix dans le monde a été confrontée à la faim en 2020. Un chiffre en nette augmentation par rapport à l’année précédente et qui a fait l’objet d’une question parlementaire (n° 4677) destinée à connaître les projets du Luxembourg dans cette lutte. Dans sa réponse apportée le 5 août, le ministre plénipotentiaire de la Coopération Christophe Schiltz a rappelé que le Luxembourg a cofinancé en 2020 «de nombreux projets d’aide alimentaire, surtout dans la région du Sahel et au Soudan du Sud, avec un montant total de 1,34 million d’euros». Un montant d’ores et déjà en hausse pour 2021, puisque le pays s’est déjà engagé à consacrer 1,65 million d’euros à des projets d’aide alimentaire. «La Coopération luxembourgeoise continuera à appuyer des programmes et initiatives pour combattre la faim dans le monde», a conclu le ministre.

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