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[Le portrait] Arnaud Starck, de l’ombre à la lumière


Même s’il préférerait rester dans l’ombre, Arnaud Starck ne peut plus vraiment se cacher. Si Patrizia van der Weken est à ce niveau, il n’y est pas pour rien ! (Photo : mélanie maps)

L’entraîneur aimerait rester sous les radars. Problème : Patrizia van der Weken, dont il s’occupe depuis dix ans et qui participe aux Mondiaux de Glasgow samedi, explose sur la scène internationale.

Il s’est envolé à destination de Glasgow, où se déroulent les championnats du monde indoor d’athlétisme à partir de demain. En juin, il sera à Rome pour les championnats d’Europe. Et cet été, on le retrouvera du côté de Paris pour les JO! Lui, c’est Arnaud Starck, entraîneur d’une certaine Patrizia van der Weken, qui s’est installée en l’espace de quelques mois dans le gotha du sprint international.

Entre les deux, ça fait dix ans que ça dure. Une belle histoire entre «un homme de l’ombre» qui goûte très peu à se retrouver sur le devant de la scène, et une jeune femme qui se rappelle avoir eu un premier contact loin d’être évident avec celui qu’elle qualifie désormais de «mentor» : «Arnaud, quand on le voit, il fait un peu peur, quand même. Il a l’air très sec.»

Mais qui est cet homme qui arpente les pistes luxembourgeoises depuis plus d’une décennie? Le natif de Cornimont, dans les Vosges, s’est d’abord illustré au décathlon. Retenu en équipe de France jeunes, il y côtoie notamment Romain Barras (NDLR : champion d’Europe, désormais directeur de la haute performance à la FFA) : «En cadets, j’étais devant lui, on se tirait la bourre en juniors. Et puis après, il est passé devant», rigole celui qui était en cours avec Julien Absalon, au lycée à Remiremont et en STAPS à Nancy.

Quand je suis arrivé en 2008, tout était assez amateur

Mais c’est à Longwy, où il part étudier auprès de sa compagne, que sa vie va vraiment basculer. Alors qu’il s’entraîne à Longwy et à Arlon, sous l’égide d’Alain Hoffelt – également actif au Luxembourg –, il commence à entraîner un peu au PHAR. Pris par le virus, il décide donc de passer son brevet d’état. Quand Alain Hoffelt cherche quelqu’un pour le remplacer au Luxembourg, il fait appel à lui. Le contact passe très bien avec l’ancien DTN, Frédéric Kimmlingen, qui lui propose de rester.

Il doit alors faire un choix : rester à Longwy, où il a une situation stable. Ou se lancer dans l’inconnu. Il choisit l’aventure : «À l’époque, la fédération, c’était Frédéric, notre secrétaire, Georges Klepper, qui était secrétaire général adjoint bénévole et c’est tout. Il y avait bien le COSL, mais ça n’avait rien à voir avec ce qu’on connaît maintenant. Tout était assez amateur.» On est alors en 2008.

Propulsé directement DTN adjoint, il entraîne au Sportlycee, dont il devient coordinateur pour la FLA. C’est là qu’il verra passer les Tiffany Tshilumba, Laurence Jones, Joe Seil et autre Victoria Rausch pour ne citer qu’eux. Quid de Patrizia van der Weken? «La première fois, elle devait être scolaire. Je me rappelle qu’en voyant son nom, je me demandais si j’avais le droit de la sélectionner. Je pensais qu’elle était belge. Plus tard, en minimes 2, je vois qu’elle a du potentiel. Je lui propose de rejoindre mon groupe d’entraînement. Mais elle refuse.»

La timide Ettelbruckoise n’est pas encore prête : «C’était trop tôt. Les autres étaient plus âgés. J’avais toutes mes copines dans mon groupe. En plus, pour moi, le français, c’était compliqué», confie-t-elle.

Accompagner les athlètes après le lycée

Il faudra attendre un an avant de la voir rejoindre son groupe. Elle progresse beaucoup. Est finaliste aux championnats d’Europe U18. Et au moment de choisir ce qu’elle ferait après le bac, elle décide d’aller à contre-courant. Et de rester. Avec Arnaud Starck : «C’était la première fois qu’une athlète décidait de rester. Mais il fallait tout mettre en place. Rien n’était prévu. C’était un défi pour elle comme pour moi. Je savais les erreurs qu’il fallait éviter. Et qu’il fallait être patient.»

Et c’est nourri de ses propres expériences, de ses rencontres avec des techniciens du monde entier, qu’il se lance dans l’aventure : «Je devais tout faire pour lui rendre la confiance qu’elle plaçait en moi.» Le tout en ayant plusieurs casquettes en même temps : «J’avais toujours mon poste de coordinateur au centre de formation, d’entraîneur à la Fédé, de DTN adjoint. Les débuts ont été compliqués. Victoria (Rausch) est arrivée la deuxième année et petit à petit, on a mis en place une structure pour permettre d’accompagner les athlètes de haut niveau après le lycée.»

Il y a tellement de choses à améliorer chez elle au niveau mécanique. La concernant, je ne m’interdis rien.

Visiblement, ça fonctionne bien puisqu’il a mené une de ses athlètes jusqu’au graal olympique : «Je lui avais dit que l’objectif, c’est de courir sous les 11« . Pour elle c’était un rêve, pour moi un objectif. On y est presque. Il est très important d’avoir des objectifs élevés.» Et d’ajouter, faisant référence aux championnats du monde indoor de cette fin de semaine : «Ça va se fêter avec une finale à Glasgow.» Quant à Paris? «On va essayer de faire quelque chose de bien. Je préfère dire qu’elle peut peut-être faire une finale aux JO plutôt que d’affirmer qu’elle n’en fera pas.» Car il y a encore moyen de faire mieux : «Il y a tellement de choses à améliorer chez elle au niveau mécanique. La concernant, je ne m’interdis rien.»

Au fil des ans, il a établi une relation de confiance avec son athlète. Qui va bien au-delà du seul rôle d’entraîneur : «Je suis entraîneur, coach, psychologue, je dois faire du management… Chaque athlète fonctionne différemment. Patrizia a besoin qu’on la rassure sur beaucoup de choses. J’ai été là quand elle avait besoin de conseils.»

Et sa protégée d’ajouter : «C’est une des personnes qui me connaît le mieux. C’est grâce à lui que je suis l’athlète et la personne que je suis maintenant. C’est mon entraîneur, mon coach. Un mentor. Un ami aussi. Sérieux quand il faut l’être. Mais avec qui on peut aussi rigoler. Parler de tout et de rien. Il veut ce qu’il y a de mieux pour moi.»

Le rêve d’un vrai centre d’entraînement

Pour continuer de la faire progresser, Arnaud Starck rêve que le Luxembourg se dote d’un outil comme Papendal, aux Pays-Bas. Un lieu où seraient rassemblés les meilleurs sportifs du pays. Qui les accueille. Les nourrisse. Les loge. En effet, Patrizia van der Weken, qui réside à Hosingen, doit plusieurs fois par semaine rester dormir à la Coque pour éviter de perdre du temps dans les transports. Résultat, elle doit prendre une chambre d’hôtel, se préparer à manger. Bref, pas les meilleures conditions pour une préparation optimale en vue d’une échéance olympique.

En attendant que les choses avancent dans le bon sens, Arnaud Starck et son athlète doivent faire avec. Lui, le travailleur de l’ombre, qui a malgré tout apprécié le fait d’être classé deuxième dans le choix de l’entraîneur de l’année : «C’est une petite fierté», reconnait-il.

En bref

Né à Remiremont, Arnaud Starck est âgé de 44 ans. Titulaire d’un DUT en GEA, d’un DEUG 1 en Staps et du brevet d’état, il a rejoint le Luxembourg en 2008 en tant que DTN adjoint et responsable du centre de formation de la FLA.  Entraîneur au Sportlycee, il est tour à tour entraîneur fédéral à la perche, à la hauteur, à la longueur, en sprint et aux haies et s’occupe également du suivi des athlètes élite. Il entraîne notamment Patrizia van der Weken et Victoria Rausch.

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