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[C’était mieux avant] Stefano Speck : «On m’a fait remonter la piste à pied !»


Stefano Speck a participé aux championnats du monde juniors à Maribor (2004), Bardonecchia (2005), Québec (2006), Altenmarkt (2007) et aux championnats du monde à Are en 2007 ainsi qu’aux EYOF aux Crosets en 2005. (Photo dr)

Alors que les championnats nationaux se tiennent ce week-end à Adelboden, Stefano Speck revient sur les grands moments d’une carrière stoppée net à cause d’un genou en vrac.

Le skieur le plus fort que vous ayez affronté?

Stefano Speck : Des skieurs qu’on retrouvait parfois sur le circuit FIS (NDLR : Fédération internationale de ski). Je dirais Jean-Baptiste Grange (NDLR : double champion du monde de slalom). On pouvait voir tous les skieurs de l’équipe de France de l’époque. Notamment Julien Lizeroux (NDLR : deuxième de la Coupe du monde de slalom), dont j’étais particulièrement fan. Un mec très sympa sur la piste comme en dehors. Et il a même un peu dragué ma mère. Il pensait s’adresser à une touriste quelconque, mais elle lui a répondu qu’elle savait qui il était, qu’elle connaissait son entraîneur. Ça l’a un peu calmé (il rit).

La plus grande star que vous ayez côtoyée?

Bode Miller (NDLR : l’Américain est double vainqueur de la Coupe du monde, champion olympique, quadruple champion du monde…). C’étaient mes débuts en FIS, j’étais jeune et inexpérimenté. Je suis monté dans une cabine et lui est venu dedans. Je n’ai pas osé lui dire bonjour.

Le skieur le plus sanguin?

À ses débuts, Henrik Kristoffersen était connu pour être un sale gosse. Il faut se mettre à sa place. Il met une seconde à tout le monde, mais pas de chance, il se retrouve face à un extraterrestre, Marcel Hirscher, qui lui met à son tour une seconde. On sait que quand il rate une porte, ses bâtons vont passer un sale quart d’heure.

Je n’ai pas osé dire bonjour à Bode Miller

Votre plus belle victoire?

C’était à Val Thorens, sur une course FIS en décembre 2006. Elle a un goût particulier. Tu pouvais te retrouver avec l’équipe de France qui débarquait pour squatter les cinq premières places. Dans ces conditions, tu sais que tu viens surtout pour faire des points. Ce jour-là, j’ai très bien skié et j’ai notamment battu Jean-Frédéric Chapuis. Avec le recul, je me dis qu’on skiait au même niveau. Et puis, il n’a jamais percé en équipe de France et s’est tourné vers le skicross et est devenu champion olympique. D’ailleurs, un de mes grands moments, c’est quand j’étais devant la télé pour regarder le triplé français à Sotchi (NDLR : en 2014) avec trois mecs que j’avais l’habitude d’affronter en courses FIS.

Votre plus gros regret?

Forcément, de ne pas avoir pu aller aux JO de Vancouver. C’était l’époque où j’étais blessé et où je ne pouvais pas physiquement remonter sur des skis. C’est dommage, car ça aurait pu me lancer pour les quatre années suivantes et me permettre d’aborder Sotchi avec des ambitions. Mais le corps en a décidé autrement.

Ses faits d’armes

Après avoir commencé le ski à 3 ans, Stefano Speck a fait un sport-études à Villard-de-Lans et s’est installé à Méribel puis Grenoble. Dès les poussins, il battait les benjamins et les cadets aux championnats du Luxembourg auxquels il participe à partir de l’âge de 8 ans et qu’il remporte un nombre incalculable de fois. Il participe à ses premières courses internationales à 14 ans (Trofeo Topolino à Folgarida, la Scara à Val d’Isère, la Kids Cup à Garmisch) et fait son entrée sur le circuit FIS à 15 ans. Il participera aux championnats du monde juniors à Maribor (2004), Bardonecchia (2005), Québec (2006), Altenmarkt (2007) et aux championnats du monde à Are en 2007 ainsi qu’aux EYOF aux Crosets en 2005.

Votre chute la plus sérieuse?

Quand j’étais tout petit, j’avais dix ans et j’ai pris la bosse d’un canon à neige. Je n’ai plus aucun souvenir. On m’a juste dit que j’avais volé très loin, très haut et que j’avais subi un traumatisme crânien. J’avais fini aux urgences. À l’entraînement, on se met beaucoup de belles boîtes et, à la fin de chaque saison, on est content de se dire que ce n’est pas grave. Mais la plus sérieuse, c’était en 2008 sur une course à Serre Chevalier. Je suis sur un appui un peu à cul et j’entends mon ligament croisé qui cède. Rupture des ligaments croisés avec écrasement du ménisque et du cartilage. C’était le 16 décembre 2008. Saison terminée. Je fais toute la rééducation.

À l’été, je recommence à skier sur les glaciers. Et au mois de novembre, après une rééducation qui ne s’est pas super bien passée, je me fais mal au genou et je dois me faire opérer pour retirer un fragment de cartilage dans le genou. Les JO sont huit semaines plus tard : soit je fais des injections et je cours avec le risque de me faire à nouveau mal, soit je sauvegarde le peu de genou qui me reste pour le futur. J’ai opté pour la seconde solution. Au grand soulagement de mes parents. J’ai même dû me faire à nouveau opérer après avoir arrêté pour retrouver un genou pas trop douloureux au quotidien.

Votre plus gros pétage de plombs?

À l’été 2007. Les coaches trouvaient que je n’étais pas assez énervé. Alors, ils ont dit qu’il fallait donner 110 % à chaque départ. Et histoire que je percute, tant qu’ils estimaient que ce n’était pas le cas, je devais remonter… à pied. Tu es sur un glacier, à plus de 2 000 m facilement, tu as l’impression de tout donner, mais ce n’est jamais assez. J’ai dû remonter au moins trois ou quatre fois. Le ton est monté. Mais j’ai réalisé que soit je faisais ce qu’ils disaient, soit j’allais passer la semaine à remonter à pied. Ils cherchaient juste à me faire progresser sportivement et mentalement. Et une fois que je l’ai compris, j’ai battu mon temps. Ils m’ont juste dit : « Alors, c’était si difficile? »… Ils avaient raison.

On en rigole aujourd’hui, mais qu’est-ce qu’on était bêtes

Votre plus grosse fête? 

En Nouvelle-Zélande à Queenstown, un endroit magnifique avec une super ambiance, beaucoup de sportifs acrobatiques et extrêmes. On était dans un bar où la toiture s’ouvrait, on a profité d’un ciel étoilé, mangé des petits burgers excellents. Là-bas, tout a un goût spécial. On est resté jusqu’au petit matin. C’était en 2007. Un an plus tard, toujours en Nouvelle-Zélande, c’était moins fun. Je me suis réveillé dans un appartement que je ne connaissais pas. On m’y avait amené et on m’avait laissé dormir là, le temps que je récupère. Ce n’est que plus tard, en Autriche, que j’ai appris que c’était l’équipe néo-zélandaise qui m’avait ramené.

Votre plus grosse bêtise?

En Australie. Chaque fois que la météo était contre nous et qu’on ne pouvait pas aller skier, on avait besoin de se défouler. Alors, on a eu la brillante idée de prendre des haches et d’aller abattre un arbre dans la forêt. On a pensé que ce serait marrant. On a fini par utiliser une masse et une hache et un éclat de métal a jailli et atterri entre le nez et l’œil d’un copain, qui a immédiatement pissé le sang. Il n’avait rien, mais c’était un miracle. On en rigole aujourd’hui, mais qu’est-ce qu’on était bêtes !

Aujourd’hui

Installé à Villeurbanne, Stefano Speck, désormais âgé de 34 ans, skie encore un peu pour son plaisir. Quand son emploi du temps le permet. Marié à Nola et papa d’un petit Levi – comme la station de ski en Finlande –, qui fêtera ses trois ans dans deux semaines, il occupe depuis peu le poste de responsable développement durable pour les régions Europe, Moyen-Orient et Afrique au sein du groupe Tetra Pak.

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