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Des députés luxembourgeois se mobilisent pour les Iraniens


Selon un décompte journalistique, 18 manifestants sont actuellement condamnés à mort en Iran. (photo AFP)

Vingt députés ont décidé de parrainer des manifestants condamnés à mort en Iran afin de médiatiser leur sort et tenter ainsi d’empêcher leur prochaine exécution.

Voilà quatre mois que l’Iran est en proie à des mouvements de contestation sans précédent, et le régime, qu’on espérait un instant prêt à lâcher du lest lorsqu’il a annoncé la dissolution de l’effrayante police des mœurs – ce qui s’est avéré être un leurre – n’en finit pas de serrer la vis. Les chiffres sont affolants : l’ONU estime qu’environ 14 000 personnes ont été arrêtées dans le cadre des manifestations qui secouent la République islamique depuis la mort en détention le 16 septembre dernier de Mahsa Amini, 22 ans, arrêtée pour un voile mal porté.

Parmi ces détenus, au moins 109 manifestants font face à des accusations passibles de la peine de mort, selon Iran Human Rights (IHR), basé à Oslo, qui estime aussi que la répression a fait jusqu’à ce jour au moins 476 morts. D’après un décompte journalistique, dix-huit manifestants ont été condamnés à la peine capitale, et quatre d’entre eux, âgés de 22 à 39 ans, ont déjà été officiellement exécutés : Mohsen Shekari, Majidreza Rahnavard, Mohammad Mehdi Karami et Mohammad Hosseini.

Des chiffres qui ne sont sans doute pas exhaustifs, comme le précise Yasmine Guebasi, de l’Association luxembourgeoise de défense des droits humains en Iran (ADHI), association récemment créée pour défendre les victimes de ces violations : «Entre les exécutions officielles et celles non officielles, c’est vraiment compliqué de savoir…».

Tollé international

Ces condamnations et ces exécutions sommaires suscitent un tollé international et ont poussé de nombreux parlementaires européens, à l’appel de collectifs de défense, à parrainer un condamné à mort afin de braquer les projecteurs sur les autorités iraniennes et tenter d’accentuer la pression sur le régime ultrarépressif d’Ali Khamenei, le guide suprême iranien.

Au Grand-Duché, vingt députés se sont engagés en ce sens. Nathalie Oberweis (déi Lénk) est de ceux-là, qui marraine Mahsa Mohammadi, une jeune étudiante en microbiologie, kidnappée par les autorités iraniennes et condamnée à la peine de mort pour avoir insulté le Prophète sur Twitter. «C’était une évidence de participer à cette action. Ces personnes sont dos au mur. C’est à tous les autres, ceux qui en ont les moyens et les outils, de s’engager pour eux», explique la députée.

Les artistes aussi se mobilisent

Afin de braquer davantage encore les projecteurs sur la situation en Iran, l’ADHI appelle également la sphère artistique luxembourgeoise à se mobiliser. Elle a lancé à ce dessein l’initiative «Un artiste, un condamné», visible sur Facebook et Instagram (@unartisteuncondamne»). Les artistes du pays sont invités à dédier une performance (monologue, chanson, création audiovisuelle) à une personne emprisonnée par le gouvernement iranien. À l’instar de l’actrice luxembourgeoise Eugénie Anselin, qui a récemment posté une vidéo dans laquelle elle dédie le poème Le Globe de Nazim Hikmet au jeune Arian Farzam Nia, 16 ans à peine et condamné à mort pour avoir manifesté.

Donner une voix à ceux qui n’en ont pas

La parlementaire reconnaît toutefois qu’il s’agit d’une action essentiellement «symbolique», dont l’impact reste «limité» : «On fait ce qu’on peut, sachant que nous avons très peu de moyens et que nous sommes limités au niveau de nos pouvoirs. Nous aimerions évidemment faire plus, c’est très frustrant.»

Grâce à ces parrainages, les parlementaires permettent surtout de médiatiser la situation. «Concrètement, nous avons fait des posts sur les réseaux sociaux, envoyé un mail à l’ambassade iranienne – resté malheureusement sans réponse – ainsi qu’au ministre des Affaires étrangères luxembourgeois», indique Nathalie Oberweis.

Parrainer un condamné à mort, c’est aussi «rappeler nos valeurs européennes aux autorités iraniennes : personne n’a le droit d’ôter la vie d’un être humain en raison de ses opinions et de ses croyances», insiste Ardavan Fatholahzadeh, de l’ADHI. «Il est de notre devoir moral de venir en aide aux personnes sans voix, et surtout innocentes, car l’oubli expose les condamnés à mort à leur exécution.»

Une mobilisation susceptible de faire bouger les lignes

Si la justice iranienne a ignoré la forte réprobation internationale en condamnant encore mardi à la peine capitale un homme pour son implication présumée dans les manifestations, la Cour suprême a aussi suspendu, mercredi, l’application de la peine de mort pour Mohammad Borghani, 19 ans, parrainé notamment par la députée déi gréng Jessie Thill. Une suspension accordée après que l’avocat du condamné «a déposé une demande de réexamen de la procédure judiciaire pour son client», le temps que «le résultat [de la demande] soit rendu par la Cour suprême», selon l’agence de presse iranienne Mizan Online.

La mobilisation et la coordination internationale, européennes notamment, sont susceptibles de faire bouger les lignes, les membres de l’ADHI en sont certains, car les institutions peuvent ensuite décider d’appliquer des mesures a minima stigmatisantes sur le plan politique. L’exclusion de l’Iran le 14 décembre de la Commission de la condition de la femme des Nations unies en est une.

Et le 19 janvier, au cours de la session plénière du Parlement européen, les députés devraient décider de la réponse européenne à apporter face aux exécutions en Iran. «Nous allons demander de faire rappeler les ambassadeurs européens d’Iran et de renvoyer vers l’Iran les ambassadeurs iraniens. Nous demanderons aussi que certains organes, tels que les gardiens de la révolution islamique (NDLR : organisation paramilitaire de la République islamique), soient classés comme groupes terroristes, comme devrait prochainement le faire le Royaume-Uni», fait savoir Ardavan Fatholahzadeh.

Députés luxembourgeois parrainant un condamné à mort en Iran

Semiray Ahmedova (déi gréng) – Simone Asselborn-Bintz (LSAP) – Gilles Baum (DP) – François Benoy (déi gréng) – Djuna Bernard (déi gréng) – Dan Biancalana (LSAP) – Myriam Cecchetti (déi Lénk) – Sven Clement (PPL) – Francine Closener (LSAP) – Stéphanie Empain (déi gréng) – Paul Galles (CSV) – Chantal Gary (déi gréng) – Marc Goergen (PPL) – Marc Hansen (DP) – Max Hengel (CSV) – Josée Lorsché (déi gréng) – Charles Margue (déi gréng) – Nathalie Oberweis (déi Lénk) – Jessie Thill (déi gréng) – Carlo Weber (LSAP)

Un commentaire

  1. ils devraient aussi parrainer 1 luxo dans le besoin! p ex sans abri, grand malade, chomeur….

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