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Avis de tempête sur le Conseil d’État


Derrière ses portes closes, le Conseil d’État essaye de travailler en toute sérénité, selon son président. Mais une sale affaire secoue l’institution.  (Photo : archives lq/hervé montaigu)

Un e-mail malheureux échangé entre le conseiller d’État Lucien Lux et son unique client, Flavio Becca, oblige l’institution à saisir le comité de déontologie. La Gauche veut tout réformer.

De sérieuses questions de conflits d’intérêts en tous genres se posent concernant le fonctionnement du Conseil d’État, secoué par un cas flagrant de népotisme.

À partir du moment où la rédaction de Reporter.lu disposait de l’e-mail envoyé par le conseiller d’État Lucien Lux à l’entrepreneur Flavio Becca, il devenait difficile pour la Haute Corporation de hausser une fois de plus les épaules. Alors que l’avis sur le projet de loi relatif au virage ambulatoire n’était pas encore adopté, Lucien Lux l’a envoyé quelques heures plus tôt à son seul et unique client, Flavio Becca, intéressé par l’ouverture de cabinets privés extra-hospitaliers.

Le monde politique s’est tu. Le président du Conseil d’État est aux abonnés absents, certains autres Sages balancent un no comment qui semble être le mot d’ordre au cœur de cette tempête. Les seuls à tenir la barre sont les têtes de liste de déi Lénk, Marc Baum et David Wagner, qui demandent la démission pure et simple de Lucien Lux et une réaction du parquet face à ce flagrant délit de corruption.

Selon nos confrères de RTL, la présidence du Conseil d’État a saisi le comité de déontologie, preuve que Lucien Lux s’est bien rendu coupable d’une faute disciplinaire suffisamment grave. Les excuses qu’il a présentées au président Christophe Schiltz, socialiste comme lui, ne suffisent pas. Conseiller depuis 2014, Lucien Lux ne pouvait ignorer ses «obligations de confidentialité, d’impartialité, d’exactitude et d’intégrité».

Ce comité de déontologie est composé de trois membres effectifs et de trois membres suppléants désignés par le Conseil d’État «en raison de leur expérience et de leur autorité morale en matière de déontologie professionnelle», selon la loi régissant la Haute Corporation. La présidente honoraire de la Cour supérieure de Justice, Marie-Paule Engel, l’administrateur général honoraire, Albert Hansen, et le président honoraire du Conseil d’État, Pierre Mores, membres de ce comité, devront rendre leur rapport au Bureau du Conseil d’État dans lequel figureront les résultats de l’enquête, une évaluation des faits et des recommandations.

Selon la gravité de la faute, Lucien Lux risque l’avertissement, la réprimande, l’exclusion temporaire des fonctions avec privation de l’indemnité pour une période de six mois au maximum ou la révocation, qui emporte la perte du titre. Quoi qu’il advienne, cette affaire va ternir l’image de sérénité que les Sages cherchent à tout prix à entretenir derrière les portes capitonnées de l’institution.

Aucune déclaration d’intérêts

Pour La Gauche qui dénonce depuis des années le manque de transparence et le risque de népotisme qui plane sur le Conseil d’État, cette affaire démontre «le pouvoir influent des intérêts économiques qui y tirent les fils».  Dans le cas de Lucien Lux, ses liens économiques avec Flavio Becca dont il dépend complètement financièrement, passent très mal avec le souhait du président Schiltz «d’éviter une politisation, une pression de l’extérieur sur les conseillers, pour qu’ils puissent travailler en tant que collège, en toute sérénité», comme il nous le déclarait en janvier dernier dans une interview.

Déi Lénk rappelle que les avis du Conseil d’État ont souvent trahi le poids que les propriétaires fonciers représentaient dans le processus. Le projet de loi sur les «contrats de construction» que les Sages ont «déchiré», aurait considérablement réduit le plein pouvoir des propriétaires fonciers, selon déi Lénk. «Par ce geste, le Conseil d’État a défendu les intérêts particuliers de gros promoteurs et spéculateurs de l’immobilier qu’avait déjà révélés au grand jour l’Observatoire de l’habitat», souligne le parti qui veut abolir le Conseil d’État dans sa forme actuelle en le remplaçant par «une instance représentative de la société civile qui porte conseil à la Chambre».

Le parti de gauche voulait obliger les membres du Conseil d’État de faire une déclaration d’intérêts. Mais leur résolution présentée à la Chambre, transférée à la conférence des présidents «prend la poussière dans un tiroir».

Cette fois, la Haute Corporation est sérieusement touchée.

3 plusieurs commentaires

  1. enfin de la transparence sur ces pratiques locales si répandues! pourvu que la sanction (s’il y a) soit exemplaire, cela ferait un peu bouger le système!…

  2. J’espère que cela va changer et servira d’exemple à d’autres, notamment au ministère de la santé.
    Le gouvernement, la chambre, suit les avis des experts de cette dernière sans demander à ceux-ci de signer une déclaration d’indépendance et d’absence de conflits d’intérêts.

  3. cityoyen honnête

    pas sages du tout, les « sages », vieux, démodés, lents, incompréhensibles, égoistes, malhonnêtes… … …à remplacer par citoyens avec mérites irréprochables

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