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Luxembourg : les cantines se mettent au vert


Le ministre de l’Éducation nationale, Claude Meisch, espère que la démarche de Restopolis inspirera d’autres acteurs. (Photo : Hervé Montaigu)

C’est une petite révolution qui s’amorce dans les cantines scolaires et universitaires : le service Restopolis propose depuis la rentrée davantage de plats végétariens et véganes pour une alimentation plus durable.

Nos habitudes alimentaires ont un impact non négligeable sur l’environnement et il est indispensable de les modifier si l’on veut réduire notre empreinte écologique. Afin d’aller dans cette direction, le ministère de l’Éducation nationale et son service de restauration scolaire et universitaire Restopolis viennent de mettre en place pour cette rentrée 2021/2022 un tout nouveau concept intitulé «Food4Future».

Celui-ci vise à accélérer la transition écologique de Restopolis via des lignes directrices très concrètes qui permettent de proposer aux élèves et aux enseignants fréquentant les cantines et cafétérias du groupe des menus équilibrés, composés d’aliments riches d’un point de vue nutritionnel, tout en soutenant des pratiques de production durables et en limitant le gaspillage.

Ainsi, Restopolis, qui sert en moyenne plus de 15 570 repas par jour dans ses cantines et près de 30 000 dans ses cafétérias, va augmenter graduellement le taux des produits locaux et bios de ses menus, et ce, jusqu’en 2025. «En cas d’indisponibilité d’un produit en version locale, ce dernier doit être originaire de la Grande Région», a rappelé le ministre de l’Éducation nationale, Claude Meisch, au cours de la présentation du projet. «Il s’agit de limiter au maximum le transport et éviter certains produits qui ne seront jamais durables, soit parce qu’ils viennent d’autres continents, soit parce que leur production intensive est trop coûteuse sur le plan environnemental.» Restopolis a ainsi décidé d’abandonner par exemple les avocats venant de pays lointains mais aussi les produits issus d’espèces menacées, comme le thon rouge.

Le chiffre : 14,5

La viande a un impact écologique considérable, tant sur le réchauffement climatique, que sur la déforestation ou la consommation d’eau. Les Nations unies estiment ainsi que l’élevage représente 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre, soit 7 milliards de tonnes de CO2 par an, plus que les États-Unis et la France réunis. Le bœuf et l’agneau sont les viandes dont la production est la plus émettrice de gaz à effet de serre, mais le porc et le poulet posent des problèmes en matière de pollution des eaux. Selon les derniers chiffres, en 2018, 327 millions de tonnes de viande ont été produites dans le monde. Très gourmande en eau, la production de viande, combinée à celle de produits laitiers, émet la moitié des gaz à effet de serre liés à l’alimentation, mais ces productions ne représentent à elles deux que 20 % des calories ingérées au niveau mondial.
(Source : Le Monde, Pourquoi la viande est-elle si nocive pour la planète?, Gary Dagorn)

Limiter les transports et favoriser les circuits courts étant au cœur du concept «Food4Future», le service de restauration du ministère veille donc à se fournir au maximum chez des producteurs locaux. «Nous travaillons actuellement avec les grossistes qui se chargent de contacter les petits producteurs pour développer une relation commerciale et nous sommes aussi accompagnés par des experts du ministère de l’Agriculture, qui connaissent très bien le terrain et peuvent nous guider dans le choix des producteurs et des produits», résume Monique Ludovicy, la directrice de Restopolis.

De la viande avec modération

La viande ayant un fort impact environnemental (voir chiffre), elle doit désormais être consommée «de manière durable et avec modération», a ajouté le ministre. De fait, si la viande et le poisson seront toujours proposés, Restopolis, qui offre une alternative végétarienne depuis plusieurs années, a augmenté son offre : il y a maintenant un deuxième plat végétarien mais aussi davantage d’entrées, snacks ou sandwichs végétariens. Le groupe travaille d’ailleurs avec une diététicienne pour s’assurer de fournir des menus équilibrés. Les chefs seront aussi progressivement formés à la cuisine végane.

Attention, qui dit plus de légumes, ne dit pas pour autant «soupe à la grimace»! «Un des slogans de Restopolis demeure «le plaisir de bien manger», insiste Monique Ludovicy. «Je suis convaincue qu’avec cette approche plus durable dans la production des repas, on peut également produire des repas qui feront plaisir et susciteront l’adhésion.»

«On peut concilier approche durable et plaisir», abonde le ministre Meisch, qui précise : «Il faut convaincre les clients : ce n’est pas une obligation de manger à la cantine scolaire, c’est donc indispensable pour Restopolis de proposer des repas au goût des élèves et des enseignants.»

Afin de répondre au mieux aux attentes, un dispositif de sondage et de retours a d’ailleurs été mis en place sur le site restopolis.lu. «Je suis très ouvert aux propositions, explique Claude Meisch, mais je crains que les fréquentations des cantines diminuent et que les jeunes se dirigent vers les kebabs du coin. C’est donc important d’avoir des retours pour voir où sont les limites et ce qu’il faut adapter. S’il y a des menus qui ne sont pas acceptés par exemple, il faudra les changer.» Des campagnes de sensibilisation seront en outre mises en place régulièrement pour inciter les convives à adapter leurs habitudes et non pas fuir les cantines.

Limiter le gaspillage

La limitation des déchets et du gaspillage alimentaire est elle aussi un aspect central du projet. Pour cela, Restopolis fait savoir qu’il encourage, entre autres, l’utilisation de produits réutilisables (comme les Ecobox ou les gourdes par exemple) et privilégie les emballages végétaux (voire pas d’emballage du tout lorsque c’est possible).

Le système de réservation mis en place il y a quelques années déjà permet quant à lui de savoir plus précisément le nombre de plats à confectionner, limitant d’autant le gaspillage. Les plats non vendus de la veille sont par ailleurs à nouveau servis (étiquetés AntiGaspi) et les plats de présentation ont pour leur part été abandonnés.

Ce sont des élèves eux-mêmes qui sont à la genèse de ce projet. Les manifestations en 2019 des jeunes de Friday for future ont interpellé le ministère de l’Éducation qui a alors décidé de les impliquer plus concrètement dans la réflexion d’une école plus durable. La question de la cantine s’est avérée être au centre des préoccupations.

Avec Food4Future, Restopolis pourrait, comme l’espère le ministre de l’Éducation nationale, servir ensuite de modèle. «Restopolis est le premier grand acteur national à aller dans cette direction. Il pourra sans aucun doute développer des bonnes pratiques et dispenser par la suite des conseils aux autres acteurs de la restauration, dans les maisons relais par exemple, afin de garantir l’objectif du gouvernement : que l’ensemble des cantines subventionnées par l’État soient en mesure de respecter tous ces objectifs durables à moyen terme.»

Tatiana Salvan

Les 6 objectifs

* Mise en œuvre du plan d’action national «Pan-Bio2025»
* Nouvelle offre de repas
* Achats en circuits courts
* Prévention des déchets
* Lutte contre le gaspillage alimentaire
* Sensibilisation à l’alimentation durable

Un projet pilote : le «Veggie Monday».

Après les vacances de la Toussaint et jusqu’au début des vacances de carnaval (soit du 8 novembre au 7 février), sera lancé un projet pilote nommé «Veggie Monday» (ou «lundi végé») dans les cantines de l’Athénée du Luxembourg, du lycée Aline-Mayrisch Luxembourg et du lycée Michel-Rodange Luxembourg.

Comme son nom l’indique, ce projet prévoit de proposer tous les lundis exclusivement des plats végétariens et véganes. Un projet qui, s’il s’avérait concluant, pourra être alors étendu sur demande à d’autres établissements.

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