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Le Liban souffre aussi de la guerre


Les engins qui n’ont pas explosé vont constituer un danger majeur pour la population pendant des décennies.

Déjà en proie à une crise économique majeure, le Liban, qui abrite 1,5 million de réfugiés syriens et au moins 480 000 réfugiés palestiniens, est aussi la cible de bombardements israéliens.

À la frontière israélo-libanaise, où les échanges de tirs sont quotidiens, l’armée israélienne a annoncé mardi de nouvelles frappes contre des positions du Hezbollah. Le «parti de Dieu», groupe paramilitaire islamiste chiite, pro-Iran et considéré comme «terroriste» par les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne, dit pour sa part viser des positions militaires israéliennes en soutien aux Palestiniens. Un conflit qui vient encore peser sur une population qui tente déjà de survivre dans un pays exsangue, en proie à une crise économique majeure et en pleine déliquescence.

Le Liban, qui abrite le plus grand nombre de réfugiés syriens (1,5 million), accueillait déjà en août – avant la guerre entre Israël et le Hamas déclenchée le 7 octobre donc – pas moins de 480 000 réfugiés palestiniens, du moins ceux enregistrés auprès de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient).

Les ONG sur place sont donc à pied d’œuvre pour aider la population locale, les réfugiés et les nombreux déplacés dans ce pays qui partage approximativement 80 kilomètres de frontière avec Israël. Parmi elles, Handicap international (HI), qui compte 82 employés au Liban et travaille avec des partenaires locaux. Eric Weerts, spécialiste en urgence et réadaptation chez Hl, était fin décembre en mission dans la région de Tyr (au sud), dans le cadre d’un projet de préparation à l’urgence, soutenu par le ministère luxembourgeois des Affaires étrangères, lequel a débloqué en fin d’année une enveloppe de 100 000 euros pour soutenir les activités de HI dans cette zone.

Éduquer aux risques des engins explosifs

Là-bas, Eric Weerts a notamment formé des kinésithérapeutes à faire face à un afflux de blessés, dont le système de santé n’est plus en mesure de s’occuper. «On estime qu’il y a environ 40 000 déplacés internes à la suite de la montée des tensions à la frontière sud. Les structures de santé dans cette région sont submergées», confirme-t-il. Une situation d’autant plus compliquée que dans le sud du Liban, plus rural, l’accès aux soins est à la base plus difficile qu’ailleurs dans le pays. Il faut donc déployer des solutions pour aider «ceux qui ne sont plus en mesure de se déplacer, ceux qui n’ont pas les moyens financiers de se soigner ou ceux qui, en tant que réfugiés, n’ont pas accès aux services libanais».

«Nous intervenons auprès de personnes qui ont dû être amputées, sachant qu’une amputation implique un suivi à vie : il faut par exemple remplacer régulièrement la prothèse, a fortiori s’il s’agit d’un enfant, qui va grandir. Nous nous occupons également des brûlés et des handicaps liés à des accidents journaliers, très graves, comme la paraplégie ou la tétraplégie. Dans ces cas-là, il s’agit aussi de soutenir la famille», détaille-t-il.

L’ONG et ses partenaires éduquent par ailleurs la population aux risques des engins explosifs. Dans un pays déjà contaminé par la guerre civile de 1975-2000 – durant laquelle de nombreuses mines antipersonnel ont été posées et continuent de menacer les civils – ces nouveaux échanges de roquettes constituent une menace supplémentaire et sur le très long terme pour les habitants. «Il faudra plusieurs décennies pour tout nettoyer. Dans certaines zones, c’est même trop dangereux pour l’instant. Nous parons au plus urgent : nous dépolluons des zones prioritaires, comme les alentours des écoles ou des installations publiques», explique Eric Weerts. «Une des solutions en attendant, c’est de cartographier les zones et d’apprendre à la population à reconnaître ces engins dont on sait qu’un certain nombre n’explose pas, et à les signaler.»

HI constitue en outre des stocks de matériel (fauteuils roulants, béquilles, etc.) que les hôpitaux et associations soutenus par l’ONG peuvent utiliser en cas de besoin. «Cela évite de devoir passer des commandes et d’être privé de matériel lorsqu’il n’y a pas d’accès humanitaire. Il est indispensable d’avoir du matériel en stock dans des zones stratégiques», fait savoir Eric Weerts.

HI toujours présent à Gaza

Handicap international continue d’intervenir dans la bande de Gaza, essentiellement dans le sud, «le personnel n’étant pas en sécurité dans le nord et le centre», explique Eric Weerts. L’ONG déplore d’ailleurs la mort d’une de ses collaboratrices, tuée mi-décembre dans une explosion avec ses quatre enfants. La centaine d’employés et de bénévoles sur place poursuit malgré tout ses efforts pour répondre en urgence aux besoins colossaux de la population, mais aussi l’éduquer aux dangers liés à la présence d’explosifs sur le territoire.

Quant au matériel, HI tente d’en faire entrer «tant bien que mal» dans la bande de Gaza, lorsque les routes sont ouvertes, ses stocks sur place ayant été épuisés «au bout de deux mois». Huit camions de distribution de HI ont ainsi pu pénétrer dans Gaza le 19 décembre, ce qui a permis, entre autres, d’acheminer 380 fauteuils roulants, 52 chaises de toilette roulantes, 250 béquilles et près de 13 000 kits médicaux.

Une chose est certaine : la guerre achevée, le travail de HI à Gaza sera titanesque. «On compte déjà 30 000 blessés. Nous allons augmenter progressivement le nombre de nos équipes et avons déjà lancé des recrutements pour remplacer le personnel, épuisé, dès que la situation sera stabilisée», annonce Eric Weerts.

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