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Youth & Work : des coachs guident les jeunes vers l’autonomie


Ariane Toepfer, Kristina Nincevic et leur équipe accompagnent actuellement 152 jeunes âgés de 23 ans en moyenne. (Photo : didier sylvestre)

Aux côtés des 16-29 ans qui galèrent sur le marché de l’emploi, les coachs Youth & Work déroulent une méthode innovante pour permettre aux jeunes de reprendre les rênes de leur vie.

Loin du cliché selon lequel, dans un pays proche du plein-emploi, un jeune qui veut vraiment trouver un travail peut facilement décrocher un job, les coachs de Youth and Work chaque jour au contact d’étudiants, de décrocheurs ou de diplômés témoignent d’une tout autre réalité.

«Certaines personnes ne voient que la surface, et pas au-delà», déplore Kristina Nincevic, l’une des trois gérantes de Youth & Work. «Un jeune qui peine à trouver un emploi est avant tout un jeune dans une situation complexe et souvent précaire», clarifie d’emblée cette ancienne cadre dans la finance, ajoutant que 65 % des bénéficiaires sont de nationalité luxembourgeoise, à rebours des idées reçues, là encore.

Des jeunes qui accumulent les difficultés

Ce que les coachs constatent sur le terrain, c’est une accumulation de difficultés : accès au logement, violences intrafamiliales, racisme, consommation de stupéfiants, traumatismes.

Des parcours compliqués, parfois marqués par la pauvreté. «Un quart des jeunes qui passent par chez nous n’ont aucun proche autour d’eux. Les moins de 26 ans, qui n’ont pas droit au RMG, se retrouvent sans ressource», détaille Ariane Toepfer, fondatrice et cogérante de Youth & Work.

Les coachs notent que le manque de confiance en eux des jeunes est très fort. (Photo : Didier Sylvestre)

Les employeurs «de plus en plus exigeants»

Et ces dernières années, le contexte n’aide pas. «Les employeurs sont de plus en plus exigeants. Beaucoup d’annonces demandent désormais trois à cinq années d’expérience», pointe la coach, selon laquelle l’impact de la crise sanitaire chez les jeunes a été largement sous-estimé.

«Au niveau de la formation, ils ont un savoir-faire inférieur par rapport aux autres, donc moins de possibilités de décrocher un emploi qualifié. Le manque de confiance en eux est très fort.»

«Près de la moitié n’ont aucune idée de ce qu’ils veulent faire»

Autre point noir, l’augmentation significative des jeunes en recherche d’orientation : «Près de la moitié des jeunes qui viennent chez nous aujourd’hui n’ont aucune idée de ce qu’ils veulent faire», note Ariane Toepfer, soulignant un manque de pratique et une incapacité à résoudre des problèmes.

«On observe un important isolement social, doublé d’une dépendance aux réseaux sociaux, et ils ne croient pas en leurs capacités.» La maîtrise insuffisante de la langue française s’ajoute également comme un obstacle sur le chemin de l’emploi, certains jeunes refusant de postuler à des offres pour cette raison.

Youth & Work a 18 antennes dans le pays. (Photo: Didier Sylvestre)

3 200 jeunes accompagnés depuis 2012

Autant de problématiques avec lesquelles les six coachs de Youth & Work doivent composer pour aider leurs protégés à sortir de l’ornière. Globalement, les 3 200 jeunes suivis depuis la création de la structure en 2012 présentent trois profils distincts :

  • des décrocheurs (60 % des effectifs),
  • des lycéens perdus dans la jungle des formations post-bac, sans avoir aucune idée de la filière à poursuivre,
  • et des diplômés du supérieur qui ne s’épanouissent pas au travail comme ils l’avaient imaginé et ressentent le besoin de faire le point.

Ce qu’on vise, c’est l’autonomie. Ils n’apprennent pas ça à l’école

Dès les premiers rendez-vous, le ton est donné. Pas question de s’apitoyer : «On n’est pas des assistantes sociales. Nous misons sur une approche responsabilisante, matérialisée par un contrat qu’ils s’engagent à respecter. Ils ont des droits, mais aussi des devoirs», explique Kristina Nincevic.

Youth & Work ne lâche pas, si bien que les bénéficiaires sont suivis et accompagnés jusqu’à ce qu’ils intègrent une formation ou décrochent un job. «Ce qu’on vise, c’est l’autonomie. Ils n’apprennent pas ça à l’école», glisse-t-elle.

81% des bénéficiaires sortent avec une solution pérenne

Bilan de compétences, test de personnalité, outil «Roue de la vie» développé en interne pour déterminer les priorités sur lesquelles se concentrer : l’équipe se plie en quatre pendant plusieurs mois pour remettre ces jeunes sur les rails. Et ça marche.

81% des jeunes coachés par Youth & Work finissent par signer un contrat de travail ou intègrent une école ou une formation de longue durée. Après un an, 83 % déclarent que leur qualité de vie a augmenté. Pari gagné.

«On leur propose du concret, on ne les juge pas»

«Ils apprécient qu’on les prenne enfin au sérieux, qu’on croie en leur valeur. On leur propose du concret, et on ne les juge pas», rapporte Ariane Toepfer, heureuse de voir chacun prendre finalement son envol.

Déjà 38 communes partenaires

Fondé en 2012 dans le canton de Redange, le projet Youth & Work s’est mué en société d’impact sociétal, indépendante de l’État, et dispose aujourd’hui de 18 antennes au Grand-Duché.

Elle offre gratuitement un accompagnement individuel et du conseil aux adolescents et jeunes adultes en recherche de formation ou d’emploi. Pour bénéficier de ce service d’une valeur de 3 000 euros, il suffit d’avoir entre 16 et 29 ans, de résider au Luxembourg, et de faire preuve de motivation! Youth & Work emploie six salariés et fonctionne grâce à des dons privés et des conventions conclues avec 38 communes.

youth-and-work.lu

Au volant de son minibus, Saskia apprécie le contact avec les passagers. (Photo : Didier Sylvestre)

Saskia, 29 ans : «J’ai trouvé mon emploi de rêve»

Le chemin de Saskia jusqu’à son premier emploi stable a été jalonné d’obstacles. Mais grâce à sa ténacité, cette jeune Française qui a grandi au Luxembourg profite aujourd’hui pleinement de sa vie.

À 20 ans, son diplôme d’éducatrice en poche, elle pense trouver du travail rapidement. Or, elle essuie des dizaines de refus. «C’était dur parce que j’avais hâte de démarrer dans la vie active.» Elle quitte alors le Grand-Duché pour la France à la suite d’une rencontre, mais les difficultés s’amoncèlent.

«J’ai enchaîné les petits boulots»

«Passer la frontière a compliqué mon parcours. Mon diplôme n’était pas reconnu, et je n’avais droit à aucune aide sociale. J’ai enchaîné les petits boulots, sans parvenir à me stabiliser.» Cinq ans plus tard, elle fait ses valises et retrouve sa chambre d’ado chez ses parents. Le moral à zéro.

«J’avais 26 ans, pas d’appartement, pas de boulot. M’inscrire à l’Adem était au-dessus de mes forces, ça n’avait servi à rien par le passé.» C’est son père qui lui parle alors de Youth & Work : «Le coaching a tout changé pour moi», affirme-t-elle.

Saskia participe à un projet chez Sales-Lentz : en groupe, des jeunes sont chargés de la promotion des produits touristiques du transporteur. «J’étais la cheffe photo. Je devais gérer mon équipe, un sacré challenge. J’ai repris confiance en moi et je me suis ouverte aux autres.»

«Je ne savais pas ce qui me convenait»

Après six semaines, trois personnes se voient proposer un job : Saskia en fait partie. «Ils cherchaient des conducteurs de minibus. Je me suis lancée!»

Un poste en CDI et à temps plein qui lui convient parfaitement depuis un an. Elle assure des missions de ramassage et transporte enfants, personnes handicapées, et voyageurs se rendant à l’aéroport. «Les gens me connaissent maintenant, certains me disent qu’ils sont contents quand c’est moi.»

«Youth & Work m’a sauvée. J’ai trouvé mon emploi de rêve, alors que je ne savais pas ce qui me convenait. Ils m’ont accompagnée, et j’ai décollé grâce au programme», résume la jeune femme, qui envisage de s’installer bientôt dans son propre nid.

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