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L’Europe dans le viseur des désinformateurs


Christian Gsodam. (photo SGCAB)

L’année 2024, ponctuée de nombreuses élections, dont les européennes en juin, sera une cible privilégiée pour la désinformation, générée en particulier par des pays étrangers hostiles au système démocratique.

Le fait de diffuser des informations fausses ou trompeuses a toujours existé dans les sociétés, mais le phénomène s’est considérablement accéléré et amplifié avec les nouvelles technologies et l’apparition des réseaux sociaux. En Europe, c’est au cours de la campagne en faveur du Brexit que le problème est devenu particulièrement visible.

«Il y avait déjà eu des incidents précédemment, mais c’est durant cette campagne que la désinformation et la manipulation de l’information par des forces étrangères sont devenues extrêmement actives. Leur but était d’influencer la société anglaise et de la pousser à voter contre le maintien du Royaume-Uni dans l’UE. Il est alors devenu très clair pour tous les États membres qu’ils allaient désormais devoir composer avec cette donnée», rappelle Christian Gsodam, conseiller principal en stratégie de communication au Service européen pour l’action extérieure (SEAE), le service diplomatique de l’UE.

Des puissances étrangères sont en effet régulièrement à l’origine de fake news. Des pays comme la Russie, la Chine, la Corée du Nord ou l’Iran sont ainsi notablement actifs dans la propagation de récits complètement faux ou destinés à détourner l’attention du public des réussites de l’Union européenne pour la rediriger vers ses manquements ou ses lenteurs. Le but ? Saper la crédibilité des institutions et du système démocratique et le pluralisme dans nos sociétés. «Il est évident que pour ces pays, être confrontés à une Europe forte, qui oppose une réponse commune, est plus difficile.

À l’inverse, il leur serait plus aisé d’agir si des gouvernements dans les États membres étaient plus proches de leur idéologie et de leur façon autocratique de procéder», pointe Christian Gsodam, qui relève par ailleurs : «Il est intéressant de noter qu’il n’y a pas un grand fossé entre ce que ces régimes disent publiquement et ce qu’ils font en matière de désinformation».

Accuser les politiciens européens qui soutiennent l’Ukraine de tirer des bénéfices personnels, insister sur la lenteur des processus de décision et des Parlements, répéter à outrance que la démocratie ne fonctionne plus et que la majorité de la population est contre l’establishment politique, accuser la société occidentale d’être décadente, diffuser largement les exemples qui illustrent les défaillances au détriment des succès sont quelques-uns des narratifs qui font foison sur les réseaux. Et pour les diffuser largement, de faux comptes (sur X ou Telegram par exemple) et des «usines à trolls» diffusent ces idées en rafales, des boîtes mails sont piratées et la stratégie du Doppelgänger (double maléfique) largement utilisée, qui consiste à imiter, de manière sophistiquée, le graphisme de grands organes de presse ou des institutions du pays ciblé.

Système d’alerte

Mais l’ingérence de ces pays, et en particulier de la Russie, ne se limite pas à la diffusion de fake news en ligne. Le financement de partis politiques et la corruption d’élus font partie de la boîte à outils de ces régimes pour mieux diffuser leur idéologie. Une méthode assumée par le Kremlin, qui, en vue des élections européennes, cherche à «faire élire des candidats prorusses» et à «renforcer le discours prorusse» au sein du Parlement. En février, dans un message publié sur Telegram, le vice-président du Conseil de sécurité de Russie, Dmitri Medvedev, a ainsi appelé à «soutenir de toutes les manières possibles», «ouvertement et secrètement», les partis «antisystème».

À l’approche de ces élections, la vigilance est donc particulièrement de mise. «La tâche est collective», insiste Christian Gsodam. «Les États et les autorités publiques bien sûr, mais aussi les régions, les communes, la société civile, les médias» doivent aider à combattre la désinformation. Quant à l’Europe, elle a mis en place un certain nombre de dispositifs qui reposent sur quatre piliers : améliorer les capacités des institutions à détecter les cas de désinformation, renforcer les réponses coordonnées, mobiliser le secteur privé et sensibiliser la population à cette problématique, avec notamment l’éducation aux médias.

Un système d’alerte rapide entre les Vingt-Sept a ainsi été développé, de même qu’un code de bonnes pratiques (non contraignant) contre la désinformation, adopté notamment par plus de 30 acteurs du numérique (Google, TikTok…). Le Digital Services Act et l’IA Act, qui sont eux contraignants, obligent les très grandes plateformes à, entre autres, surveiller le contenu et réagir efficacement et rapidement si celui-ci s’avère frauduleux, à valoriser la vérification des faits en laissant la possibilité d’effectuer des réclamations, ou encore à indiquer le contenu généré par l’intelligence artificielle.

«Il s’agit aussi de rappeler à la population tout ce que l’Europe a apporté de positif : l’itinérance en matière de téléphonie, l’accès pour toutes les entreprises à un très grand marché, la possibilité pour les étudiants d’étudier partout, la poursuite des criminels dans toute l’Union, la sécurité alimentaire…», ajoute Christian Gsodam, avant de conclure : «Le vote à venir ne doit pas être motivé par la peur. L’Europe est un continent fort avec une société démocratique forte».

Quelques conseils pour lutter contre la désinformation

Tout un chacun peut un jour ou l’autre avoir une part de responsabilité dans la propagation de fake news, parfois de manière totalement involontaire. Il faut donc se montrer vigilant face aux informations que nous recevons et faire preuve d’esprit critique. Christian Gsodam délivre trois réflexes à adopter :

> Varier les sources
«De temps en temps, il faut changer ses sources et ne pas uniquement utiliser internet et les réseaux sociaux. Il faut aussi se tourner vers la presse traditionnelle (presse écrite, radio, télévision), car sur internet, n’importe qui peut écrire ce que bon lui semble, tandis que les journalistes ont un code de conduite, travaillent en équipe et doivent recevoir un accord pour publier leurs articles.»

> Ne pas croire immédiatement ce que l’on voit
«Lorsque quelque chose semble trop beau pour être vrai, c’est rarement vrai! Parfois, des faits paraissent tellement scandaleux que nous devrions immédiatement prendre du recul et vérifier l’information. On peut rechercher sur Google le nom des personnes dont il est question, regarder s’il existe d’autres informations à ce sujet ailleurs, s’assurer que la source est fiable.»

> Utiliser les outils de vérification à disposition
«Il existe des outils pour authentifier des contenus vidéo et des images (NDLR : par exemple : la recherche d’image inversée, via Google ou TinEye; YouTube DataViewer d’Amnesty International pour les vidéos). Cela prend certes un peu plus de temps, mais on s’assure ainsi de ne pas être face à un canular.»

T. S.

4 plusieurs commentaires

  1. Pierre van de Berg

    je suis d’accord avec les 3 commentaires ci-dessus

  2. Charles Manson: Prison à perpétuité sans avoir assassiné personne. Vive les Etats Unis. Juste pour donner un exemple. Assange. Armes de destruction massive.

  3. Comme disent les jeunes, je suis mort de rire à la lecture de ce papier.
    Il n’y a pas pire propagande que celle générée papr les USA et leurs vassaux, c’est à dire les pays européens. Certes la Russie n’est pas un ange blanc en matière de propagande, mais ils n’arrivent pas à la cheville de leurs maîtres « made in Hollywood ».
    D’ailleurs quand les anti-Trump ont voulu propager le mythe d’une ingérence russe dans l’élection de Trump, il leur fallu bien , in fine, avouer que tout ceci n’avait jamais été que fake newws de a jusqu’à z.
    La paille et la poutre…..

  4. L Europe de jour en jour plus pitoyable.
    On nous barbe de sornettes sur la desinformation pour cacher les immondices accumulees par bruxelles…degoutant.

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