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La bataille du Bobësch n’est pas finie


En avril 2021, l’initiative citoyenne BIGS de Sanem, lors d’une action pour protéger le Bobësch. Le collectif Bobibleift est arrivé en renfort.  (Photo : Editpress/Julien Garroy)

Les activistes ont levé le camp, mais restent en veille. Leur premier soutien, l’initiative citoyenne de Sanem, est ravi du nouveau souffle qu’ils ont apporté à leur combat de 20 ans.

Il n’y a plus d’utilité publique dans le projet de contournement de Bascharage, tel que le gouvernement le prévoit. C’est ce qu’affirme la «Biergerinitiativ Gemeng Suessem», BIGS, l’initiative citoyenne de Sanem, qui milite pour la conservation du Bobësch, menacé par la réalisation d’une nouvelle route censée soulager le trafic qui transite actuellement par Bascharage.

Le projet de loi a été voté, mais sur la base de calculs erronés, comme le précise Patrizia Arendt, la secrétaire générale de BIGS.

Elle ne peut que se réjouir de la mobilisation des jeunes. Rassemblés dans le mouvement Bobibleift, ils occupent régulièrement le site du Bobësch, à Sanem, dans le cadre d’une action de résistance pacifique contre la destruction de la forêt centenaire, située dans une zone Natura 2000.

Favoriser la mobilité douce

Si BIGS estime que l’utilité publique n’est plus donnée, c’est parce qu’elle croit en des alternatives qui n’ont pas été étudiées. Pire encore, depuis le temps, elles auraient pu être mises en place.

Contrairement au mouvement Bobibleift, qui se focalise sur la préservation du Bobësch, l’initiative citoyenne BIGS milite depuis 20 ans contre les projets de construction de routes supplémentaires «qui ne font qu’engendrer du trafic, comme ce sera le cas pour le contournement de Bascharage», explique Patrizia Arendt.

La solution réside, selon le collectif citoyen, dans des aménagements qui favorisent la mobilité douce et les transports en commun, voire la réalisation d’un rond-point pour fluidifier le trafic, comme le prévoit le nouveau plan national de mobilité.

Des calculs faussés ?

Ce que ne digère pas l’association, ce sont les cachotteries du gouvernement qui entourent le projet. Il y a eu d’abord les calculs faussés, qui ont permis de décréter l’utilité publique. «Ce tracé, retenu en 2016, coupe une zone Natura 2000 et il faut donc remplir deux conditions pour traverser une zone protégée. La première est l’utilité publique et la seconde est l’absence d’alternative valable.»

L’utilité publique n’a pas fait l’ombre d’un doute pour les députés, qui ont voté la loi pour le contournement sur la base de relevés de dioxyde d’azote (NO2) effectués de manière sporadique dans l’avenue de Luxembourg à Bascharage.

«Seule compte une moyenne annuelle et les calculs ainsi réalisés ont démontré que nous étions bien en dessous du seuil de tolérance, qui est de 40 microgrammes de NO2 par m2. Personne n’a trouvé à redire à la Chambre des députés, ni le ministre François Bausch, ni la députée et cheffe de la fraction déi gréng, Josée Lorsché, ni le bourgmestre de Bascharage», s’insurge Patrizia Arendt. Une loi a été votée sur la base d’un mesurage à un instant T, mais qui arrangeait bien tout le monde, regrette la secrétaire générale de BIGS.

Au moment où ces trois politiques affirmaient que les taux de dioxyde d’azote avaient doublé, les mesurages n’étaient pas rendus publics. Ils l’ont été après le vote de la loi et, depuis, les seuils de tolérance n’ont jamais été franchis, à une exception près. «Ils ont utilisé de faux arguments pour faire voter cette loi », martèle Patrizia Arendt.

En attendant, François Bausch a déclaré que le contournement de Bascharage serait certainement modifié, mais à ce jour, il n’y a pas encore d’avant-projet détaillé relatif à cette nouvelle infrastructure.

Détails surprenants

En revanche, toute cette affaire fourmille de détails croustillants. Il y a plus d’un an, la BIGS a engagé une action en justice contre le projet de construction d’un passage à faune à la frontière entre Sanem et Käerjeng (Bascharage). «Pour réaliser ce passage, il fallait abaisser le CR110 de quatre mètres, ce qui nous a paru étrange, car le même abaissement était prévu pour le contournement de Bascharage», explique Patrizia Arendt.

Pour la BIGS, il était évident que ce projet faisait partie des travaux de contournement pour lequel plusieurs associations ont demandé un moratoire. Le ministère a eu beau nier, l’initiative citoyenne a introduit un recours contre ce projet devant le Tribunal administratif et l’affaire sera plaidée le 19 septembre. La BIGS dispose, en effet, de deux agréments du ministère de l’Environnement qui l’autorisent à représenter des citoyens devant les tribunaux.

Un autre détail surprenant précède l’histoire. En 2008, quand le site est classé zone Natura 2000, le Bobësch, qui représente tout de même une grande valeur écologique, n’est pas inclus dans les 275 hectares de la zone.

«Les quelques hectares oubliés se situent précisément sur le tracé du contournement. À l’époque, alors que nous avions protesté, ainsi que Claude Turmes en tant que député européen, le ministre Marco Schank avait promis de redresser la situation via un arrêté grand-ducal qui n’est jamais venu», poursuite Patrizia Arendt.

Aujourd’hui, le gouvernement veut compenser la perte du Bobësch en replantant des arbres ailleurs. «Ce n’est pas réaliste. On ne remplace pas une forêt de 150 ans comme ça. Nous avons visité une forêt plantée il y a 30 ans en guise de compensation lors de la construction de la collectrice du Sud et cela n’a rien à voir avec la biodiversité. Il n’y a ni faune ni flore parce qu’une forêt met du temps à s’installer», témoigne la secrétaire de la BIGS. Pour elle, les mesures de compensation ont échoué.

En attendant de voir où le recours contre le passage à faune va les mener, les membres de l’initiative citoyenne saluent l’action des jeunes anonymes du mouvement Bobibleift qui ont occupé la forêt.

«L’occupation est terminée, c’était pour prévenir. Mais les activistes reviendront dès que quelqu’un touchera aux arbres», promet Patrizia Arendt, ravie de ce soutien «qui donne un nouveau souffle» au combat que mène la BIGS depuis 20 ans maintenant.

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