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[Gardiens de la nature] À Gasperich, le Drosbach respire à nouveau


Les pluies de ces derniers mois sont un bel exercice pratique pour Carlo Mersch, qui peut constater que la renaturation du Drosbach permet de bien contenir toute cette eau. (Photo : erwan nonet)

Dans le nouveau parc de Gasperich, le Drosbach respire enfin. Ce ruisseau coule désormais à son aise, loin du fossé qui l’a longtemps contraint. Protection contre les crues, embellissement du paysage : il a dorénavant tout pour lui !

Le pendant naturel du très (trop) minéral quartier de la Cloche d’or est le vaste parc qui sépare les immeubles flambant neufs des petites maisons de Gasperich, un peu plus haut. D’une superficie de 16,6 ha, il est désormais le plus grand de la Ville de Luxembourg. Choisi par la commune, Carlo Mersch (Mersch Ingénieurs-Paysagistes) a commencé à travailler sur le projet en 2012, les travaux ont été lancés à l’été 2020 et, bien que le parc ait été inauguré au mois de juin, ils seront clôturés début 2024.

Au milieu de cette verdure composite, coule un ruisseau : le Drosbach. Avant, il était engoncé dans un fossé tiré au cordeau à travers champs. Lors des fortes pluies, il gonflait vite, car son bassin versant comprend beaucoup de sols artificialisés qui n’absorbent pas les précipitations. Il traverse la Cloche d’or, dont la population s’est accrue de 72,4 % entre 2015 et 2023 (on ne parle même pas des postes de travail), mais aussi la zone industrielle et commerciale du Grasbësch à Leudelange (de La Provençale jusqu’à Möbel Alvisse), non loin de sa source.

Renaturer le ruisseau était donc une nécessité pour prévenir les risques d’inondation. Une étude hydrologique a ainsi été menée par TR-Engineering pour modéliser l’impact des potentielles crues. Ce travail a démontré que, désormais, même lors d’un épisode centennal, il ne sortirait pas du parc.

L’idée a été de recréer des méandres, pour que le ruisseau puisse travailler à nouveau

La renaturation du Drosbach a été conçue par Carlo Mersch, avec la collaboration de Flavio Morabito et Mirko Volani, hydrologues à l’administration de la Gestion de l’eau. «L’idée a été de recréer des méandres, pour que le ruisseau puisse travailler à nouveau», explique l’ingénieur-paysagiste. Pour freiner le courant et protéger les berges d’une érosion trop brutale, des obstacles naturels ont été installés. Autour de ces gros troncs fixés dans son lit, l’eau bouillonne, signe que le plan fonctionne. Selon les évènements climatiques, les rives évolueront et pourront même, avec le temps, se déplacer.

Des rives presque sauvages

À peu près au milieu du parc, une île a été créée en creusant un bras secondaire. Non seulement l’espace est charmant l’été avec ses transats en bois, mais ce dédoublement est utile en ce moment, alors que les pluies s’accumulent. Même avec ces précipitations, le parc est très loin d’être inondé, tous les chemins sont parfaitement praticables, y compris les 550 mètres de passerelles sur pilotis qui permettent de se promener au-dessus du cours d’eau et des zones humides.
Au contraire des autres endroits du parc, les rives du Drosbach ne seront pratiquement pas entretenues. On voit d’ailleurs les prémices de la végétation pionnière. «Les premiers saules sont là et d’ici quelques années, ils dépasseront tous les arbres qui ont été plantés dans le parc», avance Carlo Mersch.

Ailleurs, on trouve du gazon taillé ras dans les espaces de jeu, des prairies à fleurs dont les semences locales ont été spécialement sélectionnées par la firme allemande Rieger-Hofmann, et même un verger qui a permis à la Ville de compenser des écopoints perdus sur d’autres projets.

Et puis, il y a cet étang fréquenté en ce moment par les canards qui slaloment entre les roseaux. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, son eau ne provient du Drosbach. «Malheureusement, il y a beaucoup de canalisations mixtes qui recueillent à la fois les eaux usées et les eaux de pluie, regrette Carlo Mersch. En cas de crue, les déversoirs emmèneraient ce flux dans le ruisseau qui rendrait l’étang impropre à son utilisation par le public. Mais puisque la nappe phréatique se situe très près de la surface, sous la couche de marnes de Strassen, nous avons creusé un puits de 8 m de profondeur pour le remplir. Et au cas où l’évaporation en été serait trop forte, nous avons également connecté l’étang avec le réseau qui récupère toutes les eaux de pluie qui tombe sur le Ban de Gasperich. »
Le Drosbach, lui, chemine à côté de ce plan d’eau de presque 7 000 m2, prêt à retrouver les canalisations qui le feront passer sous Howald. Il retrouvera la lumière du jour dans la forêt, jusqu’à Hesperange, où il embrassera l’Alzette sous le Holleschbierg. Son parcours de 846 mètres au cœur du nouveau parc est désormais une respiration pour lui, pour les habitants qui sont protégés des crues et pour les promeneurs qui profitent d’un cadre qui promet de s’embellir au fil des saisons.

 

Et ces arbres, alors?

Lors de l’inauguration du parc de Gasperich, l’année dernière, une polémique avait enflée. Il n’y aurait pas d’arbres, ou pas suffisamment, ou pas assez grands. «Les architectes ont de la chance : quand ils terminent un immeuble, on le voit tout de suite…, relève l’ingénieur-paysagiste Carlo Mersch, qui a dessiné et réalisé le parc, ainsi que toutes les plantations du Ban de Gasperich. Nous avons planté entre 400 et 500 arbres dans le parc et 900 dans tout le quartier, dont 90 % sont locaux (charmes, érables, frênes, hêtres…). Bien sûr, ils ne sont pas encore adultes, mais ils ont tout de même entre 10 et 12 ans. Les plus grands, que nous avons placé dans les aires de jeux pour faire de l’ombre au plus vite, ont un tronc de 35 cm de circonférence, ce qui n’est pas rien et déjà onéreux.»

Surtout, les chances de succès des plantations s’amenuisent avec l’âge des arbres. Une telle transplantation est difficile et il faut entre deux et trois ans après la mise en terre pour que la croissance reprenne. Le temps de la nature n’est simplement pas le même que celui du BTP…

Carte d’identité

Nom : Carlo Mersch
Âge : 61 ans
Poste : ingénieur-paysagiste, gérant de Mersch Ingénieurs-Paysagistes
Profil : ingénieur-paysagiste diplômé de l’Universität für Bodenkultur de Vienne (Autriche), un cursus qui mêle les connaissances techniques et biologiques, Carlo Mersch a fondé son entreprise en 1989, dès la fin de ses études. Il fait aujourd’hui partie du groupe LSC.

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