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Luc Frieden, l’expatrié


Le départ de Luc Frieden pour rejoindre la Deutsche Bank à Londres en 2014 a été vécu par le CSV comme un coup dur. (photo archives LQ)

Le retour en politique de Luc Frieden, qu’il a déclaré ne pas exclure, mardi, pourrait servir à d’autres plus qu’à lui-même. L’ancien ministre des Finances publie ce jeudi un livre intitulé Europe 5.0.

En déclarant au Wort vouloir «dans les années à venir jouer un rôle actif dans l’intérêt du pays», Luc Frieden a marqué l’actualité politique de ce début d’année. Sa nomination, en 2014, à la vice-présidence de la Deutsche Bank, à Londres, suivie, en automne, du départ de Jean-Claude Juncker, nouveau président de la Commission européenne, avait laissé orphelin le CSV de deux de ses représentants les plus emblématiques. Mais tandis que le départ de Juncker était prévisible, voire attendu impatiemment par certains, celui de Luc Frieden avait quelque peu surpris. Il l’avait motivé par son peu de goût pour le travail d’opposition, confié à Claude Wiseler.

«Au cas où le souhait de Luc Frieden de retourner en politique était avéré, il serait naturellement extrêmement bienvenu», nous a fait savoir, mercredi, le chef de fraction du CSV, qui se souvient de ne pas avoir été «content lorsque, à l’époque, Luc Frieden (lui) annonçait vouloir se retirer de la politique pour rejoindre le secteur privé» .

À la Deutsche Bank, comme le rappelait malicieusement l’ Observatoire des multinationales en octobre, Luc Frieden prodigue «ses conseils sur les réglementations européennes et internationales, qu’il a lui-même contribué à mettre en œuvre», illustrant par son exemple combien les frontières entre la politique et la finance sont brouillées. Son départ a en tout cas mis Claude Wiseler dans la position délicate de devoir incarner seul l’opposition parlementaire, épaulé par un antinomique président, Marc Spautz, et par rapport à des dossiers finalement assez folkloriques comme le référendum ou le voile intégral.

Frieden, opposé à la politique «théorique»

Les réflexions de Luc Frieden sont donc bien plus qu’un apport au débat sur l’avenir de l’Europe, auquel l’ancien ministre des Finances dit vouloir contribuer. Elles signalent à l’électorat du CSV qu’il pourra compter sur un retour prochain en politique. Après deux ans de coalition Bettel-Schneider au bilan mitigé, le retour de Londres de Luc Frieden a des allures de retour d’un gouvernement d’exil. Car pour beaucoup le CSV reste le vainqueur des élections de 2013. Dans cette optique, l’équipe parlementaire du CSV aura joué le rôle de voltigeur, n’omettant aucune occasion pour critiquer la coalition au pouvoir et préparer ainsi le terrain pour le retour de Luc Frieden, en lice désormais pour le plus haut poste au sein du gouvernement.

Reste que la façon dont l’ancien ministre a quitté la politique pour le privé pour revenir à présent à la case départ, donne à penser. Sur les ondes de RTL, réfutant tout soupçon de conflit d’intérêts, il vient de déclarer  : «Je pense que l’échange entre le secteur privé et la politique est extrêmement important afin d’apprendre de l’autre, réussir et comprendre comment fonctionne une entreprise. La politique sur un plan purement théorique ne fonctionne pas.»

Claude Wiseler ne peut se vanter d’une expérience similaire  : «J’ai fait pendant tout ce temps de l’opposition active» , se défend le chef de la fraction, que beaucoup verraient bien au ministère d’État. L’autre problème de Luc Frieden étant qu’il n’est guère populaire. Jugé compétent, on le trouve néanmoins distant, froid. Rien ne le défend donc a priori contre le soupçon de n’être qu’un simple technocrate.

C’est ce que voit d’ailleurs en lui le député David Wagner, de déi Lénk, qui n’hésite pas à qualifier de «culotté» le resurgissement de Luc Frieden, un homme dont il estimait que son siège de député à la Chambre «n’était pas digne de lui» et qui a préféré rejoindre une banque pour y troquer son «carnet d’adresses» contre un «salaire» élevé.

Le fait aussi que Luc Frieden ait choisi de légitimer son retour en politique par la voie d’un livre ne le rend pas nécessairement plus accessible. C’est peut-être là l’erreur d’appréciation de quelqu’un qui a vécu le référendum de 2015 depuis l’étranger.

Frédéric Braun

Un commentaire

  1. J’èspere sincèrement que les Luxembourgeois ne vont pas commetre la mauvaise erreure de lui redonner son poste de ministre aux prochaines élections; comme ministre des finances il a été nul, il ne savait guère argumenter et contrebattre face aux nombreuses attaques lancés par la presse française en 2012-2013. Il a quitté le partis politique du CSV lorsque tout allait mal, donc je suis tout à fait d’accord avec les pensées de David Wagner. Frieden incarne bel et bien le technocrate, froid et distant.