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Maupal, du street art au Vatican


Maupal est l’un des artistes les plus connus d’Italie, devenu célèbre il y a dix ans après une caricature du pape François. Au point qu’aujourd’hui, c’est le Vatican qui loue ses services pour faire passer ses messages. Rencontre.

Dix ans après son graffiti du pape François en superhéros devenu viral, l’artiste italien Maupal s’est progressivement imposé comme le graphiste officieux du Vatican, qui met désormais à profit son coup de crayon pour s’adresser aux fidèles. «Oui, j’ai créé une forme d’empathie avec le pape François !», confie ainsi le dessinateur, de son vrai nom Mauro Pallotta, dans les locaux de sa société de communication à Rome. Pourtant, la trajectoire de cet artiste satirique et pinçant était loin d’être toute tracée, et encore moins destinée à promouvoir l’Église : il y a encore quelques années, son œuvre se voulait en effet résolument antisystème, à l’image d’un cardinal demandant une religieuse en mariage.

Aujourd’hui, il dit avoir «un pied au Vatican», au point que le dicastère publie cette année plusieurs de ses dessins – au rythme d’un par semaine – inspirés d’un message du jésuite argentin pour le Carême 2024, la période précédant Pâques. «Tout a été compliqué jusqu’à l’âge de 42 ans», rembobine le diplômé de l’Académie des Beaux-Arts de Rome, qui travaillait comme plongeur dans un restaurant pour arrondir les fins de mois. Jusqu’à un soir de janvier 2014, où il décide, sur un coup de tête et sans autorisation, de coller, sur un mur à seulement quelques pas du Vatican, un graffiti représentant le pape en superhéros.

On y voit l’homme en soutane blanche, lunettes sur le nez, bras tendu façon Superman, mallette en cuir noire dans l’autre main avec l’inscription «Valeurs» d’où dépasse une écharpe du San Lorenzo, son club de football de cœur à Buenos Aires. «J’ai voulu le représenter d’abord comme une personne simple et humble. Mais en même temps, il est également pape, donc un superhéros totalement atypique !», se souvient Maupal.

Bien qu’aussitôt effacée, l’œuvre – baptisée Superpope – a «un peu changé» sa vie : ce qui ne devait être au final qu’un «clin d’œil humoristique» devient un buzz planétaire. «Je ne m’y attendais vraiment pas. Je n’avais jamais pratiqué le street art», concède-t-il. Depuis, Maupal a représenté l’homme en blanc sur une vingtaine d’œuvres et sous toutes les coutures : jouant au morpion perché sur un escabeau avec le symbole de la paix, tenant une bouée de sauvetage ou encore portant le globe terrestre sur son dos courbé.

Lors de notre dernier échange, il m’a dit : « Mais pourquoi me dessines-tu toujours aussi bedonnant? »

«Même si c’est un personnage très important, j’ai compris que si je le représentais dans notre quotidien, je le ramenais à ce qu’il est réellement (…) Par le traitement graphique, je le rapproche des gens», explique-t-il en insistant sur sa «simplicité». Au fil des années, ses dessins ont été exposés dans des galeries aux quatre coins du globe, de Londres à Miami, et même reproduits sur des t-shirts. Il avoue avoir rencontré trois fois son modèle. «Lors de notre dernier échange, il y a un an, il m’a dit : « Mais pourquoi me dessines-tu toujours aussi bedonnant? »», plaisante-t-il.

Aujourd’hui, le quinquagénaire profite de sa reconnaissance internationale pour animer des ateliers dans des écoles, des prisons ou encore des résidences pour personnes âgées. Ses thèmes de prédilection rejoignent la ligne du pape François  (Jorge Mario Bergoglio de son vrai nom) : la justice sociale, les violences contre les femmes ou encore la tragédie des migrants. «Quand un sujet m’indigne, j’essaye de le mettre sous le feu des projecteurs», assure celui qui aime se définir comme «un catholique pas exemplaire».

En effet, d’éducation catholique mais non pratiquant, sa collaboration inattendue avec le Saint-Siège l’a amené à «changer de regard» sur le Vatican. «Je ne serais pas étonné si le street art devenait partie intégrante des médias du Vatican parce qu’ils ont compris qu’il s’agit du genre artistique le plus contemporain de tous», dit-il. En véhiculant les valeurs humanistes par le langage de l’art, il souhaite ainsi «abattre les barrières» et rendre accessible à tous le message papal. On le sait bien : les voies du Seigneur sont impénétrables…

Un commentaire

  1. Ce pape nous fait tous les jours regretter Jean Paul II, un homme d’une stature infiniment supérieure.