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Tripartite : un accord au minimum


Le trio gouvernemental formé par Xavier Bettel (au c.), Lex Delles (à g.) et Dan Kersch (à d.) a été le seul à s’exprimer, hier, à la sortie de la tripartite, organisée au château de Senningen.  (Photo : Julien Garroy)

Les divergences de vues ont dominé l’échange de lundi entre gouvernement, syndicats et patronat. Avec la prolongation des aides covid, le plus petit dénominateur commun a été retenu.

Le camp syndical a milité pendant près d’un an et demi pour obtenir une nouvelle réunion de la tripartite nationale. Pouvoir d’achat, imposition et lutte contre les inégalités sociales sont les dossiers qui ont été qualifiés de prioritaires. En fin de compte, la déception a visiblement régné auprès de l’OGBL, du LCGB et de la CGFP. Ils ont décrété le silence après la réunion avec le gouvernement et le patronat et comptent réagir «dans les jours à venir», comme nous l’a confirmé Nora Back, la présidente de l’OGBL.

«Il faudra chiffrer les revendications»

Le Premier ministre n’a pas caché les divergences d’opinions, notamment en ce qui concerne les fonds débloqués pour éviter que le fossé social ne continue de se creuser. «On n’a pas réussi à s’accorder sur la teneur des chiffres. Il a donc été compliqué d’engager la discussion sur ce point», déplore Xavier Bettel. Le ministre des Finances, Pierre Gramegna, va développer davantage le point de vue du gouvernement, demain, dans le cadre des débats à la Chambre sur le budget de l’État 2022. «Il va mettre l’accent sur le pouvoir d’achat», annonce le Premier ministre.

Les partenaires sociaux ont soumis un «catalogue de revendications comptant 40 ou 50 points» sur la table des négociations, dressée lundi après-midi au château de Senningen. «Cela a concerné le logement, les bourses d’études, les hôpitaux, la santé et bien d’autres choses encore. Il faudra chiffrer ces revendications. La liste sera soumise aux ministres de tutelle et des réunions bipartites sont à prévoir», annonce Xavier Bettel, tout en précisant qu’«une partie des revendications sera difficilement réalisable. Mais le gouvernement ne se referme pas à la discussion».

En attendant, un accord au minimum a pu être trouvé lundi. La décision majeure concerne la prolongation de deux mois du chômage partiel et des aides covid pour les secteurs les plus durement impactés par la crise du covid. «Les deux mécanismes sont étroitement liés. Ce qui compte est d’offrir la prévisibilité nécessaire aux entreprises concernées», souligne Lex Delles, le ministre des Classes moyennes.

Pas touche à l’index

Un second engagement de taille concerne l’indexation des salaires et pensions. «Jusqu’à la fin de la législature en cours, ce gouvernement ne va en rien toucher à ce mécanisme», promet le Premier ministre, faisant allusion à une tentative du camp patronal d’obtenir des concessions. «Des divergences de vues existent, mais l’indexation reste un instrument unique pour compenser la hausse des prix», vient ajouter le ministre du Travail, Dan Kersch. Une revendication pour sortir les produits énergétiques du panier de calcul pour le déclenchement de l’index a été rejetée.

Le prochain bilan doit être tiré «avant les vacances d’été 2022», à l’occasion d’une nouvelle tripartite nationale.

David Marques

Chômage partiel, aides covid, salaire minimum : les mesures décidées en bref

CHÔMAGE PARTIEL Les secteurs économiques les plus durement touchés par la crise sanitaire voient leur droit au chômage partiel élargi de deux mois. La nouvelle date butoir est fixée à fin février.

SALAIRE MINIMUM Le mécanisme introduit dès le début de la crise du covid, au printemps 2020, est confirmé. Les personnes placées en chômage partiel sont assurées de toucher au moins le salaire social minimum (SSM). L’État prend en charge 80 % du revenu. Ce montant ne peut pas être inférieur au SSM.

AIDES L’aide à la relance et l’aide aux coûts non couverts sont également prolongées pour deux mois supplémentaires. La liste des secteurs éligibles reste à peaufiner. L’Horeca va certainement continuer à figurer parmi les bénéficiaires de ces aides non remboursables. S’y ajouteront les sociétés actives dans l’événementiel, les exploitants de taxis, les centres de formation et a priori aussi les imprimeries.

TRAVAILLEURS IMMIGRÉS Afin de rendre plus attrayant le Luxembourg pour les travailleurs hautement spécialisés venant de l’étranger, le gouvernement a décidé de faciliter l’arrivée du partenaire de vie de la personne en question. En clair, l’octroi du permis de travail pour le conjoint sera facilité.

DEMANDEURS D’ASILE Les demandeurs de protection internationale vont également avoir un accès facilité au marché du travail. En cas d’embauche potentielle, il ne sera plus nécessaire d’analyse préalable par l’Adem.

Du lourd pour Backes et Engel

Les futurs ministres des Finances et du Travail vont avoir des chantiers de taille à négocier d’ici octobre 2023.

La tripartite d’hier a été la dernière pour Pierre Gramegna et Dan Kersch. Les ministres des Finances et du Travail vont céder courant janvier le flambeau à Yuriko Backes et Georges Engel. L’héritage que les deux futurs membres du gouvernement auront à gérer s’annonce lourd. En effet, des adaptations pour rendre le système fiscal plus équitable et une réforme plus approfondie du droit du travail figurent encore à l’ordre du jour.

Comme énoncé dès hier dans notre Interview du lundi, le Premier ministre, Xavier Bettel, estime que la marge financière pour réaliser la grande réforme fiscale, promise en début de législature, n’est pas présente. Il n’exclut cependant pas de façon «catégorique» de revoir certains aspects de l’imposition des ménages. «Il faut voir ce qui pourra être fait. Le cas échéant, Yuriko Backes sera certainement disposée à trouver les compromis nécessaires», met en perspective le chef du gouvernement.

Le futur ministre du Travail Georges Engel sera également amené à mener à bien des réformes qui n’ont pas pu être achevées par Dan Kersch. Le camp syndical continue ainsi d’insister sur une révision du droit du travail. Au menu figurent les réglementations concernant le plan de maintien dans l’emploi, le plan social, les faillites ou encore les licenciements.

Trop d’emplois non occupés

«Il faut admettre que les discussions annoncées en juillet 2020 n’ont pas avancé. J’avais soumis une proposition en ce qui concerne le plan de maintien dans l’emploi et le plan social, mais cette dernière a été rejetée aussitôt par les partenaires sociaux. Il nous faut donc recommencer à zéro», avance le ministre du Travail sortant, qui suggère à son successeur d’adopter une «autre approche» dans ce dossier.

La situation s’est, par contre, détendue sur le front du chômage. De quelque 20 000 demandeurs d’emploi en juillet 2020, on est repassé à 15 500 personnes qui sont à la recherche d’un travail. «Nous restons toutefois confrontés au même problème structurel. On compte 15 000 demandeurs d’emploi alors que 11 000 postes sont à pourvoir. Or les qualifications nécessaires ne sont pas présentes. Il nous faut encore davantage miser pour offrir les formations nécessaires aux chômeurs», termine Dan Kersch.

D. M.

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