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Migrants : la crise de conscience


L'Europe veut accueillir et aider tant les «cerveaux» africains que les réfugiés, insiste Matthias Ruete. (Photo : François Aussems)

L’Europe est-elle assez solidaire avec les réfugiés? Débat lundi à Luxembourg, avec Matthias Ruete, de la direction de la Migration à la Commission européenne.

Les discussions ont vite tourné autour de l’Afrique où la crise migratoire reflète les errements, mais aussi les progrès de la politique européenne.

Quotas de réfugiés

Les quotas de réfugiés dans les pays de l’UE sont une source inépuisable de débats. Par exemple, «l’Allemagne, qui a un chômage bas et une démographie basse, est plus dépendante de la migration que la France, qui a un chômage fort et une démographie forte!», fait remarquer un membre du public. Qui demande donc si les critères que sont la démographie et le taux de chômage ont été pris en compte pour définir ces quotas.

«Très franchement, non», répond Matthias Ruete, directeur de la direction générale de la Migration et des Affaires intérieures de la Commission européenne. «Car lors des premières discussions pour fixer les quotas, tous les États membres ont essayé de diminuer ces quotas en manipulant justement ces deux critères! Donc on a préféré faire simple, on a pris, à parts égales, la population et le PNB (produit national brut), et je peux vous dire que désormais, même s’il y a encore certaines voix discordantes, la majorité est contente de ces deux critères.»

Hospitalité sélective?

Un homme lève le doigt : «Il y a environ 100 millions d’Africains qui sont des immigrants économiques, donc qui rêvent d’améliorer leur situation. Or si j’ai bien compris, vous avez dit que l’Europe accepte seulement des immigrants avec un certain bagage intellectuel. Je trouve ça inhumain.»

Une accusation que Matthias Ruete n’accepte pas : «Non, là, vous ne m’avez vraiment pas compris. Nous avons aussi un grand rôle à jouer dans la protection de ceux qui sont dans le besoin. Par exemple, il y a deux semaines, la Commission européenne a proposé la réinstallation en UE de 50 000 personnes issues de pays tiers et ayant un vrai besoin de protection.» Donc l’Europe travaille sur tous les volets, la migration des personnes hautement qualifiées comme pour celle des travailleurs saisonniers qui retourneront dans leur pays, insiste-t-il. «En ce moment, ceux qui sont le plus vulnérable meurent ou n’arrivent pas à l’intérieur de l’UE, tandis que ceux qui sont plus forts y arrivent. Nous, on veut renverser ça et prendre les plus vulnérables.»

L’interventionnisme européen en Afrique

«Je pense que la crise migratoire a créé une politique européenne de développement en Afrique. Avant, cette politique était française, britannique, portugaise, etc., et chacun avait sa vision très limitée. Aujourd’hui, c’est évident, il faut une politique européenne de développement de l’Afrique, et une politique plus visionnaire», plaide Matthias Ruete.

«Je me réjouis d’apprendre que l’Afrique est bien à l’agenda de l’UE, sourit Marine Lefebvre de l’ONG SOS Faim, mais dans la réalité, les mesures de contrôle des frontières en Afrique prises par l’Europe entravent des migrations qui sont civilisationnelles dans la région saharienne, notamment au Niger.»

«Je suis conscient du fait que nous avons, avec le Niger, essayé d’empêcher des mouvements vers la Libye», admet Matthias Ruete. «C’est une chose qu’il fallait faire car les gens qui arrivaient en Libye avaient des illusions sur le marché du travail dans ce pays. Résultat, ils se retrouvaient dans des conditions affreuses. Mais il est vrai qu’on va devoir mettre en place des politiques de réinstallation de ces migrants avec le Niger.»

Un autre à critiquer cet interventionnisme européen est Serge Kollwelter (ancien président de l’ASTI). «Ce qui pousse des personnes en Afrique à partir c’est la situation économique. Or l’UE joue un rôle important là-dedans, notamment par le biais de ses accords économiques qui font des désastres, notamment au niveau agricole. Par ailleurs, ça me choque que les moyens européens en matière de coopération au développement soient de plus en plus déviés vers la régulation et la répression de la migration. Enfin, vous avez évoqué le fait de créer des canaux légaux pour des Africains qualifiés. Est-ce une façon de contribuer au développement de l’Afrique si on lui soutire ses cerveaux?»

S’il ne se sent pas forcément qualifié pour répondre à toutes ces critiques, Matthias Ruete précise néanmoins, pour la question de la fuite des cerveaux, qu’«on essaie de mettre en place une migration circulaire, donc de créer et faciliter des conditions de retour». L’idée, poursuit-il, est de proposer des formations d’avenir à des migrants africains pour qu’ils puissent revenir en Afrique avec cette qualification.  «Car je le vois depuis des années, généralement, il y a très peu de migrants qui ne veulent pas rentrer chez eux si les conditions sont favorables.»

Romain Van Dyck

Un commentaire

  1. On ne résoudra pas la crise des migrants sans aider les pays africains à stopper leur démographie galopante. L’Afrique ne comptait que 250 millions d’habitants en 1950… elle en a aujourd’hui 1,2 milliards… et l’ONU en prévoit 4,5 milliards en 2100, soit une multiplication par 18 en 150 ans ! Du jamais vu dans l’histoire de l’humanité.

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