Accueil | Dossiers | Les agents municipaux pourront verbaliser les incivilités

Les agents municipaux pourront verbaliser les incivilités


L'extension des compétences des agents municipaux a été présentée lundi par les ministres de l'Intérieur et de la Justice. (photo archives LQ)

Les agents municipaux verront leurs compétences s’étendre. Ils pourront prochainement procéder à la constatation d’infractions pénales mineures, qu’on peut ranger dans le cadre des incivilités.

Les Pecherten pourront verbaliser sur la base d’un catalogue de 24 infractions, allant de l’acte d’uriner sur la voie publique à l’utilisation de sa tondeuse à gazon en dehors des heures prévues par le conseil communal.

C’est avec un grand soulagement que le ministre de l’Intérieur, Dan Kersch, a présenté, hier, le projet de loi. Dans les cartons depuis longtemps, le projet de conférer davantage de pouvoirs aux agents municipaux avait néanmoins échoué en 2008, en raison d’un avis défavorable du Conseil d’État. Repris et retravaillé par le gouvernement actuel, le voilà sur le point d’aboutir, enfin. Concrètement, le texte prévoit des sanctions administratives communales dans le cas où seraient commises des infractions établies par la loi et adoptées facultativement par les communes dans leur règlement général de police.

« Pourquoi ce projet de loi? Afin de garantir que les règlements généraux de police des communes soient respectés et afin de montrer à ceux qui se foutent royalement de ceux-ci qu’ils pourront dorénavant être sanctionnés », a indiqué Dan Kersch. Les amendes administratives infligées iront de 25 à 250 euros (dont il faudra s’acquitter immédiatement), si la commune où a lieu l’infraction a adopté l’infraction en question.

Les agents devront suivre une formation

Car le choix des infractions, au sein du catalogue en comprenant un total de 24, reste à la discrétion des communes. En clair, si le fait d’uriner sur un mur à Wiltz constitue une infraction, cela pourrait ne pas forcément être le cas dans l’une des 104 autres communes du pays.

Le ministre a ensuite martelé que le projet de loi ne consistait aucunement à mettre sur pied «une deuxième police» ou une police parallèle, mais une assistance «complémentaire» aux forces de l’ordre – les agents municipaux ne seront d’ailleurs pas armés.

Puis Dan Kersch a spécifié les conditions que devront remplir les agents municipaux pour pouvoir prétendre constater une infraction pénale, une compétence qui appartenait jusqu’ici aux policiers, qui restent les garants de la force publique, et aux gardes champêtres. En effet, les agents municipaux devront avoir suivi une formation.

« L’agent municipal devient agent de police judiciaire à condition d’avoir passé l’examen de promotion de sa carrière et de répondre aux conditions de formation spéciale », a précisé le ministre de l’Intérieur. Par ailleurs, les agents municipaux qui répondent aux conditions de formation légales (agents dans les transports publics y compris) pourront effectuer des contrôles d’identité, mais pas de vérification d’identité.

Si le contrevenant ne s’acquitte pas de son amende, il incombera à un «fonctionnaire sanctionnateur» de le poursuivre devant le Tribunal administratif, qui sera d’ailleurs expressément renforcé à cet effet, a informé le ministre de la Justice, Félix Braz : « Le contrevenant dispose d’un recours en réformation, ce qui augmentera considérablement le travail du tribunal administratif. De ce fait, nous allons créer trois postes de juges et une nouvelle chambre au sein du tribunal administratif, qui en aura désormais quatre. Cela étant, cette quatrième chambre ne sera pas exclusivement dédiée aux recours faits contre l’une des 24 infractions contenues dans le catalogue. »

Claude Damiani

Un aperçu des infractions

Parmi les 24 infractions contenues dans le catalogue, citons :

›Le non-dégagement des trottoirs en cas de neige ou de verglas.

›Le fait de ne pas indiquer par un signe bien visible des travaux présentant un danger.

›Le non-taillage des arbres, arbustes ou plantes gênant la circulation.

›Le fait d’allumer un feu sur la voie publique.

›Le non-ramassage des excréments de son chien sur la voie publique.

›L’usage de tondeuses à gazon, de scies et de tout autre appareil bruyant en dehors des horaires à déterminer par le conseil communal.

›Le fait d’uriner ou de déféquer (!) sur la voie publique.

«Nous sommes demandeurs!»

Le secrétaire général de la Fédération générale de la fonction communale (FGFC), Marco Thomé, salue l’évolution.

Après une vingtaine d’années de tractations, la FGFC se félicite de l’extension prévue des compétences des agents municipaux. « Beaucoup de nos suggestions ont été intégrées dans le projet de loi (NDLR  : portant sur la réforme de la police grand-ducale). Dans ce sens, je dirais que le ministre Kersch a avancé de manière transparente, puisque nous revendiquions une extension des compétences des agents municipaux depuis l’ère Halsdorf (NDLR  : ancien ministre de l’Intérieur)», se réjouit Marco Thomé ( photo ), le secrétaire général de la Fédération générale de la fonction communale (FGFC). « Les agents municipaux ne sont autorisés, jusqu’à présent, à sanctionner qu’au niveau du stationnement (…). Mais il n’y a jamais eu de texte légal leur conférant des prérogatives les autorisant à poursuivre des incivilités », souligne encore Marco Thomé.

«Pas de seconde police grand-ducale!»

Avant de préciser que la FGFC est « demandeuse depuis longtemps ». Puis Marco Thomé de « déplorer » le fait que le Syvicol « ne se soit jamais prononcé pour cette redéfinition des compétences ». Car, selon Marco Thomé, les bourgmestres et les collèges échevinaux ont perdu toute une série de prérogatives à la suite de la réforme de la police, le pouvoir local ayant perdu sa mainmise sur les «officiers de police judiciaire».

« Il y a toujours eu cette problématique au niveau communal selon laquelle la police était appelée mais ne se déplaçait pas, soit en invoquant un manque de personnel soit en expliquant qu’elle ne se déplaçait pas pour les petites « choses » relatives à la réglementation sur les chiens, au stationnement sauvage près des écoles, aux infractions liées au non-respect des feux rouges de circulation. »

Cela étant, Marco Thomé est catégorique  : les agents municipaux ne sont pas voués à devenir une sorte de seconde police grand-ducale. Car le problème persistant, selon lui, se situe « au niveau de la poursuite des règlements communaux, qui n’est pas garantie par la police nationale », souligne-t-il.

C.  D.

« Sur la bonne voie, mais… »

Le président de l’Association des agents municipaux (ASAM, association professionnelle de la FGFC qui regroupe les agents municipaux, des communes, syndicats de communes et établissement publics placés sous la surveillance d’une commune), Nicolas Thill, indique « être, dans les grandes lignes, sur la même position que le ministre Dan Kersch ».

Ceci dit, Nicolas Thill, qui travaille pour la commune de Hesperange, attend « la présentation officielle du texte par le ministre avant de pouvoir se prononcer en détail ». De plus, il attend certaines améliorations, qui n’ont pas encore été discutées, au niveau du contrôle des stationnements et de la circulation automobile, par exemple. « Nous souhaiterions une petite ouverture concernant les prérogatives des agents municipaux relative à la sécurité aux abords des écoles. Ils font un travail qui est déjà presque de type « policier », les policiers grand-ducaux n’ayant pas assez de fonctionnaires pour faire ce travail de proximité », revendique Nicolas Thill.

Une autre doléance de l’ASAM concerne les zones piétonnes. « Les agents municipaux ont la compétence de verbaliser les voitures s’y trouvant stationnées, mais ils n’ont aucune compétence en vue d’arrêter et de contrôler les automobilistes qui circulent dans une zone piétonne en dehors des heures où cela est autorisé. » En conclusion, Nicolas Thill estime que le projet de loi est « sur la bonne voie », mais il préfère attendre le texte officiel pour pouvoir définitivement prendre position.

C. D.

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.