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Intégration : l’OCDE pointe «les lacunes du système d’information luxembourgeois»


Le festival des Migrations témoigne chaque année de la diversité culturelle du pays et de sa population cosmopolite. La loi sur l’intégration est en pleine révision et l’étude de l’OCDE vient compléter les conclusions des différents acteurs consultés. (archives Tania Feller)

L’OCDE a remis son étude dans le cadre de la révision de la politique d’intégration. Elle souligne que de meilleures statistiques et des évaluations des politiques publiques aideraient à répondre à l’ensemble des défis identifiés.

Le député qui demandait à la ministre de la Famille et de l’Intégration dans une question parlementaire quelles étaient «les principales réflexions et thématiques prioritaires pour la révision de la loi sur l’intégration» de l’étude de l’OCDE n’aura pas droit à un résumé, mais au lien qui le dirige vers l’étude mise en ligne.

L’ancien directeur d’études de l’institut de sondage TNS Ilres qui porte un vif intérêt à la question du vivre ensemble aura donc déjà lu les principales observations des experts de l’OCDE et leurs recommandations.

Comme c’est malheureusement trop souvent le cas au Luxembourg, les experts de l’OCDE se sont heurtés à leur tour à un manque de statistiques et d’évaluations, ce qui les amène à se demander si «le système statistique est suffisant pour accompagner efficacement la politique d’intégration du Luxembourg et répondre à l’ensemble des défis identifiés».

Chaque ministère dispose de ses propres sources qui ne sont pas partagées, car il n’existe pas au Luxembourg de cadre juridique qui autorise à le faire de manière sécurisée. Les données d’immigration sur les réfugiés et demandeurs d’asile sont détenues par le ministère des Affaires étrangères et ne peuvent pas être diffusées au ministère de la Famille par exemple, qui est par conséquent «dans l’incapacité de cibler l’ensemble des potentiels bénéficiaires du PIA (parcours d’intégration accompagné) et du CAI (contrat d’accueil et d’intégration)», relèvent les auteurs de l’étude.

Il existe cependant la plateforme de microdonnées de l’Inspection générale de la sécurité sociale (IGSS), qui fusionne les données d’emploi, de chômage et de protection sociale, qui pourrait capter l’ensemble des données administratives clés sur l’intégration des immigrés et de leurs enfants, comme le suggèrent les auteurs de l’étude.

«Cependant, ces données ne combleront pas toutes les lacunes du système d’information luxembourgeois», ajoutent-ils en insistant sur la nécessité «de développer des enquêtes complémentaires» sur des sujets peu documentés, comme les compétences linguistiques et la pratique des langues des immigrés, la discrimination liée aux origines, l’accès au logement ou encore le vivre-ensemble.

Le parcours d’intégration accompagné en attente

Autre lacune : les études d’évaluation des politiques publiques sont très peu développées. Les experts de l’OCDE soulignent leur importance afin d’adapter au mieux la politique d’intégration aux besoins des immigrés, au niveau tant national que communal. Encore une fois, la population cible «n’est pas toujours bien identifiée». L’étude indique que les statistiques publiées «sont trop souvent axées sur la nationalité et négligent la question des immigrés (personnes nées à l’étranger) et des binationaux».

Le Luxembourg est le seul pays de l’OCDE à disposer de deux programmes d’introduction distincts pour répondre aux besoins de sa population immigrée. «Le contrat d’accueil et d’intégration est un des dispositifs les plus inclusifs en comparaison internationale», notent les experts. Mais ce programme peine à attirer des bénéficiaires et il ne parvient pas à cibler les immigrés les plus vulnérables, notamment les immigrés de pays tiers peu qualifiés. Seulement 1 664 étrangers l’ont signé en 2019, tandis que plus de 20 000 immigrés entrent chaque année au Luxembourg. Pour savoir ce qui cloche, il faudrait évaluer le dispositif.

Quant au parcours d’intégration accompagné (PIA), organisé en trois étapes sensées correspondre au parcours du nouvel arrivant, il n’a jamais pu être pleinement mis en place, observent encore les auteurs de l’étude.

La ministre Corinne Cahen est suffisamment armée pour passer à la prochaine étape dans le cadre de la révision de la loi, c’est-à-dire la rédaction d’un avant-projet de loi. Cette étude vient compléter les discussions menées en janvier dernier à la Chambre des députés lors du débat de consultation sur l’intégration et l’ensemble des éléments réunis lors de la large consultation publique des douze derniers mois avec tous les acteurs de l’intégration.

Geneviève Montaigu

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