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Un dealer accusé de s’être marié en blanc pour revenir sur le droit chemin


Le prévenu est soupçonné d’avoir contracté un mariage blanc en échange d’un titre de séjour.

Les affaires de stupéfiants se suivent et se ressemblent : un dealer est pris en flagrant délit et jugé. Celle qui a occupé jeudi après-midi la 9e chambre correctionnelle sortait du lot.

Accusé de vendre de la blanche, il aurait contracté un mariage de la même couleur. Le procès avait donc deux volets. Un petit plus qui l’a rendu spécial. Claudia a épousé Anayo pour, dit-elle, le remettre dans le droit chemin.

Le demandeur d’asile nigérian de 40 ans a déjà été condamné en mai 2023 pour avoir vendu des stupéfiants en 2022. Le 6 septembre dernier, il est arrêté par la police alors qu’il vient de vendre une boule d’héroïne à un toxicomane. Il avale les 25 autres en sa possession.

«Mon père était malade. J’avais besoin d’argent pour payer ses soins, mais il est décédé une semaine après mon placement en détention provisoire», explique le prévenu. «C’est la première fois que je vendais de la drogue depuis ma précédente condamnation.» Rien n’est moins sûr.

Un toxicomane, dont le contact a été trouvé dans son smartphone, a affirmé lui avoir acheté de la cocaïne à trois reprises et l’épouse du prévenu ne peut pas confirmer que son beau-père est bien mort. «Quelle quantité de drogue auriez-vous dû vendre pour aider votre père?», lui demande la présidente de la 9ᵉ chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. «J’avais besoin de 800 euros. J’avais déjà les 345 euros que me donnait l’État français et qui ont été trouvés sur moi», répond Ayano.

«Pour les besoins de la cause»

Le représentant du ministère public ne croit pas en la maladie du père. «L’histoire a été inventée pour les besoins de la cause.» Pas plus qu’il ne croit à son mariage d’amour avec Claudia. «Je l’ai épousée parce que je l’aime. Elle est ma femme», assure le prévenu.

«Sur votre téléphone, on a retrouvé toute une ribambelle de messages envoyés à d’autres femmes pour les rencontrer. Difficile de croire que vous ayez épousé la vôtre par amour», note la juge. «N’était-ce pas pour obtenir des papiers?» Ayano le reconnaît à demi-mot. Son épouse est plus formelle.

Leur histoire a commencé par une rencontre dans le tram, relate-t-elle. Très vite, il lui aurait demandé de l’épouser. «Au début, je ne voulais pas, mais comme il avait besoin de papiers pour régulariser sa situation et pouvoir travailler, j’ai accepté pour qu’il ne soit plus obligé de vendre de la drogue.»

Pour preuve de la sincérité de leur amour et écarter la thèse du mariage blanc, Me Diassy avance qu’elle a soutenu son mari depuis sa première affaire de stupéfiants et qu’elle n’a cessé d’aller lui rendre visite en prison.

Pourquoi pas. Claudia a peut-être bon cœur. Reste que le prévenu a donné un certificat de résidence au bureau d’état civil de la commune de résidence de sa future épouse qui ne correspond pas à l’adresse donnée au juge d’instruction qui l’a entendu et que son identité était mal orthographiée. Deux faits qui lui valent d’être en plus accusé de faux et usage de faux. Anayo, Claudia et son avocat jurent qu’il a remis des documents valables et que l’officier de mairie a mal recopié son identité.

Quand au problème d’adresse, Me Diassy affirme que le prévenu a donné son adresse administrative au juge d’instruction. Adresse différente du lieu où il résidait. «L’adresse est celle d’un foyer pour demandeurs d’asile à Metz. Les gens n’y restent pas longtemps étant donné l’état du lieu. Ils y conservent leur adresse pour récupérer leurs papiers et vont vivre ailleurs. C’est le cas de mon client», explique l’avocat qui plaide la confusion de son client.

Mais le parquet lui coupe l’herbe sous le pied. «L’attestation de résidence renseigne l’adresse d’un demandeur d’asile qui a été débouté et qui a quitté le territoire français en 2013», précise le magistrat qui est convaincu que le prévenu est coupable des infractions à sa charge.

Il a requis une peine de 30 mois de prison à son encontre et s’est rapporté à prudence du tribunal en ce qui concerne une éventuelle amende. «Il a donné un faux nom et une fausse adresse pour deux raisons : il craignait qu’on découvre que la France avait refusé sa demande de permis de séjour et que ses antécédents judiciaires soient découverts. Cela aurait compromis ses chances d’obtenir un permis de séjour luxembourgeois.»

Et de régulariser sa situation. Pour Me Diassy, «mon client n’avait pas l’intention de faire usage de faux». Il a demandé au tribunal de réduire le quantum de la peine.

Le prononcé est fixé au 16 mai.

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