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Meurtre d’Ana Lopes : «Personne ne peut prouver le contraire de ce que j’ai dit»


Ana Lopes enlevée à Bonnevoie avait été retrouvée morte aux abords de Roussy-le-Village en Lorraine. Durant près de trois heures, la chambre criminelle a entendu son ex-petit ami, vendredi. La suite mardi. (Photo : Fabienne Armborst)

En détention préventive depuis 2017, Marco B., l’ex-petit ami d’Ana Lopes, retrouvée morte à Roussy-le-Village, clame toujours son innocence. Sûr de lui, il s’est avancé vendredi matin à la barre de la chambre criminelle.

La nuit de la mort brutale d’Ana Lopes, son ex-petit ami et père de son fils, Marco B., prétend avoir été occupé à promener trois chiens avec sa mère. À entendre les membres de sa famille, c’était un véritable remue-ménage avec leurs compagnons à quatre pattes pour qu’ils ne fassent pas leurs besoins dans la maison. Entre le plus gros chien Rocky qui réveillait régulièrement les deux plus petits et le besoin de communiquer par SMS car Marco B. n’avait pas la clé de la maison pour rentrer, il y avait du mouvement… «Avec tout ce bazar, on se demande quand vous dormez?», lançait la présidente au prévenu, vendredi matin, au 12e jour du procès.

– «Personne ne peut prouver le contraire de ce que j’ai dit.»

Sûr de lui, Marco B. (32 ans) s’était avancé à la barre de la 13e chambre criminelle. Avec un gros classeur et un stylo qu’il a déposés devant lui. D’une voix relativement posée, lunettes sur le masque, il n’a pas démordu de sa position, qu’il avait fermement affichée à l’ouverture du procès début mars : la nuit du 15 au 16 janvier 2017, quand Ana a été enlevée vers 1 h à Bonnevoie, puis sa voiture incendiée aux abords de Roussy-le-Village, en Lorraine, il était à la maison. Et d’après lui, l’activité sur son portable ne permet pas de dire le contraire.

«De toute façon, je n’avais pas le téléphone avec moi»

«À 1 h 17, ma mère m’a appelé, c’était certainement pour que je baisse le volume de la télé. Mais de toute façon, je n’avais pas le téléphone avec moi.» Une phrase sur laquelle il embrayera aussitôt : «Sur la caméra de vidéosurveillance, on me voit passer devant le café Pepper’s à 22 h 48, ensuite j’ai regardé un film d’une durée de 123 minutes avec ma sœur, ça correspond à l’heure d’appel de ma mère.»

Grâce aux données de géolocalisation, on sait où se trouvait son portable cette nuit-là : à 300 mètres de son domicile, dans sa voiture qu’il avait garée à 22 h 51 précises. Jusqu’au petit matin à 6 h 21, le portable ne bougera pas. De longues heures sans son portable, ceci est plutôt contraire aux habitudes de Marco B. «Selon le dossier répressif, vous semblez y être très accroché quand on voit vos messages et votre activité internet, constate la présidente. Vous n’avez pas songé à le récupérer à 3 h du matin quand vous avez promené les chiens?»
– «Il faut penser à amener les clés de la voiture. J’y ai pensé seulement à 6 h quand je suis reparti promener le chien…» C’est la raison pour laquelle il n’aurait pas vu le SMS de sa mère de 3 h 07. Il lui avait répondu à 6 h 19.

Ce qui interpelle, c’est que justement ces deux messages ont disparu des deux portables. «Il y a plus de 11000 messages sur votre portable et qui remontent en partie jusqu’aux années 2014 et 2015. Et, bizarrement, les deux messages les plus récents ont disparu…» La chambre criminelle n’obtiendra pas plus d’explications.

Ana, «une fille cinq étoiles»

Quand Marco B. parle d’Ana, il parle d’une «fille cinq étoiles». C’est du moins ainsi qu’il explique pourquoi il ne l’a longtemps pas quittée pour de bon. Leur relation avait des hauts et des bas. Ana était «mêlée à un trafic de drogue». Ses amies étaient «des filles qui se résument à la drogue, les sorties et l’alcool». Rien de très positif. Mais il aurait toujours été amoureux d’elle, affirme le prévenu.

Il raconte aussi avoir à un moment régulièrement contrôlé si elle fumait toujours. «Vous êtes monté tous les jours au grenier pour constater qu’elle avait consommé de la drogue. Et de l’autre côté, vous dites qu’Ana vous a révélé les détails et les lieux de sa cache en France. Ce n’est pas un peu contradictoire?… Et pour quelle raison vous ménagiez-vous des preuves?», l’interrogera la présidente.

– «Pour la garde de l’enfant…»

La chambre criminelle a également confronté Marco B. aux contradictions dans son emploi du temps du 16 janvier. Lors de sa première audition à la police le 18 janvier, il avait en effet déclaré s’être rendu en Allemagne. Or les données de géolocalisation de son portable ont uniquement permis de retracer un déplacement en France, et plus exactement près de Kanfen, donc non loin du lieu du crime. «Votre audition, c’était deux jours après. En principe le mercredi, on arrive à se rappeler de ce qu’on a fait le lundi!»

«Je me suis trompé de jour, je ne suis pas parfait»

La réponse de Marco B. : «Je me suis trompé de jour tout simplement. Ce n’est pas inhumain. Je ne suis pas parfait.» Sauf qu’il y a un autre point qui ne colle pas non plus. Par la suite, il déclare avoir voulu récupérer un pot d’échappement en France, mais avoir rebroussé chemin quand son père l’a appelé. «D’après la téléphonie, votre père n’a pas pu vous appeler pour faire demi-tour», soulève la présidente. Car l’appel a eu lieu quand Marco B. venait tout juste de quitter le garage à Howald, donc lorsqu’il était encore bien loin de la frontière. «La raison pour laquelle je continue ma route après l’appel de mon père, je ne sais pas», finira par dire Marco B. à la barre.

– «Et pourquoi votre père tente-t-il ensuite de vous appeler à plusieurs reprises et pourquoi ne décrochez-vous pas?»

– «Je ne sais plus pourquoi…»

L’audition de Marco B. se poursuivra mardi matin.

Fabienne Armborst

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