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Côte d’Ivoire : « Ils tiraient sur tout le monde »


Des employés portent le corps d'une victime sur la plage de Grand-Bassam, aux portes d'Abidjan. (photo AFP)

Le corps d’un jeune homme, le visage déformé par un impact de balle, git sur la plage de Grand-Bassam. Il fait partie des 14 civils tués dimanche, ainsi que deux militaires ivoiriens, par des jihadistes qui ont semé la terreur dans la station balnéaire prisée des habitants d’Abidjan.

Autour de lui, des hommes en tenue blanche inspectent le corps pendant que des badauds prennent des photos avec leurs portables. « C’est un enfant », souligne l’un d’entre eux.

A quelques mètres du jeune homme, sous un « maquis », une des paillotes qui se succèdent le long de la plage, des médecins retournent le corps d’une femme en maillot de bain. Plus loin, un homme en chemise est étendu, les bras en croix. « C’est un des terroristes. Il a pris une balle perdue, tirée par ses amis », dit Virginie Napo, serveuse d’un bar voisin.

« Ils sont venu gâter notre pays », crie, méprisant, un témoin, alors que la Côte d’Ivoire avait été jusqu’ici épargnée par les attentats jihadistes. Deux autres corps sont à proximité.

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Militaires et policiers en armes parcourent les lieux en permanence et en mer, un zodiac de l’armée sillonne le rivage pour chercher d’éventuels corps.

A quelques centaines de mètres, des milliers de personnes attendent de l’autre côté du pont qui sépare la nouvelle ville du quartier « France », la vieille ville classée au patrimoine de l’Unesco. Ils applaudissent les forces de l’ordre qui ne cessent d’affluer sur des lieux.

« Au début on a cru que c’était des pétards de jeunes, puis on a compris que c’était des jihadistes. Ils ont commencé à tirer sur tout le monde », explique Gisèle Kouao, vendeuse sur la plage.

A l’Étoile du sud, visé par les assaillants, les serviettes des baigneurs sont abandonnées autour de la piscine de cet hôtel de luxe, fréquenté par une clientèle occidentale. Une balle s’est logée dans la vitre du réfrigérateur du bar. Par terre, une immense flaque de sang. Une personne « blanche ou libanaise », selon un employé, a été tuée après avoir tenté de se réfugier derrière le comptoir. Elle « a été tuée à bout portant », selon un policier. Le bilan aurait pu être encore plus lourd car les assaillants avaient aussi des grenades.

« On a pensé au Bataclan »

Abbas El-Roz, commercial d’origine libanaise, était à la piscine de l’hôtel au moment de l’attaque. « J’ai vu un des assaillant de loin, raconte-t-il. Il avait une Kalachnikov et une ceinture de grenades. Il cherchait des gens ». Il s’est alors réfugié dans sa chambre avec trois amis pour attendre les secours.

Carine Boa, une Belgo-Ivoirienne, était dans un « maquis » avec ses deux fils. « On nous a dit que c’était une dispute entre deux patrons de bar, puis que c’était plus grave. On s’est réfugiés dans une petite remise. On était une vingtaine », raconte cette enseignante au lycée international Jean Mermoz d’Abidjan, venue passer la journée à la plage.

« On avait très peur. On a pensé aux gens du Bataclan », dit-elle en référence à l’attaque jihadiste de la salle de concert à Paris le 13 novembre, qui a fait 90 morts.

« Je croyais que c’était notre dernière heure. On se dit toujours que ces choses ne peuvent pas arriver », souffle-t-elle.

Dans la vielle ville, protégée par les forces de l’ordre, Marie-Claire Yapi est en pleurs avec son jeune fils. Dans la panique, elle a été séparée de son bébé de neuf mois et de sa soeur. « On a vu un des hommes (celui tué sur la plage), raconte-t-elle. Il avait une Kalachnikov. Même touché, il avait encore envie de tuer. Un homme m’a dit +Ne restez pas là. C’est du sérieux. Ils tuent tout le monde+ ».

Devant elle, Koumena Kakou Bertin témoigne, en état de choc, le T-shirt maculé de sang. Les assaillants « arrosaient et criaient Allah Akbar » (Dieu est grand en arabe). L’un d’eux « achevait les gens à terre ».

Des dizaines de survivants en maillots de bain ou tout juste protégés par des sacs de plage sont escortés par les militaires. Les visages sont défaits, certains tremblent. Charlotte Yao, vendeuse, avoue: « On a eu peur, on a beaucoup pleuré ».

Le Quotidien / AFP

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