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[Vins de la Moselle] 2019, ça aurait pu être pire…


2019 ? Des vins qui seront équilibrés, sur la Moselle luxembourgeoise (Photo : Erwan Nonet).

La récolte 2019 n’est pas pléthorique mais, quand on regarde les statistiques, elle est toutefois loin d’être catastrophique. Voilà ce qui ressort des chiffres officiels qui viennent d’être donnés par l’Institut viti-vinicole.

Des quantités mesurées

Ce n’est pas une surprise et on en a suffisamment parlé : les gelées tardives et les brûlures dues à la canicule ont grevé une partie de la récolte. Pourtant, la Moselle s’attendait à pire. Fin août, l’Institut viti-vinicole s’attendait à récolter autour de 60 000 hectolitres mais, finalement, 76 047 hectolitres sont arrivés dans les cuves. Il s’agit certes de la plus petite vendange de ces dix dernières années, mais il faut savoir se satisfaire de ce que l’on a! D’autant que la générosité de 2018 avait été, elle, sans faille avec une production de 135 907 hectolitres. «Si l’on fait la moyenne des deux derniers millésimes, on retrouve la quantité d’une année normale», avait fait remarquer le directeur de l’Institut viti-vinicole, Roby Ley, la semaine passée, lors du pot pour la nouvelle année.

L’elbling et le rivaner à la peine

Les quantités brutes, c’est bien, mais il convient également de prendre en compte la valeur des raisins. Et là, les vignerons ont été plutôt vernis. En effet, les deux cépages qui ont le plus souffert sont l’elbling et le rivaner, les deux qui sont vendus aux prix les plus bas. Les pertes les plus sévères par rapport à une année normale concernent l’elbling dont le rendement moyen était de 55 hectolitres par hectare (au lieu de 107). Le rivaner suit avec 76 hectolitres par hectare (au lieu de 102). Pour être complet, notons que l’auxerrois a beaucoup souffert aussi avec un rendement moyen de 48 hectolitres par hectare (au lieu de 86).

Les cépages nobles s’en sortent bien

Contrairement aux cépages d’entrée de gamme, le haut du panier n’a pas trop à se plaindre. Certes les rendements sont en dessous de ceux d’une année normale (sauf pour le gewurztraminer), mais ils ne sont pas si loin du niveau de référence : 75 hectolitres par hectare pour le pinot blanc (au lieu de 89), 45 hl/ha pour le chardonnay (au lieu de 58), 62 hl/ha pour le pinot gris (au lieu de 71), 56 hl/ha pour le pinot noir (au lieu de 63), ce n’est pas si mal. Le riesling, avec 56 hl/ha (au lieu de 70) a néanmoins un peu plus souffert.
À l’heure actuelle, il est difficile d’expliquer les raisons de cette nette différence entre les cépages d’entrée de gamme et les autres. D’autant que si le rivaner est précoce, l’elbling ne l’est pas et il a pourtant beaucoup souffert. «Les meilleurs cépages sont sur les meilleurs terroirs, fait remarquer le chef du service Viticulture de l’Institut viti-vinicole, Serge Fischer. Il faut sans doute aller chercher l’explication de ce côté-là.»
Quelle qu’en soit la raison, c’est une aubaine pour les vignerons. Quitte à perdre des raisins, autant que ce soit ceux qui rapportent le moins alors que les meilleures bouteilles trouvent désormais plus facilement des amateurs.

Un bon équilibre sucre/acide

En 2018, les taux de sucre (en degrés Oechsle) étaient stratosphériques alors que les taux d’acidité étaient très bas. Cette année, l’ensemble est plus homogène et devrait offrir des vins équilibrés.
De manière générale, les taux de sucre de 2019 se situent entre la moyenne des dix dernières années et les extrêmes de 2018. Le chardonnay, le pinot gris, le pinot blanc, le pinot noir et le riesling se situent entre 83 et 90 Oechsle, alors que l’année dernière, ces valeurs tournaient autour de 90 et 100 Oechsle. Même scénario pour les taux d’acidité. En 2018, ils variaient entre 6,2 et 8,1 grammes par litre et en 2019, ces chiffres s’étagent entre 6,9 et 8,7 g/l.
«C’est bien, c’est qu’il faut pour faire de bons vins, assure Serge Fischer. En 2018, les taux de sucre étaient parfois trop élevés; 2019 a tout pour devenir un beau millésime.»

Vente et consommation en hausse

Sur l’exercice 2018/2019, 65 478 hectolitres de vins luxembourgeois ont été vendus au Grand-Duché. Un résultat supérieur à celui des quatre dernières années. Logiquement, cette hausse se ressent dans la consommation moyenne par habitant qui s’établit à 10,6 litres par an (10,3 l en 2017/2018 et 10,1 l en 2016/2017).
Autre motif de satisfaction pour les vignerons, bien que l’on boive toujours plus de vins blancs et de mousseux étrangers, la consommation par habitant de ces derniers est en baisse (12,7 l en 2018/2019 et 14,7 l 2017/2018).

Erwan Nonet

Grâce à 2018, les exportations repartent

export @erwan nonetLes petites récoltes des années 2016 (82 947 hectolitres) et 2017 (81 249 hectolitres) ont donné un sérieux coup de frein aux exportations puisque le marché national consomme une grande partie de la production (entre 60 000 et 65 000 hectolitres environ). Ainsi, en 2017/2018, seuls 30 115 hectolitres avaient passés la frontière. En 2018/2019, 32 673 hectolitres étaient exportés. Un chiffre qui augmentera certainement sur l’exercice suivant puisque les vins de 2018 seront davantage disponibles.
L’exportation reste toutefois un défi. Au XXe siècle, l’essentiel des vins vendus hors du Luxembourg était du rivaner qui filait en Belgique. Or la concurrence internationale fournit des vins toujours moins chers contre lesquels le Grand-Duché est désarmé, bien que le rivaner reste de très loin le cépage le plus exporté (13 142 hectolitres en 2018/2019).
Alors que l’export vers les marchés traditionnels (Belgique, Allemagne, Pays-Bas et France) baisse ou – au mieux – stagne, il est intéressant de constater que l’export vers les pays qui ne sont pas dans l’Union européenne augmente. Ces pays nouveaux, où l’on ne connaît pas encore vraiment la production luxembourgeoise sont intéressants car l’image de marque est à construire. «C’est ce qu’il se passe dans les Pays baltes, par exemple, souligne le contrôleur des vins Aender Mehlen. Ces nouveaux marchés permettent d’arriver avec les produits qui génèrent de la valeur ajoutée (NDLR : les crémants où les AOP avec lieux-dits). Parce que changer une image, comme celle qu’a les vins luxembourgeois en Belgique, est vraiment très compliqué…»

Attention, ce sont des statistiques

Il faut bien se garder de tirer des conclusions générales à partir de statistiques. Celles-ci ont le mérite de lisser un ensemble de données, mais en effaçant les disparités, elles offrent une lecture biaisée de la réalité. Ainsi, le bilan des vendanges 2019 est totalement différent d’un domaine à l’autre. Certains vignerons s’en sont sortis quasiment sans problème. Du côté d’Ahn, notamment, ils ont été plutôt vernis. Pour d’autres, le résultat frôle la catastrophe. Vers Wintrange ou Ehnen, notamment, plusieurs lieux-dits ont été complètement balayés par le gel. Pour les vignerons qui travaillaient ces coteaux-là et qui ont perdu parfois plus de 70 % de leur récolte, ces statistiques sont bien aigres…

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