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Promotion des vins luxembourgeois : la Moselle presse le pas


Si, effectivement, les trois groupements de vignerons s'entendent, ce serait une grande première. (photo archives LQ)

Enfin ! Après trois ans de travaux préparatoires, un nouvel outil est sur le point de se mettre en place pour mieux faire connaître les vins luxembourgeois.

Le vin luxembourgeois, c’est une évidence, souffre d’un déficit de notoriété. Ce n’est pas sa qualité qui est en question, mais son image. Ou plutôt son absence d’image. Car, au fond, qui le connaît ? Très peu de monde, finalement. Il y a de nombreuses raisons pour expliquer ce relatif anonymat.

La première est évidente : la taille du vignoble. À titre de comparaison, le vignoble alsacien, qui produit à peu près les mêmes cépages que le Grand-Duché, est plus de dix fois plus vaste. On a beau arguer du small is beautiful, il est compliqué de se faire remarquer lorsque l’on n’a pas les volumes pour pénétrer les marchés étrangers.

Le second problème a également été identifié depuis longtemps : la culture de la qualité est finalement assez récente. Du temps de l’union douanière allemande (jusqu’en 1919), le vin d’ici filait en Allemagne où on le transformait en Sekt bon marché. Lorsqu’il a fallu trouver de nouveaux débouchés, la Moselle a livré du rivaner de comptoir en Belgique. À l’époque, on ne parlait pas de riesling ou de pinot gris mais d’elbling et de rivaner et l’essentiel était de remplir les cuves à ras bord, sans trop regarder à ce que l’on y mettait. Mais si ce temps-là est révolu, on ne change pas les habitudes et les a priori en deux coups de cuillère à pot. D’ailleurs, la Belgique reste de très loin le premier marché à l’export (90% des vins qui passent la frontière y vont) et ce sont toujours plutôt les petits vins qui s’y rendent… les plus qualitatifs ont encore du mal à s’y faire une place, puisque pour les Belges un vin luxembourgeois est avant tout un vin bon marché.

Or ce modèle économique (grosse quantité et petit prix) ne peut pas tenir ici. Les coûts de production – et notamment le coût du travail – sont élevés et ils doivent inévitablement se retrouver dans la bouteille. Pour les producteurs, il n’y a pas d’autre salut que d’offrir des vins de qualité qui permette de réaliser la marge suffisante nécessaire à l’équilibre financier de l’entreprise.

Dix-sept projets prioritaires

Pour que le message passe haut et clair, il faut un vecteur fort… et la Moselle n’en a pas. La Commission de promotion des vins et crémants a été mise en suspens il y a trois ans et depuis, rien… ou presque. Durant ce laps de temps, le ministère de l’Agriculture a mandaté Ernst & Young pour concevoir l’outil qui permettra un maximum d’efficacité pour un coût minimal. C’est ce plan d’action qui a été présenté mercredi dernier.

Pour l’instant, tout reste à faire et il n’est question que de méthodologie de travail. Néanmoins, le cadre est fixé, il ne restera plus qu’à l’animer. «Tout devra être opérationnel pour 2018», a avancé le ministre Fernand Etgen. Le principal objectif sera de fédérer des producteurs qui ont traditionnellement parfois du mal à s’accorder. Il ne faut pas y voir là de la mauvaise volonté, mais plutôt le résultat de situations économiques différentes. Les moyens pour développer la vente de gros volumes comme en produisent Vinsmoselle ou Bernard-Massard, par exemple, sont tout à fait différents de ceux dont ont besoin les vignerons indépendants qui mettent sur le marché des petites séries de grands crus.

Pour impliquer l’ensemble de la profession, le ministère a fait signer une nouvelle charte de gouvernance à tous les acteurs. Auparavant, lorsque quelqu’un ne goûtait pas la direction que prenaient les débats, il quittait la table. Désormais, tout le monde s’est engagé à poursuivre un travail collégial.

À la tête de la nouvelle organisation se trouvera le comité stratégique qui réunira le ministère, les trois groupements (coopérative, négociants, indépendants) et l’Institut viti-vinicole. Chaque projet sera doté d’un responsable et d’une équipe. L’ensemble sera mis en musique par un coordinateur qui sera prochainement nommé.

Ernst & Young a annoncé que les différentes réunions avec les producteurs avaient permis d’identifier 17 projets à mettre en œuvre prioritairement. Lesquels ? Le flou demeure, mais ils s’articulent autour de sept pôles : la communication, les évènements, les principes de vente, la publicité et le marketing, les clients intermédiaires, le rivaner et les leaders d’opinion.

Ce nouveau discours de la méthode ne modifie pas substantiellement l’implication financière de l’État sur la question. «Le budget passera des 800 000 euros annuels actuels à 1 million, dont deux tiers viendront de l’État et le reste des producteurs», précise le ministre. Aucun nouveau poste ne devrait être créé, le coordinateur prendra la place d’un employé de l’Institut viti-vinicole. Bref, cela ne ressemble pas à la révolution mais à une adaptation plus que nécessaire à une Moselle qui mériterait une exposition nettement plus grande.

Erwan Nonet

«Nous en avions besoin»

Henri Streng, le président de Vinsmoselle, se félicite de la création de cette nouvelle structure de promotion.

La naissance de cette nouvelle structure pour la promotion des vins luxembourgeois est-elle une bonne nouvelle pour vous ?
Henri Streng : Oui, nous en avions besoin pour mieux nous faire connaître. Cette fois, tout semble fait pour que nous travaillions tous ensemble. C’est une bonne nouvelle.

Pour vous, quel est le projet à mettre en place prioritairement ?
Celui qui nous permettra de nous positionner sur de nouveaux marchés. On a parlé de l’Allemagne, de la Belgique, des Pays-Bas… Ce sont des consommateurs de vins et nous devons les inciter à s’intéresser aux nôtres. Nos crémants pourraient très bien s’exporter là-bas. Et pourquoi ne pas créer des vins qui leur seraient destinés ? Des vins d’assemblage que l’on pourrait même créer ensemble, avec d’autres vignerons. Ça pourrait être une idée pour arriver sur des marchés qui demandent de gros volumes.

Toutefois, le budget alloué n’est pas pharaonique… Un million, à ce niveau, ce n’est pas énorme.
C’est vrai, d’autant que les actions de marketing coûtent cher. Mais il ne tient aussi qu’à nous de l’augmenter puisque le ministère a dit que si nous augmentions notre part, il suivrait nos efforts. Le marketing est payé par une redevance sur le nombre d’étiquettes vendues et nous avons tout à fait la possibilité de l’augmenter. Nous verrons bien !

Recueilli par E. N.

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