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Démons et fantômes hantent un musée de Taïwan


Trois vampires chinois, de taille humaine et qui sautillent à intervalles réguliers, sont l’attraction principale de cette exposition. Même les visiteurs les imitent! (Photo : afp)

C’est l’exposition phare de l’été à Taïwan : «Les enfers asiatiques et leurs fantômes» font un tabac, au grand dam de groupes religieux qui, scandalisés, réclament l’annulation.

Des vampires qui sautillent en provenance de Chine, des têtes décapitées et des organes détachés qui gravitent dans l’air… Ces attractions d’une exposition à Taïwan attirent les foules : la vente de billets a dû être suspendue deux fois le jour de l’ouverture pour éviter que le musée d’Art de Tainan, sur la côte sud-ouest de l’île, ne se retrouve en surcapacité. Des milliers de personnes faisaient la queue, dans l’espoir de frémir devant l’exposition sanguinolente intitulée «Les enfers asiatiques et leurs fantômes».

Celle-ci comprend des objets traditionnels, des œuvres d’art et issues de la culture populaire sur la vie après la mort au sein de différentes cultures asiatiques. Une grande partie a été empruntée à un musée français, le Musée du Quai Branly-Jacques Chirac.

L’attraction phare : trois vampires chinois, de taille humaine, bondissant à intervalles réguliers. Ils sont censés représenter des corps réanimés, dont les membres raidis ne peuvent se déplacer qu’en sautillant. Les visiteurs imitent leurs mouvements, bras tendus les mains pendantes.

«Un kilomètre» de file d’attente

«Je m’attendais à ce que beaucoup de gens viennent, mais pas à ce qu’il y ait une telle foule», réagit Lin Yu-chun, directrice du musée. Selon elle, la pandémie de Covid-19 a donné de l’importance aux discussions sur la mort dans la société taïwanaise ces dernières années, même si le sujet reste généralement tabou dans la culture chinoise. «Beaucoup d’entre nous ont été directement touchés et ont dû faire face à la mort», constate-t-elle.

«Je n’ai jamais vu autant de monde ici, pas depuis le début de la pandémie», dit Su, une vendeuse dont l’étalage de glace pilée se trouve à côté du musée. «La file d’attente devait faire au moins un kilomètre de long», avance-t-elle.

À l’intérieur, des représentations de fantômes de Thaïlande comme le «krasue», une goule féminine sans corps dont les viscères incandescents pendent sous une tête flottante, ainsi que des dessins d’esprits maléfiques japonais et des œuvres d’artistes taïwanais peuvent être observés. «Les fantômes asiatiques ont tendance à être plus féminins, il y a plus de fantômes qui sont des femmes», explique Lin Yu-chun, alors que «les fantômes occidentaux ont tendance à avoir un air austère, comme le vampire».

Églises indignées

Si l’exposition fascine le public, il n’en va pas de même pour les groupes religieux qui n’ont pas hésité à la critiquer. Une église chrétienne du nord de Taïwan a demandé l’annulation de l’exposition, déclarant qu’elle «souillait le pays et le peuple», ont rapporté des médias locaux. D’autres groupes, dont certains venus de temples taoïstes, l’ont accusée de propager la superstition.

Selon des médias locaux, le musée a préparé un millier de breloques à distribuer aux visiteurs pour les protéger du mauvais sort. Tony Lyu, un policier âgé d’une vingtaine d’années, visite les différentes pièces. L’exposition l’a fait réfléchir, dit-il. «Je vais essayer de ne pas faire de mauvaises choses à partir de maintenant à cause de la peur» d’aller en enfer, lâche-t-il en riant. Zora Sung, 25 ans, technicienne de laboratoire dans un hôpital de la capitale, est «émue et (…) un peu touchée». Pour elle, «l’enfer est aussi une partie de notre culture que nous devons essayer de comprendre».

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