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[Bande dessinée] Avec Senso, Alfred s’offre une parenthèse enchantée


Germano et Elena, les personnages principaux de Senso, décident de s'isoler lors d'un mariage. Lui n'y était pas convié, elle aurait préféré ne pas venir. (Photo : DR)

Alfred, Fauve d’or au festival d’Angoulême en 2014 pour Come prima, sort Senso. Une rêverie poétique qui joue sur la rencontre, une nuit, de deux âmes solitaires dans un hôtel entouré par un magnifique jardin, lors d’un mariage dans le nord de l’Italie.

Fred a sorti une bonne demi-douzaine d’albums entre Come prima et SensoBob le raté, La Rage du dragon, Le Tatouage : histoire d’une pratique ancestrale, Capitaine Fripouille, etc. – pourtant, difficile de ne pas voir un pont entre les deux ouvrages. Il y a l’Italie comme décor, sa lumière, sa chaleur mais aussi et surtout un onirisme cinématographique de toute beauté et des histoires sensibles et captivantes.

Il fait chaud ce 15 août. Une de ces chaleurs accablantes qui empêchent les trains d’arriver à l’heure. Du coup Germano a six heures de retard. À la gare, personne ne l’attend. Et à l’hôtel, faute de confirmation de sa réservation avant midi, ils ont donné sa chambre à quelqu’un d’autre. Pas de bol, c’était la toute dernière, car le reste de l’hôtel est réservé pour le mariage d’un des propriétaires de ce magnifique palais entouré d’un parc gigantesque et luxuriant.

C'est dans un palais italien devenu hôtel qu'Alfred place le récit de son Senso. (Photo : DR)

C’est dans un palais italien devenu hôtel qu’Alfred place le récit de son Senso. (Photo : DR)

Ça commence mal ! Mais c’est finalement grâce à cette situation inconfortable que l’homme, sur la cinquantaine, divorcé et totalement réfractaire aux nouvelle technologies, rencontre Elena. Il n’était pas invité au mariage. Elle n’avait pas envie d’y aller. Leurs deux solitudes vont se réunir et, d’une péripétie à l’autre, ils vont passer la nuit ensemble. Dans l’hôtel, mais surtout dans le parc.

Chacun son instant
Du coup vers la fin de soirée Germano dira : «Nom de Dieu… on fait de ces voyages en une journée», alors que, un peu plus tôt, Elena lançait : «C’est joli ce qui se passe, là…». Cette nuit sera une parenthèse enchantée pour ces deux personnages gentiment à la dérive. À moins qu’elle ne se transforme pour l’un et l’autre en bouée de sauvetage.

Impossible à dire. Car pour Alfred peu importe le passé – «Ça nous servirait à quoi que je vous dise qu’il y a dix ans que je n’ai pas réussi une seule histoire avec un homme/ De dire que le temps qui passe me terrifie (…) ça ferait un peu trop « à la dérive », pas vrai ?» demande Elena avant d’ajouter : «Ce soir, on se ment un peu… demain on verra.» – Et surtout, peu importe le futur. Carpe diem semble rappeler Alfred; seul le présent existe.

D’ailleurs l’auteur laissera au lecteur le soin d’imaginer la suite. C’est l’instant qui compte, et l’imprévu est plus que bienvenu. Que ce soit entre une rencontre et une autre, entre un verre et une danse, entre une galère et une prise de tête avec un inconnu. Et entre tout ça, un couple dont on ignore tout qui, bien qu’invité à la fête, ne sortira jamais de sa chambre. Car après tout, chacun son instant !

Pablo Chimienti

Senso, d’Alfred. Delcourt.

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