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Rixe sanglante à Esch : un acquittement requis en appel


C'est en bas de la rue des Charbons, à l'angle de la rue du Canal, que la rixe sanglante avait éclaté le 31 août 2014. (Photo : Fabienne Armborst)

Fin août 2014, une rixe sanglante avait éclaté rue du Canal à Esch. La victime grièvement blessée avait dû être opérée d’urgence. Lundi, le parquet général a demandé l’acquittement d’un des deux frères condamnés en première instance. Il estime qu’un doute subsiste quant à la participation du frère cadet.

«La rixe qui a dégénéré le 31 août 2014 vers 3 h à l’angle de la rue du Canal et de la rue des Charbons à Esch-sur-Alzette avait plus l’aspect d’une boucherie qu’autre chose.» La gravité des blessures de la victime ne fait pas de doute, selon la représentante du parquet général. Grièvement blessé aux bras et aux mains à coups de machette, l’homme âgé aujourd’hui de 31 ans avait failli être amputé. À son arrivée à l’hôpital d’Esch, la victime avait également perdu un tiers de son sang…

Mais dans ce dossier marqué par de nombreuses zones d’ombre, pas facile de savoir ce qu’il s’est exactement passé. Y a-t-il eu emploi d’une machette et d’un couteau, comme le prétend la victime, ou juste d’une machette? «Décortiquer le déroulement des faits s’avère très difficile», a estimé, lundi après-midi, la représentante du parquet général qui ne partage pas la lecture du dossier qu’ont eue les premiers juges. «Les différents témoins ne permettent pas de clarifier si les deux frères ont porté des coups et blessures à la victime!»

En octobre 2018, la 13e chambre criminelle avait reconnu coupables les deux frères sur le banc des prévenus : Fábio (23 ans) l’auteur des coups de machette poursuivi pour tentative de meurtre avait donc été condamné à dix ans de réclusion, dont huit avec sursis. Son frère cadet Rui (21 ans), pour sa part, avait écopé de deux ans de prison avec sursis et d’une amende de 1 000 euros pour avoir blessé la victime à la hanche avec un couteau.

«Ce n’était pas moi (…) j’étais attentif aux filles»

Si Fábio a accepté sa peine, ce n’est pas le cas pour Rui. À tort, les premiers juges l’auraient condamné, s’est défendu le jeune homme mineur au moment des faits à la barre de la Cour d’appel lundi. Sa ligne de défense : «Ce n’était pas moi. Je ne l’ai jamais touché.» Rui affirme ne plus s’être trouvé sur place lorsque la rixe sanglante a éclaté. Il n’aurait donc pas blessé la victime à la hanche en lui portant un coup de couteau. «Si on n’a rien à se reprocher, on n’a pas besoin d’avoir peur et encore moins de s’enfuir», lui a fait remarquer la présidente. La police avait en effet longtemps recherché les deux frères. Ils n’étaient pas à leur domicile. Leur mère indiquait ne pas savoir où ils étaient partis. Mais les écoutes téléphoniques avaient révélé qu’ils se cachaient à l’étranger. Par peur, ils avaient pris la fuite parce qu’ils avaient entendu dire que la victime voulait qu’ils terminent dans une chaise roulante…

Il ne se souviendrait pas avoir vu la victime au café a, par ailleurs, appuyé Rui à la barre. Son explication : «J’étais attentif aux filles!»

De l’enquête, il ressort qu’une petite demi-heure après l’altercation, à 3 h 26 exactement, Rui avait appelé son frère Fábio. «Pourquoi les deux frères avaient-ils besoin de se téléphoner s’ils étaient ensemble lors de la rixe?», a plaidé son avocat Me Philippe Stroesser. En l’absence d’un faisceau d’indices concluant et concordant, il a demandé l’acquittement de Rui. «Mon client n’a pas d’antécédents judiciaires. Pourquoi s’en prendrait-il au plus grand caïd de la ville d’Esch?», a appuyé l’avocat. Et de conclure : «Le bénéfice du doute doit profiter à mon client.»

Prononcé le 18 décembre

Sur ce dernier point le parquet général rejoindra au final la défense. S’il ne fait pas de doute que Rui se trouvait dans le café rue du Canal au cours de la soirée, qu’à 2 h 28 son portable était toujours connecté à l’antenne du théâtre municipal à Esch, puis à 3 h 26 à Kayl, «on ne peut pas prouver exactement où il se trouvait au moment de la rixe vers 3 h». Les premiers juges s’étaient également basés sur certaines écoutes. Des écoutes que la parquetière a balayées d’un revers de main : «On peut aussi avoir une autre lecture de ces conversations téléphoniques, c’est-à-dire que Fábio a commis l’acte et que Rui, en raison des menaces entendues, a préféré s’enfuir avec lui.»

Faute d’éléments objectifs prouvant qu’il était bien avec son frère sur les lieux du crime, le parquet général a demandé l’acquittement de Rui. Comme l’avait d’ailleurs également fait le représentant du parquet en première instance.

La Cour d’appel suivra-t-elle ces réquisitions ou confirmera-t-elle le jugement de première instance? Prononcé le 18 décembre. Pour déterminer les blessures et l’atteinte à l’intégrité physique de la victime, les premiers juges avaient ordonné une expertise.

Fabienne Armborst

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