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Sa maternité fermée, Chloé s’inquiète : «Je vais devoir accoucher seule»


Les futures mamans du CHdN sont orientées vers d’autres gynécologues et maternités du pays. (photo Adobe Stock)

Originaire de Vianden, cette jeune maman de 32 ans devait accoucher d’ici peu à Ettelbruck. Mais la récente fermeture de la maternité la contraint à être prise en charge dans la capitale, ce qui l’angoisse beaucoup.

Enceinte de son deuxième enfant, cette maman d’une petite fille de sept ans profitait paisiblement de ses dernières semaines de grossesse quand elle a appris brutalement, dimanche, que sa maternité à Ettelbruck allait fermer, faute de pédiatres en nombre suffisant.

«Je n’étais pas du tout au courant qu’il y avait des soucis de personnel, j’ai vraiment pris un coup. J’étais heureuse que tout se passe bien après un premier accouchement éprouvant, donc je suis tombée de haut», confie Chloé, 32 ans, qui s’apprête à accueillir à nouveau une petite fille. «J’ai immédiatement contacté ma gynécologue, qui m’a redirigée vers une consœur à Luxembourg. Je n’ai pas eu le choix : on m’a affectée aux Hôpitaux Robert-Schuman», déplore-t-elle.

Une situation très angoissante pour la jeune mère au foyer, alors qu’elle ne connaît pas l’établissement et va devoir tisser un lien de confiance avec un nouveau praticien en 20 jours à peine. Car si Ettelbruck s’imposait par sa proximité, Chloé se sentait surtout rassurée auprès du personnel soignant qui l’avait accompagnée durant ces neuf mois : elle avait pu discuter de son projet de naissance avec les sages-femmes, tout comme de l’allaitement, et abordait enfin cet accouchement à venir avec sérénité.

À ce stress inattendu s’ajoutent les longs trajets qui s’annoncent pour rejoindre la capitale, à une heure de route de son domicile, afin d’effectuer les dernières consultations de suivi de sa grossesse. Elle qui a du mal à supporter la voiture désormais. «J’ai rendez-vous ce jeudi et c’est déjà toute une organisation, car nous n’avons qu’un seul véhicule. Mon mari travaillant à Bissen, c’est très compliqué. Je pense que je vais devoir accoucher seule, ce sera plus simple», soupire-t-elle, dans l’incompréhension.

«Nous avons un très bon système de santé normalement au Luxembourg, je n’arrive pas à comprendre comment cela peut se produire ici. Je me sens démunie», poursuit Chloé. Quant à envisager d’accoucher à domicile sous la supervision d’une sage-femme, comme l’autorise la nouvelle nomenclature de la CNS, elle n’y a pas songé une seconde, encore marquée par la naissance difficile de son aînée.

Le moment venu pour les maisons de naissance?

Par contre, elle se dit favorable à la création de maisons de naissance, gérées entièrement par des sages-femmes, à l’image de ce qui se fait de plus en plus en Belgique et en France, et qui existe depuis longtemps en Allemagne : des petites structures, à taille humaine, pour des accouchements moins médicalisés. «Je trouve ça super! J’en ai beaucoup entendu parler et je suis sûre que, comme moi, de nombreuses femmes aimeraient voir ça se développer au Luxembourg», assure-t-elle.

C’est précisément ce que propose l’Association luxembourgeoise des sages-femmes (ALSF). Dans un communiqué publié en réaction à la fermeture – annoncée comme temporaire – de la maternité d’Ettelbruck, et dix ans après la disparition de celle de Wiltz, elles estiment que le temps est peut-être venu d’initier une réforme en profondeur d’un système qu’elles jugent «dépassé».

L’ALSF propose d’envisager une nouvelle approche, avec des maisons de naissance dédiées aux grossesses ne présentant aucun risque particulier, la grande majorité, et en complément une prise en charge adaptée à celles avec complications dans certaines structures spécialisées disposant d’un service de néonatologie.

Sur la situation actuelle, elles font part de leurs craintes concernant l’accueil des patientes du CHDN dans les maternités de la capitale, alors que le personnel soignant va devoir absorber cette augmentation «considérable et non prévue de la charge de travail.» Et se montrent inquiètes par rapport à l’avenir professionnel des sages-femmes du CHDN, tout en prévenant que la maternité du CHEM pourrait se retrouver dans une situation semblable à celle d’Ettelbruck.

La maternité du CHEM «fonctionne jusqu’ici»

Citée à plusieurs reprises ces derniers jours pour des difficultés similaires à celle d’Ettelbruck, la maternité du centre hospitalier Émile-Mayrisch d’Esch-sur-Alzette, qui compte un millier de naissances par an, risque-t-elle vraiment la fermeture, elle aussi?

Le Dr Romain Schockmel, le directeur médical au CHEM, tempère : «Il est vrai que nous fonctionnons sur le même modèle qu’Ettelbruck, avec un pédiatre présent la journée et rappelable à tout moment. Mais nos gynécologues, pédiatres et anesthésistes m’ont confirmé que nous sommes en mesure de faire face», assure-t-il.

«Nous avons quatre pédiatres qui, en plus de leurs journées de travail à l’hôpital, se relaient pour assurer les astreintes nocturnes, tandis que nous avons toujours un anesthésiste sur place. Si demain, nous étions confrontés à un départ en retraite, un arrêt maladie et un cas positif au covid simultanés, on pourrait avoir des problèmes. Le CHEM n’est pas à l’abri. Mais ce n’est pas la situation actuelle : ça fonctionne jusqu’ici.»

La ministre de la Santé prise pour cible

Alors que Paulette Lenert a pris quelques jours de vacances, les questions parlementaires qui lui sont adressées pleuvent depuis l’annonce de la fermeture de la maternité. Et aux côtés d’interrogations légitimes de la part des députés de tous bords à propos de l’organisation et de la continuité des soins, émergent des attaques à peine voilées : «Quelles démarches les ministres en fonction ont-ils entreprises auprès du CHDN afin de prévenir la fermeture de la maternité depuis l’entrée en vigueur de la loi hospitalière de 2018 ?», demandent ainsi trois députés verts qui la prient également de confirmer que l’avenir des autres maternités du pays est assuré à long terme.

Plus cyniques, déi Lénk soulignent, dans un communiqué, qu’il vaut mieux «ne pas tomber malade ou être enceinte dans le nord du pays», pointant l’inaction du gouvernement face à la pénurie de médecins et la vulnérabilité du système de santé luxembourgeois identifiées dès 2018 dans le rapport Lair – un audit indépendant dont le ministre Étienne Schneider avait lui-même présenté les conclusions alarmantes.

Au DP, le député André Bauler interroge quant à lui la ministre sur «les mesures prises pour continuer à garantir des soins de santé de qualité à l’avenir au nord du pays», tandis que le CSV, Martine Hansen en tête, ne décolère pas, évoquant «une gifle pour les citoyens de la région nord» et réclamant «une approche pragmatique pour combler le déficit de personnel le plus rapidement possible».

Un commentaire

  1. Compatissante

    Un bon système de santé ? On est encore très loin de cela. Tout est fait pour la capitale oui, le Nord est de plus en plus délaissé. Quand on pense que pour une radiothérapie il faut se rendre à Esch-Sur-Alzette, très éprouvant pour un patient déjà affaibli. La maison de la douleur se trouve à Luxembourg et celui où celle qui en a besoin s’en passe tellement les trajets sont long(une personne en bonne santé dira: mais ce n’est qu’une heure en train!) ,un parcourt du combattant pour une personne malade. Je vous souhaite bonne chance pour votre futur accouchement. Ayant eu 3 césariennes je comprends votre angoisse. Partir à temps dès les premiers doutes, c’est ce qui m’a permis d’être prise en charge à temps, parce que le bébé n’attend pas forcément la date prévue pour voir le jour.

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