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[Gardiens de la nature] Pollinisateurs : tant qu’il est encore temps…


Nora Elvinger et Lieke Mevis sont toutes les deux engagées pour protéger les pollinisateurs.

Alors que les populations de pollinisateurs déclinent dangereusement, le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable déploie une campagne dans le cadre du plan d’action national pour la préservation de ces insectes.

On le sait, les pollinisateurs sont importants dans la nature, mais on ne se rend peut-être pas compte à quel point. Ils sont indispensables à la culture de nombreux fruits et légumes. Sans eux, pas de récolte… ni de café du matin. La valeur économique générée par leur service de pollinisation est estimée à… 150 milliards d’euros! Un tiers de l’alimentation mondiale leur est due. Sans compter qu’ils sont une ressource essentielle pour de nombreux animaux tels que les oiseaux ou les chauves-souris.

Or, en 2017, des entomologistes ont publié une étude menée en Allemagne démontrant qu’en 27 ans, la biomasse des insectes volants présents dans 63 réserves naturelles réparties dans tout le pays avait diminué de 75 %. L’étude, scientifiquement très solide, secoue les consciences.

C’est pourquoi le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, avec plusieurs partenaires, a lancé pour la deuxième année les «B & B Action Weeks», un programme d’activités qui vise à sensibiliser le grand public qui s’achève ces jours-ci (www.bbweeks.lu et www.planpollinisateurs.lu). La portée de l’évènement, créé dans le cadre du plan d’action en faveur des insectes pollinisateurs, perdurera bien sûr au-delà de ces quelques semaines.

Grande action de comptage d’insectes

Tout d’abord, le programme rappelle 5 gestes simples bénéfiques aux pollinisateurs : planter plus de fleurs, d’arbustes et d’arbres, laisser pousser la végétation sauvage, tondre moins souvent, ne pas déranger les nids d’insectes et les sites de nidification et ne pas polluer.

Ensuite, un appel à projets «Pollinisateurs» a été lancé aux différents partenaires (syndicats communaux, parcs naturels, ONG…) et les retours sont jugés très positifs. «Nous sommes très contents du développement du plan d’action national pour la préservation des pollinisateurs, beaucoup d’organismes ont répondu à notre appel», se félicite Nora Elvinger, attachée de gouvernement au ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, et responsable du plan d’action.

«La deuxième édition des « B&B Action Weeks«  est l’occasion de faire connaître au grand public nos partenaires et leurs projets, que nous soutenons financièrement.» Formation du personnel technique, valorisation écologique de leurs terrains… les communes, notamment, semblent avoir pris conscience du rôle qu’elles ont à jouer.

Le musée national d’Histoire naturelle (MNHN) a également lancé deux initiatives en rapport avec le plan d’action. Il est en train de créer une librairie sur les abeilles sauvages. «Il en existe plus de 250 espèces rien qu’au Luxembourg et elles sont pour la plupart encore mal connues, assure Nora Elvinger. Grâce à cette bibliothèque, les chercheurs et le grand public disposeront du matériel de référence pour mieux connaître leur taxonomie et leur écologie. Ces informations seront précieuses pour mieux les protéger.»

Il existe plus de 300 espèces d’abeilles sauvages rien qu’au Luxembourg

Le MNHN s’emploie aussi à dresser l’atlas des syrphes, ces insectes inoffensifs qui prennent la couleur des abeilles et des guêpes pour se protéger. «Nous savons que près de 180 espèces sont présentes dans le pays, mais on ignore encore beaucoup sur leur répartition.»

Le ministère développe aussi la sensibilisation et la formation du grand public (notamment avec les ASBL CELL et EBL), mais aussi vers les professionnels, pour qui des guides sont édités avec l’administration de la Nature et des Forêts.

Natur&ëmwelt est un partenaire essentiel du plan d’action. L’association se penche notamment sur la mauvaise réputation des guêpes, pourtant d’efficaces pollinisatrices. «Nous avons mis en place un réseau d’une vingtaine d’experts qui conseillent les particuliers, explique Lieke Mevis, conseillère de natur&ëmwelt. Notre but est d’aider à vivre avec les guêpes, sans avoir à les empoisonner. Ces pesticides sont toxiques, ils ne se détériorent que très lentement et finissent dans l’environnement.» Pour profiter de ces renseignements, il suffit de contacter la Haus vun der Natur qui transmettra la demande à un des spécialistes.

Pour la première fois au Luxembourg, natur&ëmwelt va également lancer une grande opération de comptage d’insectes. Elle aura lieu du 9 au 18 juin. « Nous invitons tout le monde à participer, où qu’ils se trouvent, précise Lieke Mevis. Nous avons sélectionné 12 insectes (NDLR : papillons, coccinelles, guêpes, syrphes, libellules…) et créé des petites fiches que l’on trouve sur notre site internet (www.naturemwelt.lu) afin de pouvoir les identifier.» Ces observations devront être réalisées pendant 1 heure, entre 10 h et 16 h, par temps ensoleillé et sans trop de vent. Elles devront être retranscrites sur le site de natur&ëmwelt.

Enfin, l’ASBL livre aussi des conseils pour jardiner de manière plus écologique et créer des espaces qui sont réellement en communion avec l’environnement.

La questionPourquoi y avait-il tant de guêpes l’année dernière?

Comment le nier? Les guêpes nous ont sérieusement enquiquinés l’été dernier… Plus présentes que d’habitude, il a fallu redoubler d’attention lors des apéros et des repas en terrasse. Au Grand-Duché, on dénombre 300 espèces de guêpes, dont une quinzaine adoptent un comportement social et seulement deux peuvent entrer en conflit avec nous, «c’est-à-dire qu’elles viennent à notre table, attirées par le sucre et la viande», souligne Lieke Mevis de natur&ëmwelt.

Le printemps 2022 chaud et sec a favorisé leur présence. En effet, le taux de mortalité, dû aux parasites qui apprécient l’humidité, a été particulièrement faible. Cette météo a favorisé l’éclosion précoce des fleurs, mais aussi leur disparition rapide. «Dès le mois de juillet, il n’y en avait plus et pour se nourrir, elles ont été contraintes de se rapprocher de nous.» Et donc tourner en nombre autour de nos tables.

Carte d’identité

Nom : Nora Elvinger

Âge : 39 ans

Poste : Attachée de gouvernement au ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, direction des ressources naturelles, de l’eau et des forêts

Profil : Lors de ses études de biologie (spécialisation en écologie) à l’université libre de Bruxelles, elle a notamment étudié de près la génétique et la démographie des populations de plantes hyperaccumulatrices de métaux lourds. Elle travaille au ministère depuis dix ans.

Carte d’identité

Nom : Lieke Mevis

Âge : 42 ans

Poste : Conseillère Nature, chez natur&ëmwelt

Profil : Elle a étudié la primatologie à l’université d’Utrecht (Pays-Bas), mais rebutée par la captivité des animaux qu’elle observait, elle se penche finalement sur la fouine pour sa thèse. Enseignante, puis conseillère indépendante, elle a rejoint natur&ëmwelt il y a deux ans.

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