Accueil | A la Une | Pénibilité numérique : déconnecter, la clé pour se ressourcer

Pénibilité numérique : déconnecter, la clé pour se ressourcer


Le psychologue du travail Pierre Guillot explique comment la surcharge informationnelle peut impacter la santé. (Photo : Alain Rischard)

Ça paraît simple, pourtant ce n’est pas si facile : déconnecter du travail et du trop-plein d’informations pendant ses congés est essentiel pour permettre à l’organisme de souffler, et mieux aborder la rentrée. Un psychologue donne ses conseils.

Contenus récréatifs, mails professionnels, actualités, partout et tout le temps : la digitalisation et la multiplication des supports amènent un volume d’informations considérable qui n’a pas que des bons côtés. Les sollicitations et distractions au fil d’une journée ont un réel impact sur notre santé mentale et physique, et peuvent mener à un sentiment de confusion, un manque d’attention, voire à l’épuisement.

D’où l’importance de faire des pauses et de couper régulièrement ces sources de surcharge informationnelle, notamment lors de périodes de vacances : «Se déconnecter durant plusieurs semaines permet à l’organisme de se ressourcer sur le plan tant psychologique que physique. C’est un moment idéal pour tout remettre à zéro et évacuer le stress», explique Pierre Guillot, psychologue du travail au sein d’IMS Luxembourg.

Un conseil peu appliqué dans les faits : «Entre 20 et 52 % des personnes continuent de travailler pendant leurs congés, en répondant à leurs mails ou à des appels téléphoniques par exemple. Ce qui peut avoir des conséquences néfastes, surtout si ce n’est pas choisi mais subi», précise-t-il. Le risque principal étant de revenir au travail sans avoir pu tirer de repos bénéfique.

Un phénomène qui s’observe surtout au niveau managérial, mais qui peut également toucher les collaborateurs d’une équipe. Le psychologue évoque en effet une certaine pression sociale : «Il y a ce sentiment qu’on va avoir besoin de nous pour des tâches, et qu’on va bloquer le reste du groupe si on ne se rend pas disponible. On observe ce type de réaction dans le milieu médical où les employés sont très soudés et comptent les uns sur les autres», remarque-t-il.

Et surprise, le besoin de déconnexion ne se cantonne pas à la sphère professionnelle. Ainsi, s’éloigner un temps du flot d’information des médias et des réseaux sociaux a du bon. Pour cet expert, poster régulièrement et scroller sur le web représente une forme de charge, même si c’est divertissant. «Le trop-plein d’informations englobe l’actualité, qui peut être perçue comme anxiogène et tirer certaines personnes vers le bas», souligne-t-il. Décider de s’en libérer le temps de quelques jours peut avoir des effets positifs.

La pénibilité numérique, un processus souterrain

Dans le cadre du travail, une enquête menée par IMS en 2019 révélait qu’un employé recevait en moyenne 61 mails par jours, soit un toutes les huit minutes. La moitié des 1 300 salariés luxembourgeois interrogés à l’époque estimaient être la cible de trop d’informations au cours d’une journée, et 64 % reconnaissaient avoir déjà manqué une information importante. «On sait que la situation s’est encore aggravée depuis la crise sanitaire et l’expansion du télétravail. Les lignes sont de plus en plus floues entre vie personnelle et professionnelle, tandis que les petites sollicitations – messages, notifications – explosent», poursuit Pierre Guillot.

Stress, difficultés d’organisation et de concentration, production et prise de décision de moindre qualité, sensation de brouillard mental : les conséquences de ces interruptions en cascade lors d’une journée de travail finissent par être nocives. «C’est ce qu’on appelle la pénibilité numérique. Elle peut peser lourdement sur notre état de santé et ce, sans même qu’on en prenne conscience. D’où l’importance de la sensibilisation», alerte le psychologue. Sans compter qu’une fois à la maison, le réflexe de consulter les flux des réseaux sociaux, dans l’idée de se détendre, revient en fait à entretenir cette accumulation d’informations.

Pour tenter de se préserver au moment de revenir au bureau, une mesure simple et efficace consiste à supprimer tous les mails reçus en son absence : «On peut partir du principe que les problèmes ont été résolus sans nous, et que si ce n’est pas le cas, la personne nous recontactera», tranche Pierre Guillot. Et au quotidien, de bons réflexes sont à adopter pour éviter la surchauffe, comme désactiver les notifications pop-up, prévoir des plages horaires pour consulter sa boîte aux lettres, ajouter systématiquement une date butoir dans les demandes par mail, de façon à ce que le destinataire comprenne que ce n’est pas urgent, ou encore éviter au maximum la fonction «Répondre à tous», inutile la plupart du temps.

Des formations en entreprise en 2024

Des ressources et guides pratiques anti-infobésité sont disponibles gratuitement en ligne sur le site d’IMS Luxembourg. À la fin de l’année, l’équipe mènera un audit dans plusieurs entreprises et organisations afin de réduire la surcharge informationnelle des collaborateurs, et une série de formations est prévue au printemps 2024. Ce projet, nommé Techwell, a pour but de prévenir les risques numériques et de préserver la santé des utilisateurs, grâce à un usage équilibré des outils. Les employeurs intéressés peuvent se manifester auprès de l’association.

imslux.lu

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.