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Luxembourg : l’indispensable classe moyenne toujours sous pression


Selon l’OCDE, quatre personnes sur cinq, au Luxembourg, ont le sentiment d’appartenir à la classe moyenne.  (Photo : archives lq/isabella finzi)

La classe moyenne craint d’être la grande oubliée des aides nécessaire pour atténuer les effets de l’inflation. L’OCDE avait rédigé un rapport qui alertait sur la morosité ambiante.

Les patrons se plaignent de ne plus trouver de candidats aux postes qu’ils offrent, en dépit de salaires et de conditions plus attrayants, pour ceux, parmi les patrons qui font des efforts dans ce sens. Le secteur Horeca est touché et d’autres encore, comme l’artisanat. Les jeunes diplômés n’ont plus la certitude de pouvoir appartenir à la classe moyenne qui pâtit des crises successives.

L’OCDE avait mis en garde dans un rapport de 2019, juste avant la pandémie, que la classe moyenne était sous pression. L’organisation indiquait qu’un niveau de compétences plus élevé est désormais nécessaire pour faire partie de la catégorie des revenus intermédiaires. «Il ne suffit plus d’avoir des compétences intermédiaires pour appartenir à la catégorie des revenus intermédiaires, comme c’était le cas dans le passé», observe-t-elle.

Des seuils qui varient énormément

C’est précisément pour la classe moyenne que le niveau de compétences exigé a augmenté. Aujourd’hui, près de la moitié des travailleurs à revenu intermédiaire occupent des emplois hautement qualifiés, comparativement à un tiers il y a deux décennies. «Il est de moins en moins possible d’obtenir le même niveau de revenu que par le passé pour certains emplois», analyse l’OCDE, pour qui «cette nouvelle association entre les compétences professionnelles et le niveau de revenu peut aider à expliquer une partie de la frustration sociale, qui est au cœur du débat sur la pression qui s’exerce sur la classe moyenne».

En termes réels, les seuils de revenu intermédiaire (75 %-200 % du revenu médian) varient beaucoup d’un pays de l’OCDE à l’autre. Une personne seule doit avoir un revenu annuel compris entre 3 800 et 10 000 euros au Mexique et entre 26 500 et 70 600 euros au Luxembourg pour faire partie de la classe moyenne. Avec un revenu de 23 000 euros, par exemple, les personnes appartiendraient à la classe moyenne dans 25 des 35 pays de l’OCDE pour lesquels l’OCDE dispose de données. Ces ménages de la classe moyenne ont vu leur niveau de vie stagner ou baisser dans de nombreux pays de l’OCDE, tandis que les catégories de revenu supérieures ont continué d’accumuler revenu et patrimoine.

Un système socio-économique inéquitable

Au Luxembourg, la pression s’accentue sur la classe moyenne et les députés s’en émeuvent souvent, qui prônent régulièrement des allégements fiscaux pour cette catégorie au vaste spectre. Selon l’OCDE, quatre personnes sur cinq, au Luxembourg, ont le sentiment d’appartenir à la classe moyenne. Le rapport remarque aussi que dans de nombreux pays, «l’appartenance à la classe moyenne est traditionnellement associée à la possession d’une maison, de sorte que la flambée des prix des maisons a porté atteinte au sentiment même d’appartenance à la classe moyenne». Et là, le Luxembourg est touché de plein fouet.

Les prix de l’immobilier et une faible croissance du revenu des ménages intermédiaires renforcent cette perception «que le système socioéconomique actuel est inéquitable et que la classe moyenne n’a pas tiré parti de la croissance économique de façon proportionnelle à sa contribution», analyse l’OCDE. En outre, le coût de la vie est de plus en plus cher pour la classe moyenne, étant donné que le prix des services et produits de base, comme le logement, a augmenté plus vite que le revenu.

Une richesse toujours plus inégalement répartie

La Chambre des salariés avait prévenu d’un risque dans son dernier Panorama social. «Si le Grand-Duché est l’un des pays les plus développés au monde, force est de constater que sa richesse se trouve toujours et encore (plus) inégalement répartie au sein de la population et que le taux de risque de pauvreté a nettement progressé au fil des années. Le Luxembourg, malgré un dynamisme économique inégalé en Europe, même en temps de crise sanitaire, ne parvient pas à réduire, ni même à juguler ces dérives inégalitaires qui, à force de persister et de se renforcer, risquent à terme de nuire à la cohésion sociale», écrivait Nora Back, la présidente de la CSL, dans sa préface.

L’OCDE, pour sa part, rappelle qu’une classe moyenne «forte et prospère est essentielle à la réussite de l’économie et à la cohésion de la société». Et d’ajouter que «les sociétés qui reposent sur une classe moyenne forte affichent des taux moindres de criminalité et des niveaux supérieurs de confiance et de satisfaction à l’égard de la vie, et elles jouissent aussi d’une plus grande stabilité politique et d’une meilleure gouvernance».

Encore aujourd’hui, la classe moyenne craint d’être la grande oubliée de cette crise. Pas assez pauvre, pas assez riche, qui éprouve de plus en plus de difficultés à joindre les deux bouts et obligée de s’exiler, bien souvent, pour trouver un toit.

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