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Le Grand-Duc conserve le droit de grâce


La ministre de la Justice, Sam Tanson (à g.), se base sur l’avis de la commission des Grâces pour soumettre une proposition au Grand-Duc. La décision de grâce est prise «souverainement» par le chef de l’État.

Une nouvelle loi va ancrer le droit accordé au Grand-Duc de dispenser ou réduire une peine infligée à un citoyen. Dans les faits, rien ne change. Ce sont surtout des conducteurs privés de permis qui sont graciés.

Au bout de 20 ans de travaux, le Luxembourg sera enfin doté, à l’approche de l’été, d’une Constitution adaptée aux besoins du XXIe siècle. La loi suprême révisée vient, néanmoins, confirmer un droit semblant archaïque, mais qui, selon la ministre de la Justice, a toujours «son utilité et sa place» dans la société moderne. Il s’agit plus concrètement du droit de grâce accordé au Grand-Duc, considéré comme l’«ultime correctif des peines prononcées» par la justice. Le souverain conserve, donc, le droit «de remettre ou de réduire les peines prononcées par les juridictions».

«Tous les systèmes juridiques des différentes formes de communautés humaines ayant existé jusqu’à présent connaissaient le droit de grâce, alors que le droit de grâce relève du pouvoir de pardonner, qui est le corollaire du droit de punir», développe Sam Tanson dans un projet de loi, déposé cette semaine.

Des conditions législatives à respecter

Le pouvoir accordé au souverain est toutefois à fortement relativiser. Aujourd’hui, le Grand-Duc gracie principalement des conducteurs privés, par décision de justice, de leur permis de conduire. Entre 2017 et 2021, aucune peine d’emprisonnement n’a été remise, en dépit de la centaine de demandes adressées au chef de l’État (voir tableau ci-dessous).

La grâce collective, à l’occasion de l’avènement au trône d’un nouveau souverain, ne fait également plus partie des mœurs. «Les grâces collectives ont consisté à accorder à un nombre indéterminé de personnes la remise d’une peine, en règle générale une amende de faible envergure, à l’occasion d’un évènement d’importance nationale», rappelle la ministre de la Justice dans son exposé des motifs accompagnant le dépôt de la loi visant à mettre en œuvre le nouvel article 39 de la Constitution révisée.

Elle souligne que la «plus-value» d’une grâce «est uniquement assurée sur base d’une évaluation individuelle de chaque cas d’espèce, ce qui, par définition, n’est pas le cas lors d’une grâce collective». Au Luxembourg, la dernière grâce collective remonte au 23 juin 1998.

«La survie du droit de grâce dans les républiques et monarchies constitutionnelles s’est accompagnée d’une modification de sa nature juridique : droit régalien dans les monarchies absolues, il est devenu un droit constitutionnel», précise encore l’exposé des motifs. Dans ce même ordre d’idées, le Grand-Duc doit se plier aux «conditions déterminées par la loi» pour exercer le «droit qui lui est conféré par la Constitution».

La ministre de la Justice développe : «Par conséquent, le maintien du droit de grâce lors de la révision constitutionnelle (…) ne saurait être considéré comme une anomalie ou une extravagance, quitte à entourer son exercice par des conditions législatives», à l’instar de «probablement tous les États du monde» qui connaissent toujours le droit de grâce «sous une forme ou une autre et avec des modalités quelque peu divergentes».

L’élue déi gréng admet toutefois que le droit de grâce n’a pas toujours fait l’unanimité, qualifié de «droit régalien surannée» par les uns, et d’«instrument de régulation de l’engorgement pénitentiaire» pour les autres.

Au Luxembourg, les demandes de grâce, personnelles et dûment motivées, sont à soumettre au Grand-Duc. Il est néanmoins possible de saisir directement le parquet général ou le ministère de la Justice. La suite est la même. La demande est remise à une commission des Grâces, qui, sur base d’un dossier complet, émet un avis favorable ou défavorable. Par le biais du procureur général d’État, le ministre de la Justice transmet une proposition de décision au Grand-Duc, qui est, lui, amené à acter «souverainement» s’il gracie ou pas le citoyen en question.

On est loin de «l’apanage des rois»

Dans les faits, il revient néanmoins aux membres de la commission des Grâces de statuer sur le sort des requérants. Il s’agit de quatre magistrats, issus de la Cour d’appel, du parquet général et du tribunal d’arrondissement; ainsi que d’un représentant du barreau des avocats et deux membres d’une chambre professionnelle. Il est important de souligner que sont exclus de la commission les magistrats qui ont contribué à l’instruction ou au jugement de l’affaire pénale sous avis.

La nouvelle loi s’inspire largement des modalités déjà en place. Il n’est donc pas question d’une révolution. En même temps, on est très loin de l’époque où le droit de grâce était perçu «comme l’apanage des rois et autres monarques» qui en avaient besoin «pour s’assurer discrétionnairement, si nécessaire, de la fidélité de (leurs) vassaux».

2 plusieurs commentaires

  1. La France est une République: le droit de grâce revient au Président de la République.

  2. pas monarchiste

    vive la république!!! on est 2023! il n’ a pas à se meler de justice… !!! incroyable!

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