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La géothermie fait son trou au Luxembourg


Achetée plus d’un million d’euros, Lola, la foreuse de Yes Geo Services, réalise son premier chantier sur le site de la société. (photo Tania Feller)

Yes Geo Services, première entreprise luxembourgeoise spécialisée dans la géothermie, a présenté, ce mercredi 5 juillet, sa foreuse encore en test, mais très vite appelée à multiplier les chantiers.

«Je ne peux pas la démarrer, je vais arroser tout le monde sinon», plaisante Simon Orban. Elle, c’est Lola, une foreuse toute neuve et vert pétant, qu’il dirige et qui trône devant l’entrepôt de Yes Geo Services à Bascharage. Créée en 2022, cette société est la première au Luxembourg à se spécialiser dans les forages géothermiques. Achetée près de 1,1 million d’euros il y a un mois, Lola est l’attraction du jour en ce mercredi 5 juin. En collaboration avec la Fédération des Artisans, Yes Geo Services a présenté son premier chantier «afin de remplacer la chaudière de la boîte», explique le foreur. Pour ce faire, ce dernier va creuser jusqu’à 140 mètres de profondeur, sur les 365 mètres de capacité maximale, afin de récupérer la chaleur de l’eau présente dans le sol via une sonde.

«Après 90 mètres, on traverse de la marne et après, c’est le grès du Luxembourg qui donne beaucoup d’eau, ce qui produit un meilleur échange thermique», précise Valentin, second fondeur de l’entreprise. Pour l’instant, ce premier chantier, démarré depuis une semaine, sert de «phase de test pour la machine». «C’est tout nouveau pour moi, d’habitude j’ai une télécommande», confie Simon Orban, qui porte une large console composée de boutons et de joysticks. Malgré cela, le carnet de commandes de Yes Geo Services est déjà chargé.

«On a des commandes de privés et de communes, avec des chantiers qui peuvent aussi bien durer une semaine qu’un trimestre, avec 80 forages à 200 mètres», se réjouit son fondateur Yannick Schuler. «C’est bien, on veut que la foreuse ne s’arrête jamais», rigole-t-il. Un optimisme général loin de la colère des Alsaciens concernant la géothermie. En 2020, de nombreux séismes, jusqu’à 4,3 de magnitude, avaient eu lieu près d’un projet de centrale géothermique à Strasbourg. Révélés comme étant provoqués par l’activité humaine, les tremblements de terre successifs ont conduit la préfecture à fermer le site ainsi qu’à déposer plainte contre l’entreprise en janvier dernier.

À la recherche de foreurs

«Ça ne se passera pas comme en Alsace», assure Valentin. «Là-bas, c’était 3 000 mètres et il y avait un empilement géologique très rare, avec du gypse, un minéral qui gonfle lorsqu’il est hydraté. Sauf qu’ils ont mal cimenté et donc il a gonflé et provoqué les séismes.» Afin d’éviter pareille situation, les fondeurs ont suivi deux jours de formation avec un géologue et un bureau d’études. De quoi rassurer Claude Turmes, le ministre de l’Énergie : «C’est bon tant qu’il y a des contrôles de qualité, que c’est fait par des vrais professionnels et dans les règles de l’art.»

Fervent défenseur de la géothermie pour la transition énergétique, le ministre y voit «une technologie de référence». Le but : remplacer le fioul et le gaz dans le domaine du chauffage. Pas de quoi forer tous les deux cents mètres pour autant. «Je dois trouver un compromis avec l’administration de la Gestion de l’eau (AGE) afin de limiter les forages sur les bâtiments où il y en a vraiment besoin.»

Ce dernier affirme donner la priorité aux grands bâtiments industriels et de bureaux, comme celui de Yes Geo Services, afin de «préchauffer leur eau via la chaleur du sol». Un projet de géothermie profonde, à partir de 2 500 mètres, est tout de même prévu dans le but de chauffer un quartier de Dudelange. Il n’exclut pas non plus la possibilité d’utiliser la géothermie basse énergie, entre 10 et 100 mètres, afin d’alimenter les pompes à chaleur des maisons individuelles.

Bien que Claude Thumes se félicite de la création de la première entreprise spécialisée luxembourgeoise, («avant, c’étaient des entreprises frontalières qui faisaient 400 kilomètres»), Yes Geo Services ne pourra répondre à toutes les demandes du Grand-Duché. Alors qu’une deuxième foreuse verticale a été commandée pour janvier prochain, la société cherche encore un ouvrier maître de forage. «C’est un métier spécifique, c’est dur de trouver quelqu’un», confirme Simon Orban. «À la base, je ne faisais pas ça, je suis venu pour six semaines et maintenant ça fait 18 ans.»

Après avoir appris «sur le tas», ce dernier se dit prêt à former quelqu’un, à condition d’avoir du temps. Face à ce manque de personnel, le ministre de l’Énergie envisage, lui, «de pouvoir travailler avec le secteur afin que l’on fasse une formation spécifique pour les foreurs».

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