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Féminicide : une notion encore trop méconnue au Luxembourg


(illustration Editpress)

Alors qu’une jeune femme de 20 ans a perdu la vie sous les coups de son compagnon, devant leur enfant, il y a quelques jours à Luxembourg-Ville, la question de la reconnaissance des féminicides revient sur le devant de la scène. Une notion qui n’est toujours pas reconnue officiellement au Luxembourg.

«Ne pas nommer ces violences a pour conséquence une immense difficulté dans la compréhension, la prévention et la punition de ces actes.» Le communiqué envoyé ce vendredi matin par déi Lénk donne le ton. Le parti fustige le gouvernement, après la mort d’une jeune femme de 20 ans, dans le quartier de la Gare de la capitale, il y a quelques jours, frappée à plusieurs reprises à l’aide d’un marteau par son compagnon.

Un acte violent inouï, qui serait qualifié dans d’autres pays de « féminicide », c’est-à-dire « d’assassinat d’une femme, parce qu’elle est une femme ». Pourtant, ce n’est pas le cas au Luxembourg. Aucun cadre légal n’existe pour ces agressions : le terme de « féminicide » ne figure tout simplement pas dans le code pénal luxembourgeois.

Pourtant, en 2014, un rapport de la commission des droits des femmes au Parlement européen «appelait les États membres à qualifier juridiquement de féminicide, tout meurtre de femme fondé sur le genre et à élaborer un cadre juridique visant à éradiquer ce phénomène». Un appel qui, huit ans plus tard, n’a visiblement toujours pas été entendu par le Luxembourg.

«Il est primordial de créer un cadre légal adapté qui permette la pénalisation de toutes les formes d’infractions liées au sexisme. Honteusement, le gouvernement luxembourgeois peine à faire ces pas.», souligne à ce sujet déi Lénk.

917 cas de violence domestique en 2021

Il faut dire qu’aucun décompte officiel n’est effectué dans le pays, à l’instar de l’association « Féminicides par compagnons ou ex » en France par exemple, qui comptabilise à ce jour la mort de 86 femmes sous les coups de leurs compagnons. Une absence de statistiques que le ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes nuance, en se référant aux «chiffres très détaillés en matière de violence domestique» disponibles au Grand-Duché.

Il est vrai que selon le dernier rapport de la police grand-ducale, 917 appels pour des cas de violence domestique ont été répertoriés en 2021 : dans 249 cas, l’auteur des violences a même été expulsé du foyer. Des chiffres en légère baisse par rapport à l’année 2020 (-2%), que la ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Taina Bofferding, assurait «suivre régulièrement» en 2019.

Des foyers toujours remplis

Mais la question se pose : combien de temps faudra-t-il attendre avant que le féminicide ne soit inscrit dans le code pénal luxembourgeois ? Du côté du CNFL, le Conseil National des Femmes du Luxembourg, le discours reste inchangé.

«Il serait, bien entendu, important de prévoir le féminicide dans le code pénal. C’est une revendication portée par le monde associatif», souligne Anik Raskin, présidente du Conseil, qui ne manque pas de rappeler la réalité du terrain : « La situation est toujours la même dans les foyers d’hébergement pour femmes et enfants victimes de violences… Ils ont une occupation maximum et il existe toujours une liste d’attente ».

déi Lénk revendique pour sa part «l’inscription du féminicide dans le code pénal, la participation à l’Observatoire européen du féminicide ainsi que l’application pleine et entière de la convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes.»

Contacté à ce sujet vendredi matin, le ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes n’avait pas encore répondu à nos sollicitations au moment de la publication de cet article à 18h.

Le féminicide en bref

Le «féminicide» est un meurtre de femmes ou de jeunes filles lié au fait qu’elles sont des femmes. Le caractère genré du motif doit être présent. Une femme tuée dans le cambriolage d’une banque ou par un chauffard ne peut pas être de facto considérée comme victime d’un féminicide. Le meurtrier n’est pas nécessairement un homme.

L’OMS distingue plusieurs cas:

  • le féminicide «intime», commis par le conjoint, actuel ou ancien de la victime. Selon une étude citée par l’Organisation mondiale de la santé, plus de 35% des femmes tuées dans le monde le seraient par leur partenaire, contre 5% seulement des meurtres concernant les hommes;
  • les crimes «d’honneur» : lorsqu’une femme accusée d’avoir transgressé des lois morales ou des traditions – commettre un adultère, avoir des relations sexuelles ou une grossesse hors mariage, ou même avoir subi un viol – est tuée pour protéger la réputation de la famille. Le meurtrier peut être un homme ou une femme de la famille ou du clan;
  • le féminicide lié à la dot, en particulier en Inde, lorsque des jeunes femmes sont tuées par leur belle-famille pour avoir apporté une somme d’argent insuffisante lors du mariage;
  • le féminicide non intime, crime qui implique une agression sexuelle ou dans lequel les femmes sont explicitement visées. En France, l’expression est officiellement entrée en 2014 dans le vocabulaire du droit et des sciences humaines, mais pas en tant que telle dans le code pénal.

Un commentaire

  1. Homicide ne suffit donc pas? Dans ce vocable, le « hom » de homicide signifie l’homme en tant qu’espèce, donc autant homme que femme. Pas besoin d’un vocable fabriqué par des sectes féminines.

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