Accueil | A la Une | [Cyclisme] Dan Lorang : «C’est ça, le nouveau cyclisme…»

[Cyclisme] Dan Lorang : «C’est ça, le nouveau cyclisme…»


Dan Lorang : «On cherche des jeunes athlètes, de 15 ou 16 ans. C’est la tendance actuelle…»

Dan Lorang, en charge de la performance chez Bora-Hansgrohe évoque son rôle, l’évolution de son sport, Primoz Roglic et son compatriote Bob Jungels !

Dan Lorang, l’entraîneur luxembourgeois de l’équipe Bora-Hansgrohe où évolue Bob Jungels, a pris du galon cet hiver. Il est placé juste en dessous de Ralph Denk, le manager. Au même rang que Rolf Aldag, patron des directeurs sportifs. Nous l’avons rencontré début janvier lors de la présentation de l’équipe allemande à Majorque.

On peut dire que désormais vous êtes l’homme fort de l’encadrement derrière Ralph Denk ?

Dan Lorang : Sur le plan sportif, je suis effectivement à égalité avec Rolf (Aldag) pour diriger la partie sportive. Rolf est responsable des directeurs sportifs, des mécaniciens et du matériel. Moi, je suis responsable de ce qui est en relation avec les performances humaines, les nutritionnistes, le staff médical. Nous sommes une bonne équipe. Avec Ralph Denk, nous prenons toutes les décisions sportives.

Le cyclisme est justement en pleine évolution sur le plan de la nutrition et les méthodes d’entraînement. On a l’impression que le sport et le cyclisme continuent de progresser en ce qui concerne la préparation. Quel regard portez-vous sur ce phénomène qui vous concerne directement ?

Je crois que si on regarde sur les cinq dernières années, effectivement, les performances deviennent de plus en plus hautes. Les détails qui nous viennent de la science, et les méthodes avec lesquelles les équipes travaillent, deviennent de plus en plus pointus. La nutrition, le bon entraînement, la récupération. Il y a beaucoup de choses qui sont devenues accessibles à tout le monde. Sur internet, on parvient à trouver beaucoup d’informations sur tous ces sujets. Il suffit de regarder ce qui est applicable à votre équipe et de mettre des priorités afin de travailler tous ces détails. En ce qui concerne la base, je pense que toutes les équipes savent faire. On peut faire la différence si vous avez les meilleurs athlètes. Et les meilleures façons de faire. Il s’agit d’une course dans la course, il faut être le premier dans tel ou tel domaine. D’avoir les conseils de tel ou tel expert. C’est le cyclisme d’aujourd’hui, ce n’est pas un miracle, mais il s’agit de beaucoup de sciences.

Chaque équipe a peur d’être en retard pour trouver le prochain gagnant du Tour de France

Ce qui veut dire que par exemple, en ce qui concerne votre équipe Bora, avec Primoz Roglic en tant que leader pour le Tour, vous vous êtes repositionnés dans la course avec les plus grandes équipes, UAE et Visma ?

Si on regarde les valeurs de puissance par exemple, vous trouvez des athlètes qui sont extraordinaires. Comme Primoz Roglic. Avant qu’il ne nous rejoigne, on a regardé ses valeurs. Et on a vu qu’il était plus fort que les athlètes qui étaient jusque-là chez nous. Il y a une différence. Ce n’est pas seulement une question de stratégie en course. Vous avez une chance de remporter de grandes courses si vous êtes capable d’élever votre niveau personnel. Pour chaque coureur, il y a des limites. C’est notre rôle de trouver des talents qui sont capables d’arriver au même niveau que les (Jonas) Vingegaard, (Tadej) Pogacar et Primoz (Roglic). Aujourd’hui, on cherche des jeunes athlètes, de 15 ou 16 ans. C’est la tendance actuelle. Et chaque équipe a peur d’être en retard pour trouver le prochain gagnant du Tour de France.

L’autre clé n’est-elle pas d’ordre psychologique pour les athlètes de haut niveau ?

On a le sentiment que cela devient de plus en plus difficile. Si on regarde les nouvelles, on se rend compte que de plus en plus de jeunes athlètes souffrent de problèmes d’ordre mental. Il y a une raison. La question est de savoir si le sport est plus dur aujourd’hui. Est-ce que les jeunes athlètes ne sont pas préparés pour cette vie d’athlète professionnel? Je n’ai pas de solution pour l’instant, mais c’est effectivement ce qu’on peut observer. Les saisons deviennent longues, c’est dur pour de se retrouver trois ou quatre semaines de suite sur la route, de se couper de leurs familles…

Je supervise et je regarde ce qui est important pour notre équipe

Votre métier d’entraîneur a-t-il changé ces dernières années ?

J’ai commencé dans l’équipe comme entraîneur où j’avais en charge entre huit et neuf coureurs. Je suis donc dans un nouveau rôle de coordination. Il faut avoir des experts dans des départements différents et créer la structure pour que ces personnes travaillent ensemble. Aujourd’hui, je suis devenu généraliste, je ne suis plus un expert dans tel ou tel domaine. Je supervise et je regarde ce qui est important pour notre équipe. Je regarde si telle ou telle université peut être intéressante pour tel ou tel sujet. Je gère cela pour obtenir le meilleur résultat possible.

Pour en revenir à Primoz Roglic, qui aura pour mission d’essayer de remporter le Tour de France, est-ce difficile d’avoir cette ambition en seulement quelques mois ?

On a embauché l’entraîneur historique de Primoz dans notre équipe, Marc Lamberts. Il travaillait avec Primoz depuis dix ans. Nous étions également satisfaits, car c’est un expert dans son domaine avec une grande expérience puisqu’il entraînait aussi Wout van Aert. On peut se comparer avec Jumbo-Visma, qui l’an passé, a remporté trois grands Tours. On peut regarder notre potentiel et surtout, on peut regarder où on peut s’améliorer. Nous ne voulons pas copier Visma. C’est très intéressant et c’est nécessaire d’ouvrir les yeux. Cela nous permet également de ne pas perdre de temps en ce qui concerne l’athlète, sa physiologie, son comportement, sa psychologie. Cela nous donne une bonne chance de pouvoir viser le Tour de France.

Nous aimons des coureurs comme Bob (Jungels) capables de travailler pour l’équipe et qui restent ambitieux pour eux-mêmes

Y-a-t-il des nouveautés que Primoz Roglic et son entraîneur vous ont déjà apportées ?

Nous étions surpris, car la plus grande découverte est que l’équipe néerlandaise est très conséquente dans ce qu’ils font. Par exemple, s’il faut faire trois semaines de stage d’altitude, ce sont trois semaines. Pas 18 jours. Pas quatre semaines, non. Trois semaines. Ils exécutent leurs idées sur le terrain. Je me suis rendu compte que là, nous devions être un peu plus forts. Nous sommes une équipe qui n’est pas très stricte avec les coureurs. Mais nous voulons gagner, alors on doit changer. Nous ne voulons pas être Visma. Mais aller dans cette direction. Marc (Lamberts), qui est là depuis quelques mois déjà, nous a expliqué que nous avions le potentiel. Mais il faut être capable d’utiliser ça. C’est le grand challenge.

En ce qui concerne votre compatriote, Bob Jungels, qui fera sa deuxième saison chez Bora, qu’attendez-vous de lui ?

Quand on parle avec lui, on remarque qu’il est content d’être coureur cycliste professionnel, qu’il aime cette vie. Je crois aussi qu’il a réalisé que le niveau est plus dur aujourd’hui qu’il ne l’était voici encore de cela quelques années. Il faut faire plus que les années précédentes. Plus de camps d’altitude. Plus de temps dans le Sud. Être plus précis encore sur la nutrition, le poids. Autrement, il n’a pas une chance. C’est un coureur qui est capable d’être capitaine de route. C’est ce que nous avons remarqué et c’était une des raisons pour lesquelles on l’avait engagé. Nous en manquons de ces coureurs qui peuvent prendre des initiatives et diriger une équipe. Il a cette compétence. Mais pour jouer de cette compétence, il faut avoir le niveau, être capable d’être là, jusque dans la dernière montée. Il sait qu’il lui faut beaucoup travailler. Bob a aussi des ambitions pour gagner des courses. Nous aimons ce type de coureurs capables de travailler pour l’équipe et qui restent ambitieux pour eux-mêmes. Bob va faire un stage d’altitude personnel (NDLR : l’entretien étant réalisé début janvier, il l’a donc effectué jusqu’à ces derniers jours). Il s’investit personnellement et c’est nécessaire. Ne pas se contenter seulement de qu’offre ton équipe. Comme il le fait. C’est ça, le nouveau cyclisme…

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.