Ioulia Navalnaïa s’est rendue ce lundi au Conseil des affaires étrangères de l’UE. Elle y a rencontré notamment Xavier Bettel ainsi que les autres ministres européens qui souhaitent envoyer un message de soutien à l’opposition russe.
Trois jours après la mort dans une prison russe de son époux, l’opposant russe Alexeï Navalny, Ioulia Navalnaïa rencontre ce lundi à Bruxelles les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne, dont Xavier Bettel.
« Lundi, j’accueillerai Ioulia Navalnaïa au Conseil des affaires étrangères de l’UE », a déclaré dimanche soir le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell sur X. « Les ministres de l’UE enverront un message fort de soutien aux combattants de la liberté en Russie et honoreront la mémoire d’Alexeï Navalny », a-t-il écrit.
Ioulia Navalnaïa, 47 ans, a déclaré qu’elle tenait le président russe Vladimir Poutine « personnellement responsable » de sa mort et appelé la communauté internationale à s’unir pour infliger une défaite à « ce régime terrifiant ».
Le ministre italien des Affaires étrangères Antonio Tajani a estimé que les déclarations de Ioulia Navalnaïa « vont aider tous les Européens à mieux comprendre quel type de système violent nous devons affronter et contenir en Ukraine ». « Cela nous fait ressentir la menace qui pèse sur les citoyens russes et toutes les régions de notre Europe, un continent où la violence, la brutalité et la guerre ont été rétablies d’une manière honteuse et irresponsable », a ajouté Antonio Tajani dans un communiqué.
Durant l’entretien, Xavier Bettel a tenu à présenter ses condoléances à l’épouse de l’opposant politique Alexei Navalny. “Cette triste nouvelle nous rappelle que le régime de Vladimir Poutine ne cause pas seulement des victimes en Ukraine, mais également dans son propre pays. Je pense aujourd’hui à sa famille ainsi qu’à tous les prisonniers politiques russes, qui se battent pour une Russie libre et démocratique », a-t-il déclaré.
On Monday, I will welcome Yulia Navalnaya at the EU Foreign Affairs Council.
EU Ministers will send a strong message of support to freedom fighters in Russia and honour the memory of Alexi @navalny.
— Josep Borrell Fontelles (@JosepBorrellF) February 18, 2024
Des centaines de personnes arrêtés
Ce week-end, la police russe a arrêté dans des dizaines de villes des centaines de personnes venues déposer des fleurs et allumer des bougies en l’honneur de Alexeï Navalny aux mémoriaux des victimes des répressions de l’ère stalinienne.
Rien qu’à Saint-Pétersbourg, dans le nord-ouest, les juges ont condamné ce week-end 154 de ces personnes à des peines allant jusqu’à 14 jours de prison pour avoir violé la stricte législation encadrant les manifestations, selon les décisions rendues publiques par le service de presse des tribunaux locaux.
Des groupes de défense des droits humains et des médias indépendants ont fait état de plusieurs condamnations similaires dans d’autres villes. Les manifestations contre le Kremlin et les autres actions publiques d’opposition au régime sont illégales en Russie en vertu notamment d’une législation interdisant les rassemblements non autorisés.
L’ambassadrice américaine en Russie, Lynne Tracy, a, elle, dit s’être recueillie dimanche devant un mémorial improvisé à Moscou, au niveau de la pierre de Solovetsky, monument aux victimes de la répression politique. Des barrières ont par ailleurs été installées dimanche autour d’un autre mémorial de la capitale, devant un monument baptisé « Mur du deuil », a constaté un journaliste de l’AFP.
Plusieurs dizaines de policiers ont monté la garde, mais quelques personnes ont été autorisées à s’approcher du mémorial pour y déposer des fleurs.
« Couvrir leurs traces »
Les proches d’Alexeï Navalny ont quant à eux qualifié samedi les autorités russes de « tueurs » cherchant à « couvrir leurs traces » en refusant de leur remettre son corps, le Kremlin gardant le silence malgré les accusations de l’Occident et des rassemblements en hommage à l’opposant.
Alexeï Navalny était le représentant de l’opposition le plus marquant en Russie, où il avait acquis une grande popularité grâce à ses dénonciations de la corruption sous le régime de Vladimir Poutine. Le chef de l’Etat russe, qui n’a jamais mentionné Alexeï Navalny par son nom, était en visite dans l’Oural vendredi, et n’a pas évoqué sa mort.
Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a accusé les dirigeants occidentaux d’avoir eu des réactions « absolument inacceptables » et « hystériques » à la mort d’Alexeï Navalny, qui a provoqué la consternation et une grande émotion dans le monde. Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a, lui, appelé dimanche à ne pas tirer de conclusions hâtives sur les causes de la mort de Alexeï Navalny.
« Poutine a tué mon mari »
« Je pense que c’est une question de bon sens (…) Si la mort était suspecte, il faut d’abord enquêter pour trouver de quoi le citoyen est mort », a déclaré Lula à la presse à Addis Abeba, où il participe à un sommet de l’Union africaine, ajoutant: « si vous jugez maintenant et dites que je ne sais qui a ordonné l’assassinat et ce n’était pas lui, vous devrez ensuite vous excuser. Pourquoi se précipiter pour accuser ? ».
La veuve de l’opposant russe Alexeï Navalny, Ioulia Navalnaïa, a accusé le président russe Vladimir Poutine d’avoir « tué » son mari et promis de poursuivre son « oeuvre », dans une vidéo publiée lundi. « Il y a trois jours, Vladimir Poutine a tué mon mari, Alexeï Navalny. Poutine a tué le père de mes enfants », a-t-elle dit dans cette vidéo publiée sur les réseaux sociaux. « Avec lui, (Poutine) a voulu tuer notre espoir, notre liberté, notre futur », a asséné Ioulia Navalnaïa.
Pendant son emprisonnement, Alexeï Navalny a été « malmené, coupé du monde » et « pourtant, il n’a pas abandonné », a-t-elle dit. « Mon mari ne pouvait pas être brisé, et c’est pour cela que Poutine l’a tué », a affirmé Ioulia Navalnaïa. Elle a promis de découvrir « qui avait exécuté ce crime » et dans quelles circonstances. « Je poursuivrai l’oeuvre d’Alexeï Navalny. Je continuerai pour notre pays, avec vous. Et je vous appelle tous à vous tenir près de moi (…) Ce n’est pas une honte de faire peu, c’est une honte de ne rien faire, c’est une honte de se laisser effrayer », a-t-elle déclaré. Sa notoriété avait poussé certains des partisans d’Alexeï Navalny à lui rêver un avenir politique, même avant que l’opposant et militant anticorruption ne soit derrière les barreaux.
« Nous devons nous unir pour frapper d’un seul coup Poutine, ses amis, les voyous en épaulettes, les courtisans et les tueurs qui veulent paralyser notre pays », a-t-elle dit. Le jour de l’annonce de la mort d’Alexeï Navalny, elle avait pris la parole, les larmes aux yeux, demandant déjà à ce que Vladimir Poutine soit « puni ».
Seul Lula semble faire preuve de bon sens.