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Agriculture : appel à lever les blocages après de nouvelles annonces d’Attal


Gabriel Attal, pour sa troisième salve d'annonces en une semaine, a égrené des mesures qui selon lui répondent "à une grande partie des attentes" des agriculteurs et sont "de nature" à calmer la contestation. (Photo AFP)

Les syndicats majoritaires FNSEA et Jeunes agriculteurs ont appelé jeudi à suspendre les blocages en France mais ont promis de rester vigilants sur l’application de nouvelles mesures annoncées peu auparavant par le Premier ministre Gabriel Attal.

« Nous avons décidé qu’à l’heure actuelle, au vu de tout ce qui avait été annoncé (…), il faut qu’on change de modes d’action et donc nous appelons nos réseaux (…) à suspendre les blocages et à rentrer dans une nouvelle forme de mobilisation », a indiqué le président des JA Arnaud Gaillot, aux côtés du patron de la FNSEA Arnaud Rousseau, lors d’une conférence de presse à Paris au siège de la FNSEA.

Parmi les conditions posées pour ne pas reprendre le mouvement: de « premiers résultats » avant le Salon de l’agriculture (24 février-3 mars) puis l’adoption d’une loi d’orientation et d’avenir agricole ainsi que de mesures européennes d’ici à juin. A défaut, « nous n’hésiterons pas à re-rentrer dans un mouvement de mobilisation d’ampleur générale », a dit Arnaud Gaillot.

Arnaud Rousseau a de façon générale salué « l’écoute » du Premier ministre « pour essayer de comprendre ce que sont nos enjeux, nous recevoir, échanger, discuter et finalement annoncer en plusieurs salves des mesures d’urgence ». Mais « dans le même temps, nous nous interrogeons sur la surdité de l’Europe ».

Une enveloppe de 150 millions d’euros en soutien fiscal

Peu auparavant, Gabriel Attal, pour sa troisième salve d’annonces en une semaine, a égrené des mesures qui selon lui répondent « à une grande partie des attentes » des agriculteurs et sont « de nature » à calmer la contestation.

« Nous voulons être souverains, souverains pour cultiver, souverains pour récolter, souverains pour nous alimenter », a résumé Gabriel Attal, promettant d’inscrire « l’objectif de souveraineté (alimentaire) dans la loi » et de consacrer « dans le code rural l’agriculture comme un intérêt fondamental de la nation ».

Parmi les annonces de jeudi figure un renforcement des lois Egalim qui visent à empêcher que les producteurs ne fassent les frais de la guerre des prix féroce entre supermarchés d’une part, et distributeurs et fournisseurs de l’agro-industrie d’autre part. Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a précisé que « toutes les grandes chaînes de supermarchés » seront « contrôlées dans les prochains jours ».

Gabriel Attal a également annoncé une enveloppe de 150 millions d’euros en soutien fiscal et social aux éleveurs. M. Le Maire avait déjà annoncé une mesure de défiscalisation pour les éleveurs bovins en octobre. Mais la Fédération nationale bovine (FNB) avait fait part la semaine dernière d’une « déception extrêmement forte » des éleveurs à ce sujet.

Pour faciliter le renouvellement des générations, Gabriel Attal a également annoncé le relèvement des seuils d’exonération sur les successions agricoles. Il s’est engagé à assouplir les règles sur les prairies et à dit vouloir empêcher l’importation en France de fruits et légumes traités avec le pesticide thiaclopride, interdit en Europe.

« On va se concerter pour voir quelle suite donner au mouvement »

Sur les phytosanitaires, le gouvernement a aussi lâché du lest, promettant notamment que le plan Ecophyto visant à réduire l’usage des pesticides serait mis « en pause ». Il a par ailleurs demandé que la question de la limitation des importations de céréales ukrainiennes dans l’Union européenne soit incluse dans une négociation. L’UE n’a pas intégré les céréales dans une liste de produits « sensibles » sur lesquels les importations peuvent être freinées.

La question est désormais de savoir si sur le terrain, les agriculteurs répondront aux consignes, d’autant que nombre de manifestants ne sont pas syndiqués. « Le ton a changé, soyons positifs. On a enfin l’impression que le Premier ministre a pris conscience de l’enjeu : le ton est plus solennel, plus respectueux à notre égard. Nous pensons que nous avons été enfin entendus », a dit Michel Joux, président de la section Auvergne Rhône-Alpes de la FNSEA.

« Mais rien n’est gagné, on va se concerter pour voir quelle suite donner au mouvement », a-t-il ajouté. « Il y a des avancées », estime de son côté Nicolas Merle, président des Jeunes Agriculteurs Auvergne-Rhône-Alpes. « Mais on est attentifs: les infos restent encore vagues, il va falloir affiner et surtout analyser en détail tout ce qui a été dit »

Gabriel Attal avait longuement reçu ces jours derniers la FNSEA, notamment lundi soir pendant trois heures trente puis près de trois heures mardi soir, ainsi que mercredi soir. Il a aussi reçu mercredi matin les représentants de la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole, et de la Coordination rurale, deuxième syndicat.

Plus de 6 000 manifestants

Le président Emmanuel Macron s’est de son côté entretenu dans la matinée avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen au sujet de l’agriculture, avant un sommet européen extraordinaire consacré au budget de l’UE et à l’aide à apporter à l’Ukraine.

Les aides dégagées mercredi par le gouvernement français comme les concessions de la Commission européenne (sur les jachères et les importations ukrainiennes) n’avaient pas semblé trouver grâce aux yeux de la profession, également mobilisée en Italie, Espagne, Allemagne et depuis jeudi au Portugal.

« Mille tracteurs ou engins agricoles » bloquent plusieurs rues de la capitale belge, siège des institutions européennes, a déclaré à l’AFP un porte-parole de la police, précisant que les manifestants provenaient essentiellement de Belgique. Les organisateurs ont expliqué vouloir dénoncer « les folies qui menacent l’agriculture ». En France, les blocages de routes, les opérations escargot ou les manifestations devant les supermarchés se poursuivent jeudi.

Selon une source policière, à la mi-journée, plus de 6 000 manifestants et 3 500 engins étaient mobilisés sur un peu moins de 100 blocages.