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LuxLeaks : Raphaël Halet demande réparation devant la Cour européenne des droits de l’Homme


Raphaël Halet prend la parole le 15 mars 2017 devant le tribunal de Luxembourg où il était poursuivi pour ses révélations sur l'évasion fiscale. (photo AFP)

La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a accepté la requête du lanceur d’alerte condamné par la justice luxembourgeoise après ses révélations sur le système d’évasion fiscale dont bénéficiait des multinationales au Grand-Duché.

« La requête de Raphaël Halet à la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) contre le Luxembourg a été acceptée. C’est un grand pas depuis 2012 et le début de son combat contre l’évasion fiscale », a annoncé le groupe de soutien du lanceur d’alerte dans un communiqué, lundi matin. La juridiction qui siège à Strasbourg devra dire si la condamnation de Raphaël Halet dans l’affaire LuxLeaks à 1.000 euros d’amende par la justice luxembourgeoise porte atteinte à sa liberté d’expression au sens de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme.

Raphaël Halet est, avec Antoine Deltour, l’un des anciens salariés français de PWC Luxembourg qui avaient soustrait des milliers de documents fiscaux mettant en évidence un vaste système d’évasion fiscal organisé par l’administration en faveur de multinationales. Ils les avaient transmis à un an d’intervalle au journaliste français Edouard Perrin, membre du consortium international de journalistes d’investigation ICIJ, l’organisation à l’origine des révélations LuxLeaks à l’échelle mondiale, le 5 novembre 2014.

Déclarations fiscales d’Amazon et ArcelorMittal

Raphaël Halet était agent administratif au département Tax de PWC. Il avait contacté le journaliste après la diffusion en 2012 d’une enquête de Cash Investigation sur France 2, portant sur les tax rulings, des accords fiscaux anticipés, transmis par Antoine Deltour. Raphaël Halet avait soustrait 14 déclarations fiscales qui illustraient l’imposition minimale dont bénéficiaient des groupes comme Amazon, Ikea ou ArcelorMittal. Ces déclarations fiscales avaient donner matière à un second volet de Cash Investigation sur cette question.

Inculpé par la justice luxembourgeoise en janvier 2015, Raphaël Halet avait été poursuivi au même titre qu’Antoine Deltour et Edouard Perrin. Le 29 juin 2016, Raphaël Halet était condamné en première instance à 9 mois de prison avec sursis et 1.000 euros d’amende. Cette peine avait été réduite à 1.000 euros  d’amende par la Cour d’appel de Luxembourg le 15 mars 2017.

« Le Luxembourg sur le banc des accusés »

Les juges de l’appel avaient estimé que les déclarations fiscales révélées par le lanceur d’alerte « ne faisaient qu’entériner le résultat de l’enquête journalistique (…), mais ne fournissaient aucune information essentielle, nouvelle et inconnue jusqu’alors », rappelle la CEDH dans un communiqué. La justice luxembourgeoise avait cependant reconnu la bonne foi à Raphaël Halet mais estimé qu’il avait occasionné un préjudice à PWC.

Tout comme Antoine Deltour, il s’était pourvu en cassation. Mais son pourvoi avait été rejeté en janvier 2018  tandis qu’Antoine Deltour voyait pleinement reconnu son statut de lanceur d’alerte. Ayant épuisé le dernier recours devant les juridictions nationales du Luxembourg, Raphaël Halet avait annoncé qu’il saisirait la Cour européenne des droits de l’Homme, qui a accepté sa requête, comme cela a été annoncé lundi matin.

« Aujourd’hui dans l’affaire LuxLeaks, c’est donc le Luxembourg qui est sur le banc des accusés et doit répondre de violation de la liberté d’expression d’un citoyen français lanceur d’alerte », écrit son groupe de soutien. Par sa requête, Raphaël Halet entend obtenir réparation par la reconnaissance du statut de lanceur d’alerte ayant agi dans le seul intérêt général.

Manque à gagner de 50 milliards  

Les LuxLeaks avaient bénéficié d’une large diffusion le 5 novembre 2014 quand une quarantaine de médias dans le monde, fédérés par l’ICIJ, avaient révélé la pratique des tax rulings conclus entre le fisc luxembourgeois et des centaines de multinationales.

Des chercheurs évaluent à 50 milliards d’euros les pertes fiscales subis par d’autres pays à cause des tax rulings révélés par les LuxLeaks. Ceux-ci portaient sur les seuls accords négociés par le cabinet PWC entre 2005 et 2010. Ce scandale a largement contribué à porter le thème de la justice sociale dans l’opinion publique.

Sur le plan politique, il a notamment débouché le 6 octobre 2015 sur l’adoption par les ministres européens des Finances d’un accord sur l’échange automatique d’information sur les tax rulings entre les administrations fiscales des États membres de l’UE .

Fabien Grasser

Le site internet de Raphaël Halet

 

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