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Le pavillon luxembourgeois pas ménagé par les pirates


Il ne fait pas bon naviguer dans le golfe de Guinée ou dans le détroit de Malacca. (Photo : archives LQ/Isabella Finzi)

C’est la réponse à une question parlementaire publiée mardi qui nous apporte cette constatation maritime. Elle permet de se rappeler que le Luxembourg entretient un pavillon sous lequel naviguent un peu plus de 200 navires. Et ils n’échappent pas aux attaques de pirates.

La députée Lydia Mutsch a voulu en savoir plus sur les attaques de pirates après avoir appris celle dont avait fait l’objet, le 14 mars dernier, dans les eaux internationales au large du Nigeria, le navire Bourbon Evolution 802 battant pavillon luxembourgeois. L’issue en a été heureuse, puisque, rapporte la députée, deux navires de patrouille en opération dans la région ont pu intervenir rapidement et mettre en fuite la dizaine de pirates, permettant ainsi à l’équipage de sortir sain et sauf de l’incident, après s’être enfermé dans la « citadelle », un refuge prévu à cet effet.

Cette attaque n’est bien sûr pas la première et la réponse du ministre Franz Fayot nous renseigne sur les statistiques en la matière. On apprend donc qu’alors que le pavillon luxembourgeois a été créé en 1990, il n’a eu affaire pour la première fois à des pirates qu’en juillet 2010. Depuis, cela a été le cas à neuf autres reprises. Six attaques ont été perpétrées dans le golfe de Guinée par des pirates «très probablement d’origine nigériane».

Redoutables Nigérians

Pourquoi le golfe de Guinée? Deux armateurs luxembourgeois y sont présents en permanence avec des navires. Il s’agit de la «zone la plus dangereuse du monde». Et enfin, «les autorités nigérianes refusent d’autoriser la protection des navires par des gardes armés privés embarqués» dans les eaux de zone économique exclusive (entre 12 et 200 miles nautiques des côtes). Le ministre précise que les pirates y sont «très violents et se spécialisent dans les kidnappings de membres d’équipage avec demande de rançon ou dans le détournement de navires citernes avec vol de produits pétroliers vendus ensuite au marché noir».

L’autre point chaud est le détroit de Malacca entre l’Indonésie et la Malaisie, une zone de très forte circulation maritime, où trois autres faits (dont une tentative déjouée) se sont produits. Les navires qui font les allers-retours Europe-Asie sont pratiquement obligés de passer dans cette région, Singapour étant un des ports le plus visités dans le monde. Mais là, «les États côtiers sont tous très actifs dans le combat contre la piraterie».

Et les pirates asiatiques, nous dit le ministre, sont moins brutaux : «Les pirates montent à bord des navires par la menace armée et ils s’emparent de la caisse du capitaine et des objets de valeurs qu’ils trouvent sur les marins ou dans les cabines. Ils repartent ensuite rapidement.»

Pour ce qui est du navire Bourbon Evolution 802, lors de la mauvaise rencontre effectuée il y a quelques jours, il affichait un niveau de sûreté minimal. Si le Commissariat aux affaires maritimes (CAM), autorité luxembourgeoise qui a la haute main en la matière, l’avait jugé bon, le navire aurait pu prendre, de manière limitée pour ne pas entraver l’exploitation du navire, des mesures additionnelles «en raison d’un risque accru» ou passer au niveau encore supérieur en cas « d’incident probable ou imminent ».

Des gardes armés pour se défendre

Par ailleurs, ajoute le ministre de l’Économie, le CAM transmet de façon systématique les messages d’alerte liés aux menaces de pirates émises par diverses organisations internationales ou par d’autres registres maritimes.

Au-delà de ces précautions, la députée Lydia Mutsch s’est aussi posé la question de la possibilité d’actionner la légitime défense à bord des navires battant pavillon luxembourgeois. Autrement dit, quels recours ont-ils pour ne pas être des proies vulnérables à la merci des bandits des mers? Déjà, répond le ministre, l’Organisation maritime internationale (OMI) interdit l’option d’armer les marins. À chacun son métier, serait-on tenté de dire.

L’OMI n’interdit cependant pas le recours à des gardes armés placés à bord des navires. Et c’est à «l’État de pavillon de définir le cadre légal approprié pour cette option». Au Luxembourg, ces gardes armés employés par des sociétés autorisées ont le droit de faire recours à la légitime défense selon un scénario bien défini respectant notamment la proportionnalité entre la riposte et la menace.

Enfin, Lydia Mutsch fait état d’un projet de loi (n ° 7706) destiné à mettre en œuvre une convention internationale prescrivant des mesures relatives à la sûreté maritime et à la sûreté portuaire (convention SOLAS). Mais le ministre semble douter qu’il puisse apporter une réponse décisive au problème.

Il mise un peu plus sur l’augmentation prévue par ce projet de loi des sanctions pénales applicables aux compagnies maritimes pour manquement à leurs obligations en matière de sûreté. Mais, dit le ministre, «il faut souligner que jusqu’à présent aucune poursuite n’a été entreprise» sur cette base.

Manuel Santos

 

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