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[Justice] Faux prince, vrais braqueurs…


En débarquant chez l'homme d'affaires, le prétendu prince et son «chef de sécurité» avaient montré leurs réelles intentions. Le début d'une séquestration de 24h accompagnée de menaces de mort. (illustration AFP)

L’affaire sur laquelle planche depuis mardi matin la 13e chambre criminelle est digne d’un film policier. Fin 2012, un homme d’affaires qui croyait recevoir un prince arabe pour lui vendre des montres de luxe s’était retrouvé face à deux braqueurs armés…

Un homme d’affaires pensait accueillir un jeune prince d’Orient cherchant à acheter des montres de luxe pour son entourage. L’offre s’annonçait alléchante. Il aurait été prêt à investir 2,7 milliards. Lors d’une rencontre avec son «chef de sécurité», à Paris, les derniers détails avaient été fignolés. Comme l’éminent client ne voulait pas se montrer en public, une rencontre à l’adresse privée du négociant de montres, montée Saint-Crépin à Luxembourg, avait donc été programmée. Mais cette belle histoire a fini par virer au cauchemar.

Car en ouvrant sa porte le 12 décembre 2012 en fin d’après-midi, l’homme d’affaires a dû réaliser que toute cette histoire de prince avait été inventée. En débarquant chez lui, le prétendu prince et son «chef de sécurité» avaient montré leurs réelles intentions. C’était le début d’une séquestration de 24h accompagnée de menaces de mort. Vingt-quatre heures durant lesquelles la victime, vêtue d’un gilet explosif, sera notamment contrainte de fournir aux malfaiteurs ses cartes bancaires et ses codes secrets – ils retireront plus de 12 000 euros… Les aigrefins avaient également exigé de leur otage qu’il convoque pour le lendemain des bijoutiers renommés (luxembourgeois et internationaux) pour une vraie-fausse vente de montres dans une fiduciaire située rue de Mühlenbach.

Ligoté à son lit avec des cravates

La victime, qui tentera à un moment de se libérer, recevra un coup d’haltère. Bref, grièvement blessé à l’oreille et avec une côte cassée, l’homme passera finalement la nuit ligoté à son lit avec des cravates, toujours en compagnie de ses ravisseurs. Ces derniers parviendront encore à se faire remettre 140 000 euros en liquide avant de prendre le chemin en direction de la fiduciaire…

On est le 13 décembre en fin d’après-midi lorsqu’ils embarquent l’homme d’affaires à bord de sa propre Porsche 911 pour rejoindre les vendeurs de montres de luxe conviés au rendez-vous. Le «chef de sécurité» continue son jeu et va à leur rencontre pour s’assurer qu’ils ont bien les fameux bijoux et montres.

C’est après que les malfaiteurs passeront à l’action. Le modus operandi ne variera guère. Une fois dessaisis de leur portable, les huit bijoutiers et collaborateurs seront dépouillés l’un après l’autre, puis ligotés à l’aide de cravates et de ruban adhésif dans la chaufferie située à la cave. Ensemble avec la première victime.

Les deux braqueurs armés feront main basse sur une quinzaine de montres de luxe d’un montant estimé à au moins 1,2 million d’euros avant de prendre la fuite à bord d’une BMW, mais avec un collaborateur de la fiduciaire en otage. Un otage qu’ils relâcheront près de Paris le 14 décembre au petit matin. Ils auront au préalable opéré un changement de véhicule à l’angle des rues Saint-Zithe et Goethe… avant de filer vers la France.

Un braqueur dans la baignoire

D’après le témoignage de la première victime récolté par la police, les auteurs auraient fait preuve d’un certain professionnalisme. À son domicile, ils auraient porté des gants, auraient régulièrement essuyé leurs traces… et même démonté un fusil de décoration pour vérifier s’il n’était pas opérationnel. «Mais ils ont commis des erreurs», relève un enquêteur de la police technique.

Les enquêteurs avaient en effet été en mesure de trouver une trace d’appui à une fenêtre du 3e étage. Les malfrats avaient également dormi dans un lit où ils avaient laissé les draps, l’un des auteurs avait même pris le temps de prendre un bain… des traces qui ne seront pas insignifiantes pour la suite de l’enquête.

Les quatre hommes qui comparaissent depuis mardi devant la 13e chambre criminelle ont tous été arrêtés en début d’année 2013. Tandis que les prévenus Ali A. (48 ans) et Redda B. (49 ans), condamnés pour d’autres affaires criminelles en France et actuellement toujours incarcérés, sont poursuivis pour être les deux auteurs du braquage et de la prise d’otages, Mohamed F. (38 ans) et Daniel V. (33 ans) sont principalement poursuivis pour avoir recelé les objets volés et extorqués. Ils sont sortis de prison fin 2014. Suite du procès ce mercredi après-midi.

Fabienne Armborst

Procès sous haute sécurité

Pour ce procès qui doit s’étirer jusqu’à la mi-décembre, le prévenu Redda B. a spécialement été déféré de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, en région parisienne. Le quadragénaire n’est pas un inconnu de la justice française. Un certain nombre de condamnations noircissent déjà le casier judiciaire de cet homme à la carrure imposante et au crâne dégarni.

Autant dire que la police luxembourgeoise a renforcé son dispositif de sécurité. Comme cela avait déjà été le cas pour le procès du braquage de G4S, des policiers cagoulés et armés circulent dans les couloirs du tribunal d’arrondissement.

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