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L’idéologue et numéro deux des Khmers rouges est mort


Nuon Chea était l'un des principaux dirigeants khmers rouges, dont le régime fit quelque deux millions de morts entre 1975 et 1979. (photo AFP)

L’idéologue et numéro deux des Khmers rouges, Nuon Chea, est mort dimanche à 93 ans, a annoncé dimanche un porte-parole du tribunal cambodgien devant lequel il avait été condamné pour « génocide » et « crimes contre l’humanité ».

« Nous sommes en mesure de confirmer que l’accusé Nuon Chea (…) est décédé le soir du 4 août 2019 », a déclaré le porte-parole, Neth Pheaktra, sans apporter de précisions sur les causes du décès.

Nuon Chea était l’un des principaux dirigeants khmers rouges, dont le régime fit quelque deux millions de morts entre 1975 et 1979. En 2014, il avait été condamné à la prison à perpétuité pour « crimes contre l’humanité », une peine confirmée en 2016 en appel.

Il avait également été reconnu coupable en 2018 de « génocide » à l’encontre de Vietnamiens, de membres de la communauté des Chams et d’autres minorités religieuses. Ce chef d’accusation ne concernait pas les massacres, fussent-ils de masse, des Khmers par les Khmers qui ne sont pas considérés par les Nations unies comme un génocide.

Le redouté «frère Numéro deux»

 

Nuon Chea était le redouté « frère Numéro deux », l’idéologue de la machine à tuer des Khmers rouges qui plongea le Cambodge dans l’horreur entre 1975 et 1979. Le bras droit de Pol Pot est l’un des trois dignitaires du régime ultra-maoïste à avoir été jugé.

 

Se cachant souvent aux procès derrière des lunettes noires, Nuon Chea n’a jamais reconnu sa responsabilité dans les atrocités. En 2013, dans une déclaration lue au tribunal, il avait ainsi imputé les crimes à ses subordonnés qualifiés de « traîtres ». « Je ne leur ai jamais donné l’instruction de maltraiter, tuer des gens, priver de nourriture ou commettre un génocide », avait-il affirmé.

De son vrai nom Long Bunruot, Nuon Chea est né en 1926 dans une famille sino-khmère installée dans la province de Battambang, dans le nord-ouest du Cambodge. Il étudie le droit à l’université Thammasat à Bangkok dans les années 1940, travaille pour le ministère thaïlandais des Affaires étrangères, devient membre du Parti communiste du pays.

De retour au Cambodge, il intègre la résistance contre la puissance coloniale française et aide à l’organisation du Parti communiste du Kampuchéa au lendemain de l’indépendance, en 1954. Il consolide les structures du parti, puis s’enfuit de Phnom Penh en 1970, après le putsch du général pro-américain Lon Nol.

«Si nous les avions laissés vivre, la ligne du parti aurait été détournée»

Numéro deux du commandement militaire des Khmers rouges de 1970 à 1975, il est aussi son commissaire politique en chef, chargé à partir de leur prise de pouvoir, en 1975, de traquer les ennemis de la révolution.

Considéré comme une personnalité très secrète, il apparaît, d’après les documents que laissera le régime à sa chute, « au cœur du système de purge », relève Solomon Kane, auteur d’un Dictionnaire des Khmers rouges.

 

Nuon Chea s’était rendu aux autorités cambodgiennes en 1998 dans le cadre d’un accord qui avait mis fin aux activités des Khmers rouges. Il avait pour autant continué à vivre librement pendant près de dix ans dans la région de Pailin (nord-ouest), dans une petite maison en bois avec son épouse tout près de la frontière thaïlandaise.

Il avait finalement été arrêté fin 2007, non sans avoir fait des aveux, qu’il ne répétera pas au tribunal, devant la caméra du journaliste cambodgien Thet Sambath. Dans Enemies of the People (Ennemis du peuple) sorti en 2009, Nuon Chea raconte ainsi calmement pourquoi les Khmers rouges avaient exécuté les « criminels » impossibles à « rééduquer ».

« Ils ont été tués et détruits. Si nous les avions laissés vivre, la ligne du parti aurait été détournée. Ils étaient des ennemis du peuple ». Une confession d’un sang-froid effrayant diffusée lors de l’audience en 2011, devant un Nuon Chea qui n’avait pas bronché.

AFP

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