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Donald Tusk réélu à la tête du Conseil européen, Varsovie dénonce « le diktat de Berlin »


Âgé de 59 ans, ce natif de Gdansk, la ville des chantiers navals berceau du syndicat Solidarnosc, occupe depuis décembre 2014 le poste clé des institutions européennes. (photo AFP)

Le Polonais Donald Tusk a été réélu jeudi président du Conseil européen, malgré l’opposition de son pays qui dénonce « le diktat de Berlin ».

« Donald Tusk vient d’être réélu président du Conseil européen », a simplement écrit l’institution sur Twitter, en citant la toute première réaction de Donald Tusk, qui s’engage ainsi pour un deuxième mandat de deux ans et demi, jusqu’au 30 novembre 2019. « Je ferai de mon mieux pour rendre l’UE meilleure », a déclaré le Polonais sur le réseau social, se disant « reconnaissant » de la « confiance » et de « l’évaluation positive » de son travail.

Selon deux sources diplomatiques, la décision a été prise à l’issue d’un vote à 27 voix contre une. L’unanimité n’était pas requise. La reconduction de Donald Tusk, à laquelle s’opposait Varsovie, est le signe que l’UE est soumise au « diktat de Berlin », a dénoncé le ministre polonais des Affaires étrangères, Witold Waszczykowski. « La façon dont cela a été réalisé nous en dit long sur l’Union européenne et où elle va. Nous savons maintenant que c’est une UE sous le diktat de Berlin », a-t-il déclaré.

Parmi les soutiens du Polonais, le Premier ministre luxembourgeois Xavier Bettel qui a tweeté « Habemus EUCO (acronyme du Conseil européen en anglais) presidentum », souhaitant « bonne chance » à Donald Tusk.

Âgé de 59 ans, ce natif de Gdansk, la ville des chantiers navals berceau du syndicat Solidarnosc, occupe depuis décembre 2014 ce poste clé des institutions européennes. Avant d’endosser cette fonction, qui consiste principalement à coordonner les sommets des chefs d’État ou de gouvernement fixant les priorités politiques de l’UE, Donald Tusk a été pendant sept ans Premier ministre du gouvernement de centre-droit polonais. Il a dû apprendre à marche forcée l’anglais, qu’il maîtrisait à peine et qui est, de loin, la principale langue de travail des institutions européennes. Il a en revanche de bonnes notions de russe, qu’il a appris à l’école, mais aussi d’allemand, que lui a enseigné sa grand-mère kachoube, une minorité slave de la région de Gdansk (ou Dantzig), ancien territoire allemand.

Contesté dans son pays

Depuis son entrée en fonction à Bruxelles, Donald Tusk a dû faire face à une série de crises majeures : d’abord celle de la Grèce, lourdement endettée, puis celle des migrants et enfin le Brexit. Aucune de ces crises n’est d’ailleurs vraiment résolue, un atout pour le Polonais : la majorité des États membres de l’UE le soutient, convaincus que l’Union ne peut se payer le luxe de nouvelles divisions, de surcroît à propos de l’un de ses hauts dirigeants. Et ce même si le parti conservateur Droit et Justice (PiS) au pouvoir à Varsovie, qui reproche à Donald Tusk d’avoir « lutté contre son propre gouvernement » à Bruxelles, présentait un candidat alternatif, l’eurodéputé Jacek Saryusz-Wolski.

Le président du Conseil européen s’en est défendu mercredi, assurant « s’être efforcé durant son mandat de rester neutre et impartial ». « Je pense y être parvenu », s’est-il félicité. « En même temps, je suis responsable de la protection des valeurs européennes et des principes, c’est mon rôle et ma profonde conviction. »

Au cours de son premier mandat, cet homme à la mâchoire carrée et au regard bleu acier, grand amateur de foot – limite « hooligan » de son propre aveu – , n’a pas toujours été incontesté. « Au début, on avait vraiment l’impression que c’était difficile pour lui. Il ne voulait pas vraiment s’impliquer dans la crise grecque », remarque Janis Emmanouilidis, analyste du think tank bruxellois European Policy Center. « C’est seulement en juillet 2015 qu’il a pris les choses en main et a poussé tous les dirigeants à trouver un compromis. »

Lors du pic d’afflux des migrants en 2015, Donald Tusk a pris ses distances avec la généreuse politique d’accueil prônée par la chancelière allemande Angela Merkel, insistant davantage sur la nécessité de protéger les frontières extérieures européennes. « Cela n’a pas plu à Merkel qu’il se démarque si ouvertement d’elle », rappelle Janis Emmanouilidis. Mais, finalement, « il avait misé sur le bon cheval et Merkel a dû recalibrer sa politique. » Cette dernière lui a d’ailleurs apporté son soutien jeudi, estimant que sa réélection serait « un signe de stabilité » pour l’ensemble de l’UE et déclarant « se réjouir de poursuivre le travail avec lui ».

Après le référendum sur le Brexit, Donald Tusk, en première ligne, a multiplié les avertissements, prévenant qu’ « il n’y aurait aucun biscuit sur la table, seulement du sel et du vinaigre ». Face à Londres, refusant un divorce « à la carte », il a alors rapidement défini les lignes rouges pour empêcher l’UE de se diviser sur les difficiles négociations de sortie à venir.

Le Quotidien/AFP

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