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[Témoignage] Sites de rencontres : «Je ne me suis pas méfiée»


«Les seniors sont ciblés pour leur argent», pointe du doigt un expert de la sécurité sur internet. (photo archives LQ)

Il est de plus en plus courant de passer par des sites internet et des applications pour rencontrer un partenaire. Mais cela n’est pas sans danger, surtout pour les personnes âgées, les «silver surfers».

Dans le cadre du «Safer Internet Day 2019» – une journée mondiale pour promouvoir une utilisation sûre et responsable de l’internet et des technologies numériques – le «Midi du consommateur européen» qui s’est tenu mercredi à la Maison de l’Europe à Luxembourg a porté sur le thème des sites et applications de rencontre, notamment les pièges à éviter et l’attitude à adopter pour se protéger.

Marie a 62 ans. Elle est artiste. Il y a quelques mois, elle s’est fait arnaquer sur internet par un prétendant, qui à force de mots d’amour est parvenu à lui soutirer de l’argent. «Un nombre à cinq chiffres…»

Comment en est-elle arrivée là? «Je me suis inscrite sur Tinder. Je suis tombée sur un Anglais très sympathique, qui disait avoir des investissements ici, au Luxembourg. On s’est écrit et téléphoné jour et nuit pendant deux mois. Il savait tout sur moi.»

«J’ai consenti à l’aider»

Mais entre les expositions de Marie, les (prétendus?) voyages d’affaires de monsieur, les tourtereaux ne parviennent pas à se voir dans la vie réelle. «Il m’envoyait des photos. Je ne me suis pas méfiée. Alors, lorsqu’il m’a dit avoir des problèmes avec la banque et avoir besoin d’argent, j’ai consenti à l’aider.»

Marie prend tout de même quelques précautions : elle lui demande une copie de son passeport, de son permis de conduire, son adresse à Londres… «Mais en fait, tout est faux!» C’est lorsqu’il lui demande une deuxième fois de l’argent que la sexagénaire fait des recherches aidée de sa fille sur internet et découvre la supercherie. «On a découvert le même nom, le même numéro de passeport mais avec une autre photo.J’ai beaucoup pleuré, j’étais tellement déçue.»

Si Marie a accepté de témoigner mercredi, c’est pour éviter que d’autres tombent dans le même piège. «Il m’a tellement convaincue… Il m’a envoyé des fleurs, il ne m’a jamais fait d’avances sexuelles», confie Marie, qui depuis ne fréquente plus les sites de rencontres.

«Je me demande de qui j’étais amoureuse»

«Il ne faut pas oublier que même si la photo nous plaît, ce n’est peut-être pas la personne avec qui nous parlons», avertit la sexagénaire. «Aujourd’hui, je me demande de qui j’étais amoureuse. Je pense même qu’il s’agit d’une bande organisée. Et puis, j’ai peur que mon identité soit usurpée. Je lui ai aussi envoyé des photos.»

«Le problème, c’est qu’on ne sait pas qui se cache réellement derrière l’écran, et ce, quel que soit soit le réseau ou l’application», rappelle Jacques Federspiel, formateur Bee Secure, la plateforme destinée à sensibiliser le public aux dangers des nouvelles technologies.

Or les seniors sont des proies d’autant plus faciles qu’ils ne sont pas des «digital natives » (ils ne sont pas nés avec internet). «Ces « silver surfers » ne savent pas toujours comment ça fonctionne et ont plus de mal à reconnaître les failles du système. Tandis que les jeunes sont confrontés au risque de tomber sur des pédophiles ou de subir du harcèlement, les seniors sont eux ciblés pour leur argent», avertit Jacques Federspiel.

La prudence s’impose donc, sur internet et les réseaux sociaux en général, et sur les sites et applications de rencontres en particulier, où l’émotionnel peut vite prendre le pas sur le rationnel. «La première chose à faire est de se renseigner sur le type de rencontres que l’on va faire via l’application ou le site (plutôt amoureuses ou plutôt sexuelles) pour savoir où l’on met les pieds. Ensuite, si l’accès est payant, mieux vaut ne pas payer directement avec sa carte mais utiliser une payweb card (NDLR : carte de paiement virtuelle limitée à un paiement unique).»

Ne pas se dévoiler trop vite

Une fois le contact établi, il est essentiel de ne pas se dévoiler trop vite, dans tous les sens du terme. «Au début, il ne faut pas divulguer trop d’informations personnelles», insiste Jacques Federspiel. «Si la personne est dans le pays ou pas très loin, il faut essayer de la rencontrer physiquement (NDLR : dans un lieu public, bien fréquenté, voire en étant accompagné d’une personne de confiance). Il faut au minimum converser par caméra – si la personne trouve systématiquement une excuse, ce n’est pas bon signe. Et bien sûr, on ne donne jamais d’argent!», prévient le formateur, qui conseille par ailleurs de faire une recherche sur Google avec le nom ou via les photos de la personne pour voir si d’autres ont déjà signalé quelque chose.

Pour ceux qui n’ont pu échapper au piège, il faut garder les preuves et contacter la police ou Bee Secure (au 8002-1234) qui orientera vers les services d’aide adéquats.

Tatiana Salvan

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