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Lorraine : quel avenir pour les circuits courts ?


Les AMAP ont connu un succès fulgurant. Mais il semble que beaucoup de clients aient repris leurs anciennes habitudes. (photo Le RL/Armand Flohr)

Le covid a ouvert l’appétit des consommateurs pour les produits locaux, si possible bios. Deux ans après, ce goût leur est un peu passé.

En mars 2020, la terre a aussi tremblé pour les agriculteurs. «On s’est retrouvé sans cantines, sans restaurants, sans magasins à livrer», se souvient Philippe Duval, producteur de fromage de chèvre à Bazoncourt. Une vingtaine de fermes, éleveurs, maraîchers ont rejoint le drive fermier créé à Metz «à l’arrache». «On s’est vite retrouvé avec 350 demandes par semaine. L’avenue Malraux, là où les gens récupéraient leurs courses, était bloquée à cause du monde.» À cette période, les consommateurs se sont tournés vers la culture locale, bio de préférence. Les confinements leur laissaient du temps. Et les foyers recentraient leur budget sur l’essentiel. «On a dû refuser du monde», rapporte Philippe Duval. Cet engouement a duré une bonne année. «On ne comptait pas les mercis, les sourires, ça récompensait nos efforts, les risques, le travail. Sans ce système, c’était la mort assurée.»

Deux ans plus tard, la clientèle semble avoir repris ses habitudes. Les marchés ont rouvert aussi. «On enregistre désormais 150 commandes par semaine», évalue Philippe Duval. Le drive fermier de Metz a pourtant évolué, il a ouvert d’autres points de retrait à Bliiida, au parc des expos, à la Chambre d’agriculture. Il propose même un dépôt de paniers au tribunal judiciaire de Metz, pour les personnes qui y travaillent.

«Il faut davantage communiquer»

Pas question de baisser les bras. «Ça reste satisfaisant, car ce sont des consommateurs qu’on ne captait pas avant», tempère le producteur de fromage. Il sait que les mentalités ont changé. «Il faut davantage communiquer», glisse-t-il. Et faciliter, encore, le retrait des paniers.

Dans le Nord mosellan, l’AMAP (association pour le maintien de l’agriculture paysanne) du Colis Verrons partage la même envie de rebondir. Ce groupement de douze producteurs locaux traverse aussi une période de creux après avoir connu une affluence record au plus fort de la crise sanitaire. «Nous comptions 95 amapiens, contre 42 aujourd’hui», rapporte Jean-Louis Sperandio, président de l’AMAP créée en 2014 à Thionville. «On se doutait bien que cela allait baisser…» L’AMAP a toutefois capté de nouveaux adeptes et renouvelé un quart de ses adhérents qu’elle espère fidéliser.

Même challenge pour l’AMAP du pays de Briey, née en avril 2021, sous l’impulsion d’un autre groupement d’agriculteurs locaux déjà monté à Jarny. «Cela correspondait à une envie des gens», retient Bernard Fery, bénévole et membre fondateur. Une saison plus tard, un tiers des amapiens sont partis. «Le bio n’est pas forcément bon marché, certains peuvent trouver que c’est cher. D’autres estiment que le système de commande sur l’année est trop contraignant. Mais ce n’est pas la majorité», analyse Bernard Fery. L’AMAP a capté d’autres bonnes volontés et conserve ses 70 inscrits. Ces associations pour le maintien de l’agriculture paysanne sont moins souples que le drive fermier ou qu’un magasin de producteurs. «Nous ne sommes pas en concurrence, nous sommes complémentaires», rappelle Jean-Louis Sperandio. Le circuit court prend différentes formes. Preuve qu’il est appelé à durer.

Le drive fermier de Sierck a résisté

Le drive paysan du pays de Sierck-les-Bains n’a pas échappé à la règle : «Il y a eu une baisse notable de la demande à la sortie du troisième confinement en juin 2021», relève Florine, agricultrice à la ferme du Chambeyron. Mais les commandes sont reparties à la hausse en hiver. «Nous avons déménagé les locaux de Rettel à Sierck, dans un endroit plus accessible», explique Florine. La gamme de produits s’est également élargie. «On se doutait que le soufflé allait retomber… Nous avons interrogé nos clients, installé des points de relais supplémentaires, investi dans des conteneurs frigorifiques», ajoute Louis Gérardy, producteur de yaourts à Hunting, ferme de la Ceriseraie, et membre du drive.

Finalement, la baisse enregistrée est toute relative. «Nous avions 70 commandes par semaine en mai 2021 contre 65 un an plus tard. Nous avons perdu les consommateurs les plus volatils, mais nous avons fidélisé les autres», analyse Florine, la productrice de fruits et légumes. Ce cercle de producteurs locaux en Moselle-nord n’en était pas à son coup d’essai. Cela fait dix ans que ce modèle émerge doucement. «Le covid a accéléré les choses», constate Florine. Ils sont seize producteurs au sein de ce drive paysan, bientôt dix-sept, dans un rayon de 30 km. Comme ailleurs, l’offre est complète. Les consommateurs commandent à la carte. En quelques clics. C’est le principe.

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