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Lorraine : Ecomouv’, des salariés amers


Les salariés d’Ecomouv’ ont reçu l’annonce de leur licenciement comme un coup de poing.

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Aurélie, Pierre, Hector, Mireille, et Henri (de g. à d.) en discussion avec un syndicaliste. (Photo : RL/Gilles Wirtz)

Un nouveau jour à cocher dans le calendrier des 157 salariés messins d’Ecomouv’, jetés avec l’eau du bain par le gouvernement qui a décidé non seulement d’abandonner l’écotaxe, mais aussi de lâcher les hommes et femmes chargés de sa collecte.

Mardi a donc débuté officiellement pour eux la procédure de licenciement annoncée par leur employeur la semaine dernière. À une semaine de Noël, c’est cadeau! On en parle…

La presque soixantaine, Hector Garcia est mexicain. Il a posé ses bagages en France il y a une trentaine d’années, mais a conservé l’accent de ses origines. Ingénieur en électronique, il a tenté sa chance dans les énergies renouvelables avant de postuler chez Ecomouv’. Un boulot stable et valorisant, un horizon, de quoi atteindre la retraite sans souci.

« J’ai galéré au chômage, j’ai enseigné. Pour moi, à 58 ans, Ecomouv’, c’était une planche de salut, raconte Hector. Je me suis remis à faire des projets. Et puis, on s’est tous beaucoup investis. Le capital d’Ecomouv’, c’est son personnel ».

> Un personnel hautement qualifié

Des gens, pour la plupart, hautement qualifiés. Bardée de diplômes, Mireille Nicolas, native d’Haïti, maîtrise à la perfection l’anglais et l’espagnol, mais pas seulement. Elle est aussi géologue et professeur.

Aujourd’hui, à 59 ans, elle se demande à quoi ses compétences vont bien pouvoir lui servir : « Ce qui nous arrive est un traumatisme. Moi, j’ai bouffé tous mes droits au chômage avec les mois qu’on a passés à être formés. Demain, si je me retrouve sans emploi, ce sera une catastrophe. Qu’est-ce je peux faire dans la compétition à 59 ans ? »

L’histoire d’Hector et de Mireille croise celle des autres salariés d’Ecomouv’, une entreprise devenue, au bout d’un long processus de sélection de son personnel, une véritable tour de Babel où l’on s’exprimait dans toutes les langues d’Europe.

Aurélie Salgado, 34 ans, mère de famille, a ainsi trimé aux minima sociaux pendant plusieurs mois pour décrocher son contrat et intégrer ces équipes polyglottes. Traductrice en portugais, elle aussi ressent à présent de l’amertume. Mâchoires serrées, elle parle plus des autres que d’elle-même : « Des gens sont venus de loin pour travailler ici. Certains se sont mis des crédits sur le dos croyant avoir enfin un emploi sûr. D’autres ont quitté un travail stable pensant faire carrière chez Ecomouv’. Et voilà… »

Voilà, il n’a pas suffi de franchir les tirs de barrage, une batterie de tests et une palanquée d’entretiens, d’obtenir son «B2 européen en langue» pour se dessiner un avenir à quelque 1 600 euros net par mois.

Habitante de Marly, 53 ans, ancienne militaire, Marie-Line Rouvroy y a pourtant cru, un temps. Maintenant, elle est en colère. Un peu comme ses collègues « chargés de clientèle à distance », elle en veut au gouvernement, surtout à la ministre de l’Écologie, Ségolène Royal, qui n’a même pas daigné répondre à leurs sollicitations après ses sorties successives sur l’écotaxe et Ecomouv’.

« Je n’ai aucun ressentiment vis-à-vis de mon entreprise, insiste Marie-Line. Par contre, je suis furieuse contre ce gouvernement qui nous a méprisés et Hollande qui ne réagit pas. Le pire, c’est que dans tout cela, on passe presque pour des privilégiés parce qu’on est payés à ne rien faire. Moi, ne rien faire, c’est pas mon truc. Ce que je veux, c’est travailler, pas qu’on m’en empêche. Je vais avoir 54 ans. Alors, pour moi, après Ecomouv’, le marché de l’emploi, c’est mort ».

Foutu aussi pour Henri Julia, 57 ans, un vétéran de l’armée de l’air qui a fait le choix d’Ecomouv’ après la fermeture de la base aérienne 128 Metz-Frescaty. Il voulait rester dans la région. Mauvaise pioche. « J’ai encore des enfants à charge, pour moi, travailler est une nécessité, confie Henri. Aujourd’hui, j’ai l’impression de vivre une double peine. Je perds tout… » Comme Pierre Becker. Cet informaticien de 43 ans espère que, rapidement, maintenant, « on siffle la fin de la récréation » et que « l’État tienne sa promesse d’accompagner des salariés ». À l’évidence, il faudra être encore un tout petit peu patient.

Thierry Fedrigo (Le Républicain Lorrain)

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