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Le grand retour des prédateurs dans l’Est


(Photo : RL)

Dans les pas du loup, carnivores à poil et à plumes effectuent un retour en force dans des contrées désertées pourtant depuis longtemps.

«Certains de ces grands prédateurs reviennent spontanément, d’autres bénéficient du coup de pouce de l’homme. » Journaliste et naturaliste, Patrice Costa consigne en expert le retour – ou l’implantation – de ces « anciens proscrits » dans l’est du pays. Dans l’ouvrage richement documenté qu’il y consacre (Le croc, la griffe et la serre , Vent d’Est) le Lorrain retrace le parcours de huit représentants de cette faune sauvage que l’on croyait définitivement perdue pour nos contrées. Mais qu’ont donc en commun le loup gris, le lynx boréal, le raton laveur, le chien viverrin, le balbuzard fluviatile, le pygargue, le faucon pèlerin, le grand-duc ? Tous reprennent du poil de la bête et se réacclimatent bien à ce grand Est plutôt hospitalier. Alors que d’autres y courbent l’échine : « L’urbanisation, les pratiques agricoles – marquées par l’inquiétante disparition de la prairie – précipitent ainsi le déclin de 12 % des espèces d’oiseaux. »

Un tableau plutôt sinistre que vient donc atténuer le constat brossé par Patrice Costa, celui de la capacité de résilience de cette faune soumise aux pressions de toute nature.

Petit rappel historique : « La première moitié du XXe siècle a marqué l’apogée de la guerre ouverte déclarée aux carnassiers terrestres et aux oiseaux de proie. Le loup gris et le lynx boréal ont disparu du pays… De grands rapaces comme le balbuzard pêcheur ont été priés de nidifier ailleurs. » L’espoir renaît dans les années 1970. Les conséquences désormais visibles de ce désastre accélèrent alors la prise de conscience. La reconquête du terrain perdu passe par la contrainte de la loi. « Le processus de réensauvagement semble aujourd’hui inexorable », applaudit le naturaliste. Lequel se garde pourtant de crier victoire. Bien des obstacles se dressent encore sur le chemin des candidats au retour.

Succès incontestable dans le Jura, le programme de réintroduction du lynx bute dans les Vosges sur l’hostilité du monde cynégétique.

Nouveaux lâchers

Costa y pointe notamment le mode de chasse « à l’affût » plus prédatrice que celle « en battue » dans le Jura. L’agriculture joue également sa part dans l’acceptation de l’animal : « Après réflexion, les éleveurs du Jura ont vu d’un bon œil la présence du lynx. Ils ont doté leurs troupeaux de chiens patou ». Bilan, environ 120 lynx recensés dans l’arc jurassien, alors que les ballons vosgiens en sont quasi-orphelins. De nouveaux lâchers sont programmés, de l’autre côté de la frontière, dans les Vosges du Nord.

Contrairement au félin, le loup gris (de souche transalpine) fréquente plus assidûment les Vosges que le Jura, où il ne fait que passer. Encore que son aire d’expansion couvre désormais tout le Nord-Est. « Le retour du loup vaut pour tout le continent. Il est aux portes de Berlin », rapporte Patrice Costa. Une bonne santé que l’animal doit, lui aussi, à la loi, en l’espèce la convention de Berne. Le gouvernement français délivre une autorisation de prélèvement de 36 individus par an. Pour autant, les tensions demeurent fortes.

La prospérité recouvrée des grands rapaces est plus aisée. Certains couples de faucons pèlerins nichent même en ville, où ils ont trouvé refuge sur les monuments, comme à Nancy ou Strasbourg. « Le Grand Est a toujours constitué un vivier à rapaces », confirme le naturaliste. Débarqués d’Amérique du Nord et d’Asie, le raton laveur et le chien viverrin semblent, eux aussi, avoir toujours vécu sur leur nouveau territoire. Illustration d’une intégration réussie, quoique discrète, le plus dur restant de les dénicher.

Xavier Brouet

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