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La Lorraine attend toujours les emplois de la métallurgie de demain


Un représentant syndical d'ArcelorMittal regarde la vallée de la Fensch et les hauts-fourneaux du site de Florange (est de la France), le 25 avril 2013 à Hayange Un représentant syndical d'ArcelorMittal regarde la vallée de la Fensch et les hauts-fourneaux du site de Florange (est de la France), le 25 avril 2013 à Hayange. (Photo : AFP)

Promis alors que les hauts-fourneaux de Florange refroidissaient à peine, l’institut de recherche public sur la sidérurgie devait ouvrir «fin 2015», assurait François Hollande il y a un an en Lorraine, et «faire qu’il y ait plus d’emplois» dans l’emblématique vallée de la Fensch.

Douze mois plus tard, le chantier est toujours en cours et si tout le monde souhaite encore croire aux promesses d’emplois, on parle aujourd’hui plus volontiers de maintien que de création.

Baptisé «Metafensch», l’institut, qui s’installera définitivement à Uckange (Moselle) au printemps 2016, a pour vocation de «penser l’avenir» de la métallurgie en lien permanent avec les industriels de la région, qui pourront s’en servir comme d’un outil de recherche et d’expérimentation.

Trois fours de recherche de pointe seront installés – le dernier devrait arriver mi-2017 – et une quinzaine d’employés, chercheurs et techniciens seront en permanence sur le site pour aider à développer de nouvelles techniques et à appuyer les efforts de recherche et de développement des gros industriels, mais aussi des PME et PMI, de la vallée.

Concrètement, l’institut a été pensé pour permettre à ces acteurs de bénéficier d’outils et de cerveaux qu’ils ne peuvent pas toujours avoir en interne. Pour l’instant, «six projets ont été choisis après des tours de table avec les industriels de la région», explique le directeur de Metafensch, Neill McDonald.

Asco Industrie est l’un d’entre eux. Gilles Auclaire, directeur Recherche et développement chez le producteur d’acier, est ravi: «Quelque chose qui n’existait pas avant (…) qui comble un chaînon manquant».

«Nous avons un centre de recherche, qui a des moyens qui sont les siens, des moyens développés», explique-t-il. «Mais quand on veut passer de la conception à l’industrialisation, parfois on doit passer par une échelle intermédiaire: c’est typiquement la vocation de l’outil Metafensch qui vient d’être créé».

«Cela va nous permettre d’expérimenter de nouvelles solutions acier pour nos clients, pour tester si ce que l’on a conçu va leur servir», dit-il, enthousiaste. Dans une région minée par les fermetures d’usines et les délocalisations, encore marquée par la fermeture de Florange, toute aide au maintien de l’industrie est bienvenue.

Les applications concrètes des recherches sont tenues secrètes – propriété intellectuelle oblige. Mais plusieurs axes sont définis, avec en ligne de mire la réduction de déchets et la responsabilité écologique.

Un meilleur recyclage des produits industriels – notamment les sièges de voitures – est à l’étude. Le travail sur la poudre de titane qui, de bonne qualité, permet de créer des prothèses bien mieux acceptées par le corps humain. Ou encore le recyclage de pièces de titane pour l’aéronautique: grâce à la poudre de titane, plus malléable, il est possible de fabriquer des pièces plus proches de la forme finale et d’éviter le maximum de perte de matière.

« Penser l’avenir »

Pour l’instant, à côté du chantier, seuls quatre petits préfabriqués, fouettés par le vent, abritent les premiers employés, dont Neill McDonald. Le tout sous le regard des hauts-fourneaux d’Uckange, fermés en 1991.

«Symboliquement, c’est bien tombé», reconnaît Michel Liebgott, député socialiste de Moselle et président de la communauté d’agglomération du Val de Fensch, qui participe aux travaux. «C’est la place idéale pour penser l’avenir sans oublier le passé».

Avec la fermeture des industries et la concurrence féroce de l’acier chinois, le passé de la vallée de la Fensch, marqué notamment par le conflit à ArcelorMittal, a vu disparaître de nombreux emplois. En investissant 20 millions d’euros dans Metafensch – qui devra être à l’équilibre en 2018 -, le gouvernement espérait y remédier et créer de nouveaux postes.

Si, en posant la première pierre du site il y a un an, François Hollande parlait encore d’un institut qui allait «servir à la création d’emplois», aujourd’hui l’espoir est plutôt que cela en maintienne.

«Le premier objectif est de consolider les emplois», reconnaît M. Liebgott. «La compétition est tellement féroce… Il existe des niches, on peut, ici et là, arriver à des innovations qui seront créatrices d’emplois – des dizaines, des centaines. Plus des milliers».

«De nos jours, les investissements ne créent pas plus d’emplois forcément au niveau des techniciens», abonde Lionel Bellotti, secrétaire fédéral pour FO métallurgie, qui rappelle qu’en France entre 1993 et 2015 quelque 25 000 postes ont disparu dans la sidérurgie.

En Europe, en sept ans, ce sont l’équivalent de 50 millions de tonnes de capacité de production qui ont fermé. «Politiquement, après Florange, il fallait une annonce dans la région», ajoute M. Bellotti, qui ne voit pas d’un mauvais œil l’institut de recherche public. «C’est nécessaire». «C’est nécessaire, mais pas suffisant».

Son syndicat avait dénoncé une «trahison» du chef de l’Etat après l’arrêt, en avril 2013, des hauts-fourneaux de Florange. En 2012, pendant la campagne présidentielle, François Hollande avait promis une loi obligeant un industriel se désengageant d’une usine française à la céder à un repreneur.

Lionel Buriello, de la CGT à Florange, espère se tromper mais ne peut s’ôter «l’intime conviction que c’est le miroir aux alouettes». «Au départ on y croyait», reconnaît-t-il. «Mais pour l’instant, on n’a pas grand-chose à se mettre sous la dent».

AFP/M.R.

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