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Flambée des prix : les restaurateurs messins pris à la gorge


Au restaurant Vini e cucina, l’huile de colza remplace exceptionnellement l’huile de tournesol.  (photo Le RL/Gilles Wirtz)

La flambée du prix des matières premières inquiète les restaurateurs. Nombreux sont ceux qui ont dû augmenter leurs tarifs à contrecœur.

C’est un truc de fou ! Je n’avais jamais augmenté mes prix depuis l’ouverture en 2016 mais là tout augmente, que ce soit le blé ou l’huile, alors je n’ai pas le choix», se désole Youness, gérant du restaurant Pasta Mery à Metz. Il n’est pas le seul dans cette situation. Ces derniers mois, la guerre en Ukraine a fait exploser les prix. Ceux de l’huile de tournesol sont particulièrement impactés avec une hausse de près de 40 %. Celle-ci se fait d’ailleurs de plus en plus rare dans les rayons des supermarchés, mettant les restaurateurs dans une situation délicate. Dorénavant, Youness ne fait des frites que le week-end, contre toute la semaine auparavant.

Pour s’y retrouver, plusieurs choix s’offrent aux restaurateurs. Certains baissent leurs marges afin de ne pas répercuter cette hausse des matières premières sur les consommateurs. «On gagne un peu moins mais tant pis, on essaye de trouver de petites astuces pour que ça nous coûte moins cher. Pour la friture d’aujourd’hui, on va exceptionnellement remplacer l’huile de tournesol par de l’huile de colza. Mais c’est compliqué. Depuis la réouverture après les confinements, on faisait déjà 25 % de chiffre d’affaires en moins par rapport à 2019», confie Franck, le gérant de Vini e cucina à Metz.

«Augmenter d’un euro, c’est déjà trop !»

Malgré tous ces efforts, d’autres ont été contraints d’augmenter la note. Au Palais Banh-Bao, à Metz toujours, les prix ont grimpé de 30 %. D’autant plus que pour les restaurants asiatiques, la friture est un incontournable. «Pauvres clients et pauvres de nous ! Il y a des gens qui venaient deux à trois fois par semaine et qui ne viennent plus qu’une fois car ils n’ont plus les moyens», dit une employée. Le restaurant se fournit notamment auprès du grossiste Metro, où l’huile de tournesol est désormais rationnée. Pas plus de deux bidons de 25 litres par client et par jour. Une quantité suffisante pour le moment, qui fait cependant poindre un inquiétant risque de pénurie.

Un peu plus bas dans la rue, le gérant du Corner Coffee, Pierre Esposito, raconte la même galère : «Tout a augmenté. Le café, le lait, le pain… même le citron ! On essaye de rééquilibrer l’addition pour que le client s’y retrouve. Quand on augmente le prix de certains produits, on baisse celui d’autres. Par exemple, comme les sodas n’ont pas augmenté à l’achat, on baisse les tarifs sur notre carte pour se rapprocher de ceux du marché.» Il y a aussi ceux qui s’adaptent au portefeuille du client. Pour cette raison, chez Pasta Mery, il n’y a que la formule étudiante qui ne connaît pas l’inflation. «Les jeunes n’ont déjà pas de sous, alors augmenter d’un euro, c’est déjà trop !»

«Les salaires vont forcément bouger»

L’inflation est là, déjà visible à la carte des restaurants et dans les factures d’énergie et de carburants. Pour les professionnels, c’est un aléa de plus, loin d’être facile à intégrer dans l’équilibre des comptes. De là à fermer boutique, non. Président de l’UMIH, l’union des métiers et des industries de l’hôtellerie, Christophe Thiriet est optimiste : «La gestion va devenir super importante, il va falloir être attentif aux charges… Quand la facture de gaz est multipliée par trois, il va falloir répercuter sur les prix pour conserver les marges. Toutes les entreprises vont augmenter leurs prix.» Et elles augmenteront leurs salaires en conséquence, Christophe Thiriet en est convaincu. L’UMIH regroupe 400 adhérents, sur l’ensemble des 3 000 cafetiers, hôteliers et restaurateurs de Moselle, mais c’est assez pour avoir une juste vue du marché, en tension. Il manque 3 500 postes ! «Il y a tellement de tension sur l’emploi… Si ça n’augmente pas, les gens iront voir ailleurs. C’est la loi de l’offre et de la demande. Je ne crois pas que le gouvernement pourra faire des chèques à tout, après les chèques énergie ou les coups de pouce à l’essence, pourquoi pas les chèques pantalon ?» L’inflation ne l’effraie pas. «Il y a trente ans, les taux d’intérêt étaient à 20 %, l’inflation à 10 % et on s’adaptait.» Les pénuries diverses non plus. «Il n’y a aucune raison à la pénurie d’huile, elle est purement spéculative et par crainte, c’est comme les stocks de papier toilette durant le confinement…»

Olivier Jarrige

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