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Remich : vin et architecture, pari réussi


Avec sa vinothèque et sa grande salle de réception, le nouveau bâtiment met le domaine Claude Bentz sous les projecteurs. (photo Yermat)

Le domaine Claude Bentz vient de s’offrir une spectaculaire extension entièrement dédiée à l’accueil du public avec vinothèque et salle de réception. Une vraie affaire de famille.

Auparavant, le domaine Claude Bentz n’était pas de ceux qui font beaucoup parler d’eux. Créé en 1933 par Joseph Bentz (d’abord à Bech-Kleinmacher, puis à Remich à partir de 1986), sa production est reconnue (il est présent dans de nombreux beaux restaurants), sa clientèle est fidèle (60 % de clients privés, mais aussi pas mal de communes et d’entreprises) et, à vrai dire, les ventes se faisaient un peu toutes seules. La maison est l’image même d’une stabilité solide et intemporelle.

Mais cela, c’était avant l’arrivée de Carole Bentz (38 ans), fille aînée de Claude, en 2019. «Je suis une vraie passionnée du vin et cela faisait 5 ou 6 ans que j’avais envie de rejoindre l’entreprise, mais il fallait trouver le bon moment», sourit-elle. Bref, elle avait envie de quitter le ministère de la Fonction publique qui l’employait pour s’occuper de la propriété familiale. Passer de la sécurité d’un salaire assuré à la fin du mois au stress d’une profession où une bonne partie des revenus annuels peuvent s’évaporer en un seul coup du sort (gel, grêle…) n’était pas une solution de facilité, mais Carole Bentz montre depuis trois ans qu’elle ne manque ni d’énergie ni de volonté.

Dès la première année, elle lance la production du premier crémant de la maison qui sortira à l’automne 2020. C’est une grande réussite, la référence est rapidement en rupture de stock. La même année, elle décide d’arracher un hectare et demi de riesling, de pinot blanc et d’auxerrois d’un seul tenant sur le Naumberg, à Bech-Kleinmacher. À la place, elle plante du pinot noir et du chardonnay, certainement deux des cépages qui profitent le plus du réchauffement climatique, utiles pour les vins tranquilles comme pour les crémants.

Et depuis mardi dernier, jour de l’inauguration des nouveaux bâtiments, le domaine dispose donc d’une formidable vitrine pour présenter son savoir-faire. Famille qui ne manque décidément pas de ressources, les Bentz n’ont pas eu à aller chercher bien loin leur architecte : la sœur cadette de Carole, Jil (34 ans), fait partie de la corporation. «J’ai étudié à Munich, Montréal et Berlin, où j’ai obtenu mon diplôme, explique-t-elle. J’ai ensuite poursuivi mes études à l’université de Columbia (NDLR : New York) où j’étais également professeure-assistante.» Lorsque la famille s’est décidée à développer sa visibilité, elle n’a pas hésité à changer de vie une nouvelle fois. «C’est une opportunité exceptionnelle, d’autant que je n’avais encore jamais suivi de chantier», reconnaît celle qui installe son studio d’architecture juste au-dessus de la vinothèque.

Une prouesse architecturale

Comme pour tout chantier, la construction imposait de répondre à plusieurs défis. Le premier est la configuration d’un terrain tout en longueur (75 m). «Il n’était pas question d’en faire un couloir, explique Jil Bentz. Grâce à des voiles de béton placés en forme de X, nous avons créé plusieurs espaces qui provoquent un effet dynamique.» Deuxième défi : la route de Mondorf, juste à côté, qui est surélevée. «Nous avions la possibilité de terrasser pour que le bâtiment soit au niveau de la rue, mais alors le parking se serait retrouvé un niveau plus bas, ce qui n’aurait pas été pratique pour les clients venus acheter du vin. Pour rester au niveau originel mais augmenter la visibilité depuis la route, nous avons choisi de créer un étage bien visible.»

C’est ainsi qu’a été imaginée cette couronne argentée composée de dizaines de pièces d’aluminium spécifiques (le même qu’au Louvre-Lens). L’effet d’optique est assez saisissant. Par beau temps, le ciel bleu y trouve un bel écho et lorsqu’il tourne au gris, le toit et le ciel viennent se confondre. «Au crépuscule, les reflets sont magnifiques, s’enthousiasme l’architecte. Je ne m’attendais pas à ce que l’aluminium capte la lumière aussi intensément.»

À l’intérieur, rien n’a été laissé au hasard. Chaque détail a été le fruit d’une réflexion élaborée. «Il était évident que le béton serait très présent, il rappelle la minéralité de nos vins», souligne Jil Bentz. Il est ici traité de manière particulièrement esthétique, avec différents jeux de textures et de couleurs. Les agrégats inclus dans le très beau terrazzo qui recouvre le sol ont également été soigneusement sélectionnés, ce sont des pierres mosellanes concassées, les mêmes que l’on retrouve au pied des ceps.

Aux murs, des fenêtres en losanges et d’immenses baies vitrées guident le regard vers le jardin conçu depuis 18 ans par Jojo Bentz, la mère de Carole et Jil et, un peu plus loin, vers les vignes du Goldberg. Si le bâtiment est aussi grand, c’est que le domaine ne manque pas d’ambitions. Tout d’abord, il y a la vinothèque où sont élégamment présentées toutes les bouteilles. On peut y déguster, mais debout. «Il ne s’agit pas d’un bar à vin, plutôt d’une boutique», précise Carole Bentz. Et à l’arrière, les différents espaces peuvent être loués pour tout type d’événements, de la dégustation entre amis au walking diner de 250 personnes. Une cuisine professionnelle entièrement équipée attend d’ailleurs les traiteurs et les restaurateurs. Jusqu’à 150 personnes peuvent prendre place pour déjeuner ou dîner à l’intérieur.

Des chefs invités

Le thème qui a guidé l’élaboration du concept a été «Wine meets architecture», on pourrait aussi lui rajouter la gastronomie puisque Carole Bentz a l’intention de créer des ponts entre les chefs et le domaine. «Marc Fideler (NDLR : du restaurant Mosaik, à Pétange) sera le premier à proposer des ateliers culinaires de douze personnes où il travaillera sur la notion d’accord mets/vin, souligne la vigneronne. C’est un concept que je souhaite développer, car il permettra de croiser nos deux clientèles qui partageront le goût des belles tables.»

Sur la Moselle, de plus en plus de domaines investissent pour proposer une nouvelle offre oenotouristique. Si la région manque toujours d’un phare qui soit une porte d’entrée évidente (ce que doit devenir le Centre Moselle de Ehnen, quand il sera construit), les vignerons ont bien compris qu’une cave accueillante est un atout qui peut rapporter gros. Tous ceux qui disposent d’espaces de réception à louer vous le diront, il faut réserver tôt pour en profiter. Carole Bentz le constate déjà : «Je suis surprise, nous avons enregistré beaucoup de réservations avant même que le bâtiment soit inauguré! Il y a des fêtes privées, mais aussi plusieurs entreprises qui ont prévu des événements avec leurs clients ou des opérations de team-building avec leurs employés. Je ne pensais pas que nous attirerions aussi tôt autant de demandes. C’est rassurant : cela confirme que nous allons dans la bonne direction.»

Des portes ouvertes en juin

Chaque dimanche de ce mois, le domaine ouvre ses portes entre 15 h et 19 h. Les amateurs pourront venir déguster tous les vins, y compris ceux du millésime 2021, et l’excellent crémant dans le nouveau bâtiment, sur les grandes terrasses ou dans le jardin.

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