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Des prisonniers libres

Increvable, Alexeï Navalny. Le plus célèbre opposant de Vladimir Poutine résiste à tout. Le président russe ne ménage pourtant pas ses efforts pour éradiquer sa bête noire, toujours là à traîner dans ses pattes. Lui réservant tous les traitements de défaveur possibles et imaginables. Rien à faire. Une bonne dose de Novitchok, Navalny tient le choc. Dix-neuf années de prison sur le dos, Navalny se fait une raison. Du fond de sa cellule de Melekhovo – perdue quelque part dans l’oblast de Vladimir, le bien nommé –, l’inusable militant anticorruption ne se laisse pas abattre si facilement. Les yeux toujours remplis d’espoir, éternel sourire aux lèvres, il continue d’empoisonner l’existence de son geôlier. C’est de bonne guerre, évidemment. L’invasion de l’Ukraine, que Navalny dénonce sans relâche depuis le premier jour, lui a justement valu un nouveau jugement pour «extrémisme». Avec cette peine «stalinienne» infligée au bout de la mascarade. L’équivalent d’une condamnation à mort, selon ses mots.

L’avocat de métier va dans l’immédiat pourrir pour longtemps dans une autre colonie pénitentiaire – version «modernisée» des camps du Goulag –, plus stricte encore que celle où il croupit actuellement. Voici la teneur du message adressé à tous ceux, à travers le pays, tentés de reprendre le flambeau. Le journaliste d’opposition Vladimir Kara-Murza en sait aussi quelque chose, pour avoir écopé de 25 ans de détention en avril dernier. Le Kremlin se débarrassera des nuisibles par tous les moyens, sans pour autant les écraser. Si les traîtres à la patrie sont des mouches à recracher, pour reprendre le langage fleuri du poète de Moscou, les dissidents peuvent au contraire garder la vie sauve. À condition de prendre très cher. Pour l’exemple, donc.

Qu’importe, ils sont libres. Derrière les barreaux, Kara-Murza comme Navalny n’ont pas l’intention de la boucler. Le premier écrit inlassablement ses lettres au monde entier. Le second multiplie les appels à la lutte, histoire de faire un jour tomber la bande «de voleurs et de crapules qui ont pris le pouvoir». Tant qu’ils auront du souffle, ils s’époumoneront. Si Poutine entend les faire taire pour de bon, il lui faudra les réduire définitivement au silence.

Alexandra Parachini

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